Londres

La culture britannique au régime sec

Par Sophie Flouquet · Le Journal des Arts

Le 2 novembre 2010 - 754 mots

Seuls les musées nationaux seront relativement épargnés par les coupes budgétaires prévues par les responsables de la culture outre-Manche.

LONDRES - Contrairement en France où la transparence n’est pas de mise, le secrétaire d’État à la Culture, aux Jeux olympiques, aux Médias et au Sport, Jeremy Hunt, ainsi que son ministre de la Culture et des Médias, Ed Vaizey, ont suivi le credo du gouvernement de coalition et décidé de jouer carte sur table. Présentée le 20 octobre, la Spending revue, ou « revue des dépenses », n’a donc ménagé guère de surprise pour la culture, intégrée à un vaste portefeuille où le sport continue à bénéficier d’une manne substantielle dans le contexte de préparation des Jeux olympiques de Londres en 2012. L’enveloppe globale accuse une baisse de 24 %. Ce sont près de 500 millions de livres sterling qui devront être économisés d’ici 2015 sur les deux milliards de livres sterling de budget global. Avec une orientation très claire : préserver les musées et porter le gros des réductions sur la création et les arts vivants, mais aussi sur le coût de fonctionnement du ministère, qui devrait être réduit de moitié, notamment par le biais de suppressions de postes. 

Équation difficile à résoudre
Sur les quatre prochaines années, les musées nationaux vont voir baisser leur subvention de fonctionnement de 15 %. Certains redoutaient davantage, mais le lobbying mené durant l’été par la Conférence des directeurs de musées britanniques, présidée par Michael Dixon, a permis d’obtenir des arbitrages favorables. L’équation sera toutefois difficile à résoudre, puisque Jeremy Hunt a annoncé qu’il souhaitait que la mesure de gratuité de l’accès aux collections permanentes, instaurée en 2001 par le gouvernement travailliste de Tony Blair, soit maintenue. Selon la Conférence des directeurs des musées britanniques, la fréquentation des musées nationaux aurait en effet crû de 41 % depuis cette date, les établissements concernés ayant atteint, en 2009, la fréquentation record de 42 millions de visiteurs.
La National Gallery, le British Museum ou encore la Tate Gallery vont être amenés à faire face à des choix. Si ces établissements affichent en moyenne 45 % de ressources propres, ils vont devoir trouver la martingale pour continuer à produire, à moindre coût, des expositions blockbusters, génératrices de ressources propres, à moins d’en augmenter les tarifs, déjà élevés. Le ministère les encourage par ailleurs à monter en puissance en termes de partenariats financiers et de philanthropie, une mission ayant été confiée à Neil Mc Gregor, directeur du British Museum, sur l’amélioration du système des fonds de dotation. Enfin, Jeremy Hunt a annoncé, sans en préciser les modalités, qu’il négociait avec le Trésor la possibilité d’autoriser les musées à puiser 143 millions de livres sterling dans leur fonds de réserve spécial. Un établissement londonien sera néanmoins plus à la peine : le Design Museum, qui ne bénéficiait d’une subvention que depuis 2005 et voit sa dotation diminuer de 65 %. Les musées régionaux, bénéficiaires d’un programme de l’État, vont également subir une baisse de 15 % de cette enveloppe. Si la suppression pure et simple du dispositif a été évitée – d’autant que l’organisme qui le pilotait est dissous –, certains observateurs craignent que quelques établissements ne soient obligés de recourir à des cessions d’œuvres pour assumer leur fonctionnement. 

Réductions drastiques
En matière de patrimoine, la sanction est également tombée. Et elle est sévère pour l’English Heritage, organisme gestionnaire de plus de 400 monuments historiques, qui devra composer avec une baisse de 32 % de sa subvention, cela après une décrue de 130 millions de livres sterling en treize ans. L’effet devrait être très modérément atténué par la réforme de la loterie nationale qui devrait permettre d’abonder le secteur du patrimoine, du sport et des arts de 19 millions de livres sterling en 2011-2012, puis 50 millions de livres sterling par an à partir de 2012. Les subventions pour la restauration des églises vont, quant à elle, baisser de 20 %.
D’autres réductions drastiques vont concerner l’Art Council, organisme distributeur de subventions en faveur de la création et du spectacle vivant, qui va voir fondre sa dotation de 29 %. Le pari est d’autant plus difficile que 80 % des coupes interviendront au cours des deux prochaines années. Par ailleurs, la commission de l’architecture, chargée de promouvoir la qualité architecturale, se voit privée de toute subvention sans pour autant être supprimée. Suite à ces annonces, l’opposition travailliste s’est indignée du niveau des coupes et de leur conséquence sur la vie culturelle britannique. D’importantes décisions devraient être annoncées dans les semaines à venir.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°334 du 5 novembre 2010, avec le titre suivant : La culture britannique au régime sec

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