Politique

Politique culturelle algérienne

Départ de la ministre algérienne de la culture

Par Olympe Lemut · Le Journal des Arts

Le 6 septembre 2019 - 502 mots

ALGER / ALGERIE

Meriem Merdaci, nommée en avril dernier, a présenté sa démission après le décès de cinq personnes dans une bousculade lors d’un concert à Alger.

Meriem Merdaci au micro du Journal de la chaîne de télévision algérienne El Bilad, le lundi 1er avril 2019.
Meriem Merdaci au micro du Journal de la chaîne de télévision algérienne El Bilad, le lundi 1er avril 2019.
© El Bilad

Alger. Jeudi 22 août, un mouvement de foule pendant le concert du rappeur Soolking au stade du 20-Août 1955 a provoqué la mort de cinq personnes dont un adolescent âgé de 13 ans. Une enquête est en cours pour déterminer les causes de l’accident, mais d’après plusieurs médias algériens dont le quotidien El-Watan, le stade était vétuste et les normes de sécurité n’étaient pas ne respectées. Ce stade, qui date d’avant l’indépendance de l’Algérie, avait déjà connu des accidents mortels dans les années 1980. L’opposition et les médias ont tout de suite mis en cause l’Office national des droits d’auteurs (Onda), organisateur du concert sous l’égide du ministère de la Culture et de la ministre elle-même. Le directeur général de l’Onda a été immédiatement limogé tandis que Meriem Merdaci présentait sa démission au chef de l’État.

Une affaire symbolique

Dans le contexte politique tendu que connaît l’Algérie, cette affaire revêt un caractère symbolique important. En effet, le rappeur d’origine algérienne Soolking avait consacré une chanson au hirak, le soulèvement populaire né fin février dans les rues du pays. Comme le souligne l’historien Benjamin Stora, son morceau Liberté « est repris par la foule dans les manifestations, c’est devenu une sorte d’hymne populaire ». Le concert du 22 août était en outre l’unique date algérienne de la tournée du rappeur, d’où l’afflux de spectateurs à l’entrée du stade ce soir-là, des spectateurs très jeunes et plutôt hostiles au pouvoir en place.

Vivement critiquée pour son manque d’expérience politique, Meriem Merdaci n’a pas eu d’autre choix que de partir après cet accident. Sa nomination en avril 2019 avait surpris les Algériens car elle est jeune (36 ans) et représente la société civile – elle travaille dans l’édition indépendante (lire le JdA no 521, 12 avril 2019). Comme la plupart des ministres du gouvernement de transition, elle était huée lors de ses déplacements professionnels, comme lors de l’inauguration de deux festivals culturels cet été. Constamment attaquée sur les réseaux sociaux pour ses déclarations ambiguës sur le hirak et son manque de soutien au mouvement, Meriem Merdaci n’avait pas réussi à séduire la jeunesse algérienne, qu’elle souhaitait pourtant attirer vers la culture comme elle l’avait déclaré lors de sa nomination.

Dans un pays où la culture est loin d’être une priorité, le bilan de la ministre pendant les cinq mois où elle fut en fonctions est maigre. Elle n’a pas eu le temps de réformer le secteur de l’édition comme elle le désirait, et a pris peu de décisions marquantes. Cependant elle avait signé mi-août un accord avec les États-Unis portant sur la protection des biens culturels algériens, pour endiguer les exportations illégales : le pays est en effet gangrené par des fouilles archéologiques clandestines. Son successeur au poste de ministre de la Culture est l’actuel ministre de la Communication, Hassan Rabehi, qui cumule aujourd’hui les deux fonctions dans l’attente d’élections présidentielles toujours retardées.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°528 du 6 septembre 2019, avec le titre suivant : Départ de la ministre algérienne de la culture

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