Anne Samson

Directeur de la communication corporate d’ABN AMRO (France) Banque NSMD / NSM Vie

Par Philippe Régnier · Le Journal des Arts

Le 28 septembre 2001 - 1031 mots

Directeur de la communication corporate d’ABN AMRO (France) Banque NSMD / NSM Vie - une banque particulièrement active dans le domaine du mécénat artistique -, Anne Samson commente l’actualité.

Les attentats qui ont frappé les États-Unis devraient avoir de nombreuses répercussions dans le domaine de l’art. Le Musée du Louvre, par exemple, a vu sa fréquentation immédiatement baisser. Pensez-vous que ces événements auront des incidences sur la politique de mécénat des grandes entreprises ?
Certainement, pas uniquement au niveau du mécénat, mais aussi sur les stratégies d’entreprises et les décisions à prendre ou à revoir. Dans ce cadre-là, les banques sont particulièrement touchées parce qu’elles sont au cœur de l’économie. Les attentats ont eu des implications immédiates sur les marchés financiers. Aujourd’hui, les banques doivent répondre aux préoccupations de leurs clients mais elles manquent de visibilité sur la situation à venir. Nous nous efforçons avant tout de rassurer et d’accompagner nos clients. En ce qui concerne le mécénat d’entreprise, et en particulier le mécénat artistique – qui est considéré comme un outil très important dans la stratégie de la société –, son action peut paraître aujourd’hui dérisoire ou décalée. Les événements dramatiques auront également des retombées sur les investissements média et hors média.

Même si de nombreuses manifestations ont été annulées, vous avez maintenu le jury pour l’attribution du Prix Gilles-Dusein.
En tant qu’entreprise, nous avons aussi dû annuler certaines réceptions. Le mécénat, et on le voit par exemple avec le Trophée Lancôme, est souvent décliné en opérations de relations publiques. D’ailleurs, le mardi 11 septembre, le dîner qui devait être donné pour l’exposition Dubuffet par LVMH, a lui aussi été annulé. En ce qui nous concerne, nous avons effectivement maintenu les délibérations du jury du Prix Gilles-Dusein qui a statué le 14 septembre dernier. Les dossiers étaient prêts et il y avait une réelle attente de la part des artistes. Cependant, nous n’avons pas encore fixé la date de remise du prix qui a un caractère plus festif.

Ce prix a été remis à Alice Anderson, une vidéaste. N’est-ce pas antinomique pour une récompense qui devait au départ honorer un photographe ?
Nous avons créé une fondation d’entreprise dédiée à la photographie contemporaine il y a cinq ans. Depuis, nous avons été amenés à nous interroger sur le changement éventuel des statuts de la Fondation NSM Vie pour la photographie contemporaine pour étendre son action à l’image en général. Bien que la photographie soit au centre de notre intérêt, les liens avec la vidéo sont évidents. Cette année, sur les onze dossiers sélectionnés pour le Prix Gilles-Dusein, neuf concernaient des artistes qui utilisent le médium de la vidéo. La question ne s’est alors plus posée. D’ailleurs, la collection de notre entreprise s’est ouverte à la vidéo depuis un an. Nous avons initié le mouvement avec une pièce de David Claerbout qui travaille à partir d’images fixes. La seconde vidéo concernait une œuvre de Grazia Toderi. Pour l’instant, ces vidéos n’ont pas été présentées. Toutefois, à l’issue des travaux de rénovation du siège de la Banque NSMD en 2003, il est prévu d’installer des photographies dans les espaces d’accueil et des écrans plasma pour les vidéos. Nous sommes aussi partenaires du Centre national de la photographie. Dans le cadre de notre soutien, nous venons de financer l’achat d’un grand écran plasma pour qu’il puisse mettre en place une programmation de vidéos d’artistes, qui débutera avec celles issues de la collection NSM Vie/ABN AMRO.

Un nouvel espace sera spécifiquement réservé à la vidéo dans la Fiac, le Vidéo cube. Y êtes-vous favorable ?
Par nature, je n’apprécie pas trop les sectorisations. Mais cela permettra peut-être d’apporter une dynamique. Le public a encore une appréhension à acheter de la vidéo. La Fiac est pour moi un moment important. Je la visite toujours avec beaucoup d’envie, même si on a tendance à la comparer avec les autres grandes foires, ce qui n’est parfois pas à son avantage. Si mon emploi du temps le permet, je me déplace aussi à Bâle ou à Chicago. En tant que responsable de la communication d’une entreprise, je suis très occupée ; aussi, je ne peux pas aller voir les galeries à New York, à Zurich... Les acquisitions dans les galeries étrangères pour notre collection d’entreprise se font donc principalement dans les foires.

Le budget de la Culture atteint cette année le fameux 1 % du budget de l’État, même si les arts plastiques restent les parents pauvres. Des lieux tels que le futur Centre de la jeune création du Palais de Tokyo vont devoir trouver des partenaires financiers privés. Qu’en pensez-vous ?
C’est formidable. Le rôle de l’État est extrêmement important et il doit participer à la création artistique et à la promotion de l’art. En France, on prétend toujours que l’art est sous la coupe de l’État. Si les codirecteurs du Palais de Tokyo réussissent dans leur collecte de fonds privés, cela ouvrira peut-être des brèches pour d’autres acteurs en France. Mais aujourd’hui, le rôle du mécène est assez troublant. On a besoin de lui, mais, quelque part, on a presque honte de recourir à lui. On veut sans vouloir. Pourtant, tout le monde doit y trouver son compte, aussi bien les institutions, les artistes que les mécènes.

Quelles sont les expositions qui vous ont marquée récemment ?
J’ai beaucoup aimé l’exposition “Jean Dubuffet” à Beaubourg et celle de Jérôme Bosch à Rotterdam. ABN AMRO est d’ailleurs partenaire de cette dernière. Notre groupe est très actif en matière de mécénat et il sponsorise la plupart des grandes expositions aux Pays-Bas, comme la prochaine exposition “Gauguin-Van Gogh” à Amsterdam. Il y a véritablement une effervescence autour de Bosch alors que c’est un peintre qui est assez dérangeant. Les grandes monographies, comme celle consacrée à Dubuffet, permettent souvent de découvrir des œuvres que l’on n’a jamais vues, mais en même temps, il n’y a pas de réelle surprise. C’est un moment de plaisir. “Hitchcock et l’art” développait en revanche un parti pris réel. J’ai aussi beaucoup aimé l’exposition “Collections d’artistes” à la Collection Lambert à Avignon. Je me suis beaucoup interrogé sur les relations entre les artistes... “Ornement et Abstraction” à la Fondation Beyeler, à Bâle, propose également des mises en regard, des croisements.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°133 du 28 septembre 2001, avec le titre suivant : Anne Samson

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