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Un nouveau musée d’art contemporain ouvre à Taïwan

TAIPEI / TAÏWAN

Inauguré le 25 avril dernier, le New Taipei City Art Museum (NTCAM) affiche une ambition à la fois locale et internationale pour accroître la visibilité de la scène contemporaine taïwanaise.

Le New Taipei City Art Museum. © New Taipei City Government, 2023
Le New Taipei City Art Museum.

Taipei (Taïwan). Conçu par l’architecte taïwanais Kris Yao, le nouveau musée de Taïwan logé dans un bâtiment de plus de 32 000 m² a coûté environ 85 millions d’euros (2,9 milliards de dollars taïwanais). Principalement financé par la municipalité de New Taipei, vaste agglomération de 4,6 millions d’habitants encerclant Taipei, le musée reflète les ambitions du maire Yu-ih Hou, candidat du Kuomintang arrivé deuxième lors des élections présidentielles de 2024.

Dirigé par Hsiang-ling Lai, le NTCAM compte actuellement 48 collaborateurs. Figure expérimentée du monde muséal, Lai a piloté plusieurs institutions à Taïwan (MoCA Taipei, C-LAB) ainsi que le Rockbund Art Museum à Shanghaï. Interrogée sur la mission du musée, elle insiste sur sa vocation à la fois locale et transrégionale, tout en explorant les multiples facettes de la culture visuelle, de l’artisanat à l’architecture. Elle souligne son engagement envers la communauté locale et le rayonnement international de l’institution, afin de valoriser la scène contemporaine taïwanaise tout en la connectant au reste du monde par une programmation ciblée.

Le NTCAM possède sa propre collection permanente, partiellement héritée de la municipalité, tout en poursuivant une politique d’acquisitions, y compris par commandes. Cela s’accompagne d’une résidence d’artistes, dont la Française Sara Ouhaddou fera prochainement partie. Après une première phase sur invitation, un appel à candidatures devrait être lancé en 2026 pour une résidence de deux mois l’année suivante.

Hsiang-ling Lai s’est par ailleurs entourée de cinq figures majeures du monde muséal pour former le comité consultatif international (International Advisory Committee) du musée : Mami Kataoka (Mori Art Museum, Tokyo), Clara Kim (Museum of Contemporary Art, Los Angeles), Hanru Hou (ancien directeur du Maxxi, Rome), Patrick Flores (National Gallery Singapore) et Aric Chen (en partance du Nieuwe Instituut, Rotterdam pour la Zaha Hadid Foundation, Londres).

Le double ancrage, à la fois local et international, se reflète dans les deux principales expositions inaugurales. Encounters in Reflection (Rencontres en miroir), conçue à partir de la collection permanente, retrace un siècle de création à Taïwan et New Taipei. Elle explore l’histoire migratoire et le tissu industriel de la région, qui fut le premier « atelier du monde » au XXe siècle, avant la montée en puissance de la Chine. L’accent est mis sur la diversité des artistes, notamment les minorités ethniques (toiles de Si Jinoboya et Puhungan) et sexuelles (vidéo de Posak Jodian dédiée à l’artiste transgenre Hao Hao). La seconde exposition, Reimagining Radical Cities (Imaginer autrement les villes radicales), explore l’urbanisme sous un angle transculturel. Wu Chuan-Lun, artiste taïwanais partagé entre Berlin et Tainan, illustre cette approche d’une manière originale avec une installation composée de céramiques industrielles produites aux quatre coins du monde. L’exposition réunit également des artistes internationaux, tels que la Coréenne Haegue Yang, le Singapourien Ho Rui An et l’Américain Michael Rakowitz, qui interrogent l’urbanisme contemporain.

Le musée a attiré un large public dès son ouverture, bénéficiant d’un accès gratuit jusqu’à la fin juin. Issue d’un projet développé sur dix ans, son implantation stratégique tire parti de la complémentarité entre le canton de Yingge, haut lieu de la céramique, et celui de Sanxia, zone résidentielle familiale, accueillant le campus de la National Taipei University. Situé à trente minutes de l’aéroport de Taoyuan, il forme un triangle bien desservi avec Taipei. Ce lien local a été renforcé par des initiatives en amont (expositions hors-les-murs, travaux de recherche, conférences) qui ont permis à la population de se familiariser avec le projet. Conçu comme un lieu de vie, le musée accueille par ailleurs divers commerces (y compris des marchands de fruits et légumes) dans son enceinte, aux côtés des boutiques et cafés habituels, favorisant ainsi l’engagement des communautés locales.

L’inauguration du NTCAM illustre la dynamique muséale à l’œuvre à Taïwan, en dépit des turbulences géopolitiques qui l’entourent. Selon la Taiwan Museum Association, l’île compte 490 musées (d’art ou autres) en 2025, soit une douzaine de plus qu’avant la pandémie, avec un équilibre entre institutions publiques (55 %) et privées (45 %). Les récentes ouvertures en sont la preuve, qu’il s’agisse d’institutions publiques, comme le NTCAM, ou privées, comme le Fubon Art Museum inauguré à Taipei fin 2024. Parallèlement, les grands musées s’agrandissent : la branche du National Palace Museum de Chiayi et le Taipei Fine Arts Museum (TFAM) sont engagés dans des projets d’extension, prévus respectivement pour 2026 et 2028. Taïwan affiche ainsi l’une des plus fortes densités muséales d’Asie avec 21 musées par million d’habitants, un chiffre équivalent à celui de la Corée du Sud, et cinq fois supérieur à celui de la République populaire de Chine (4 musées par million d’habitants).

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°656 du 23 mai 2025, avec le titre suivant : Un nouveau musée d’art contemporain ouvre à Taïwan

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