Taïwan - Foire & Salon

Art Taipei cultive sa taïwanité 

Par Rémy Jarry, correspondant en Asie du Sud-Est · lejournaldesarts.fr

Le 28 octobre 2025 - 656 mots

La foire taïwanaise a misé sur sa scène artistique. Les ventes se sont révélées plutôt lentes peinant à dépasser 100 000 €.

Vue de l'édition 2025 d'Art Taipei à Taïwan. © Art Tapei
Vue de l'édition 2025 d'Art Taipei à Taïwan.
© Art Tapei

Alors qu’Art Basel Paris battait son plein, Art Taipei s’est tenue du 23 au 27 octobre 2025 sous une autre verrière, celle du Taipei World Trade Center, à deux pas du gratte-ciel 101. Lancée en 1992, elle est la plus ancienne foire d’art encore en activité sur le continent asiatique. Dirigée depuis ses débuts par la Taiwan Art Gallery Association, cette longévité est à lire à l’aune de la récente annulation de Taipei Dangdai, prévue initialement en mai 2026. Art Taipei devient ainsi la principale porte d’entrée sur le marché taïwanais pour les galeries internationales. Avec le soutien des autorités locales, la foire s’inscrivait dans la deuxième édition de la Taipei Art Week, associant les principaux musées de la capitale ainsi que de nombreuses galeries.

Pour son édition 2025, la foire demeure très régionale, avec quelque 120 galeries, dont 70 taïwanaises et la quasi-totalité asiatique, à l’exception notable de Perrotin, très implantée dans la région (Hong Kong, Shanghai, Séoul et Tokyo). Le Japon reste particulièrement bien représenté avec une vingtaine d’exposants, suivi par la Corée du Sud, Hong Kong et la Chine. Reflet des tensions actuelles, il reste difficile pour les galeries et collectionneurs chinois (hors Hong Kong) de se rendre à Taïwan. Outre sa structure associative, la domination des galeries taïwanaises s’explique aussi par le dynamisme entretenu en dehors de Taipei, avec Art Tainan et Art Taichung, deux autres foires qui ont contribué à développer le marché et à recruter de nouveaux collectionneurs au-delà de la capitale.

Cette adaptation locale se reflète aussi dans les différentes sections, à commencer par Made in Taiwan, dédiée aux jeunes artistes de l’île. Parrainée par le ministère de la Culture de Taïwan, elle offre aux huit artistes sélectionnés une exposition personnelle sur la foire, suivie d’une présentation dans une galerie partenaire. Lauréat du prix du festival de photographie Kyotographie, Liu Hsing-Yu (né en 1985) a ainsi bénéficié d’une forte visibilité sur la foire, réalisé plusieurs ventes, et prépare désormais une exposition à la galerie Liang à Taipei.

Toujours en partenariat avec le ministère de la Culture, un large stand était par ailleurs consacré aux artistes autochtones. À la suite de sa participation à la dernière Triennale Asie-Pacifique en Australie en 2024, Eleng Luluan (née en 1968) y présentait une série d’œuvres textiles, dont quatre ont été vendues entre 5 000 et 20 000 €.

Dans l’ensemble, la grande majorité des œuvres proposées se situaient entre 5 000 et 250 000 €. Aucune vente millionnaire n’a été recensée, malgré la présence d’une toile de 1931 de Sanyu (1895-1966), issue d’une collection européenne et présentée par la galerie Kwai Fung Hin (Hong Kong, Singapour). Son prix n’a pas été communiqué, mais il était estimé autour de 5 M€.

De l’avis général, les transactions ont été relativement lentes, mais réparties tout au long de la foire. Parmi les ventes notables, on relève un intérêt marqué pour la peinture, comme celle de 2011 de Yeh Shih-Chiang (1926-2012), vendue par Hanart (Hong Kong) pour plus de 100 000 €. Cet engouement pour les œuvres sur papier ne se limite pas aux artistes asiatiques : De Sarthe (Hong Kong) a vendu un grand dessin de Bernar Venet (né en 1941) pour 95 000 €, ainsi qu’une huile sur toile de 1959 de Jack Tworkov (1900-1982) pour environ 65 000 €, dès le vernissage. Asia Art Center (Taipei, Pékin) a quant à elle vendu une huile sur toile de Chuang Che (né en 1934) pour plus de 100 000 €, ainsi qu’une sculpture en bois de Ju Ming (1938-2023), issue de sa célèbre série Tai-Chi, pour environ 250 000 €.

Sans doute pénalisée par Art Basel Paris sur le haut segment du marché, avec une fréquentation limitée des collectionneurs les plus fortunés, Art Taipei prévoit de décaler ses dates en 2026 afin d’éviter un chevauchement direct avec la foire parisienne, tout en restant en amont des foires de Shanghai et de Kyoto de novembre.

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