Musée

Tours attend ses conservateurs

Par Sindbad Hammache · Le Journal des Arts

Le 17 janvier 2020 - 834 mots

TOURS

Non renouvelé par la Mairie, François Blanchetière était le dernier conservateur en poste au Musée des beaux-arts depuis le départ de Jérôme Farigoule en juillet 2019.

Le Musée des beaux-arts de Tours. © Tours, musée des Beaux-Arts.
Le Musée des beaux-arts de Tours.
© Tours, musée des Beaux-Arts.

Le Musée des beaux-arts de Tours employait cinq conservateurs il y a sept ans. François Blanchetière, ancien conservateur du Musée Rodin, n’a pas été reconduit, alors que son contrat de détachement du ministère de la Culture prend fin en ce début d’année. Depuis le départ précipité de Jérôme Farigoule en juillet, François Blanchetière était le seul conservateur encore à bord, et il assumait de facto, comme précisé sur sa page Linkedin, le rôle de « directeur par intérim ».

C’est un manquement au devoir de réserve qui lui est reproché, et qui lui coûte aujourd’hui son renouvellement mais aussi une mise à pied de trois jours. Un article publié en octobre 2019 dans le quotidien régional La Nouvelle République dans lequel François Blanchetière s’agaçait de chiffres de fréquentation qu’il qualifiait d’« erronés » communiqués par le maire, Christophe Bouchet (Mouvement radical), aurait motivé la décision de la Mairie.

Le principal intéressé assure que ses propos ont été rapportés de manière très polémique. La Ville reproche également au conservateur de s’être laissé aller à la critique de son employeur dans des échanges de courriels privés. Détaché au Musée des beaux-arts de Tours depuis 2017, François Blanchetière demandait en octobre dernier un renouvellement de trois ans qui lui a été refusé.

Ces crispations autour de la personne du conservateur interviennent alors que les budgets alloués au musée sont en constante baisse. Le budget de fonctionnement total, hors salaires, avoisine les 250 000 euros par an, et les crédits alloués à la restauration et l’acquisition des œuvres d’art se chiffrent à 15 000 euros au total depuis 2016. En 2017 et 2019, cette ligne avait même disparu du budget municipal. Pour une porte-parole de l’association des Amis du musée, « il manque une véritable politique de fond culturelle, et ça ne date pas de cette Mairie-là ».

Contacté, François Blanchetière estime que le musée dispose d’un potentiel inexploité par la Ville : « Nous recevons entre 63 000 et 68 000 visiteurs depuis trois ans. Avec un vrai budget de communication, on pourrait facilement monter à 80 000 », estime-t-il. L’exposition « Monumental Balzac » organisée en 2019 avait stimulé la fréquentation du musée, qui avait connu une hausse de 45 % en juillet et de 50 % en août. Une réussite que le maire n’a pas su mettre assez en valeur selon le conservateur, également commissaire de l’exposition.

Le fort endettement de la municipalité explique en partie ces budgets contraints, ainsi que le report régulier du projet d’agrandissement du musée depuis maintenant une dizaine d’années. « C’est l’un des derniers grands musées de France à ne pas être rénové, s’inquiète l’association des Amis du Musée. Il n’y a pas de boutique, pas de cafétéria… Le musée en a besoin. » L’adjointe à la culture, Christine Beuzelin, concède qu’il s’agit d’un « serpent de mer ; ça fait dix ou quinze ans que l’on en parle ». L’échec des discussions autour de la donation des époux Cligman a fait perdre beaucoup de temps sur ce dossier : le projet d’extension financé par l’industriel, afin d’y abriter sa collection, avait été retoqué par la Commission nationale des secteurs sauvegardés.

La rénovation du musée« sera un projet important du prochain mandat, c’est sûr et certain », assure Christine Beuzelin, à quelques semaines des élections municipales. L’adjointe promet également une enveloppe de 120 000 euros allouée à l’acquisition et la restauration des œuvres du musée dans le budget de 2020, qui devrait être voté à la mi-janvier : un effort décidé, dit-elle, avant le départ de François Blanchetière.

Incertitude sur la programmation 2020

Sans conservateur, la programmation 2020 du musée est en partie menacée. François Blanchetière travaillait au commissariat de deux expositions, consacrées à deux peintres tourangeaux : « Jean Vimenet (1914-1999) », prévue en mai prochain, et « Olivier Debré », célébration du centenaire de sa naissance programmée en octobre. Si l’exposition « Olivier Debré » aura bien lieu, le conservateur sur le départ ne s’est pas montré optimiste sur la tenue de l’exposition « Vimenet » : « Ce sont des projets sur lesquels nous n’étions pas particulièrement en avance », explique-t-il, ajoutant que les tensions autour de son renouvellement ne lui ont pas permis d’y travailler depuis la mi-novembre.

La famille du peintre se tient prête à assumer le commissariat de la manifestation. Selon Christine Beuzelin, il est possible que l’exposition soit reportée – « je laisse la nouvelle directrice en décider ». Car il y a un bien « un capitaine à bord », rassure l’adjointe à la culture : Hélène Jagot-Jouin, ancienne directrice du Musée de La Roche-sur-Yon (Vendée), viendra occuper en juillet le siège laissé vacant par Jérôme Farigoule. En formation à l’Institut national du patrimoine, elle a « déjà un pied dans le musée, elle est à Tours au moins une fois par semaine », affirme Christine Beuzelin. Deux appels à candidature ont également été lancés pour deux postes de conservateur (fonds anciens et XIXe-XXe siècles), dont les jurys se réuniront courant janvier. À l’été prochain, si tout se passe bien, le musée devrait retrouver une équipe de trois conservateurs.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°537 du 17 janvier 2020, avec le titre suivant : Tours attend ses conservateurs

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