À Maubeuge, un projet singulier de « maison de la culture »

Maubeuge (Nord). Fermé depuis 1993, le Musée Henri-Boëz de Maubeuge se retrouve intégré au projet de maison de la culture qui prendra place dans l’ancien bâtiment de la CPAM et de la CAF en centre-ville. Ce musée de beaux-arts, d’archéologie et d’ethnologie, qui a obtenu le label « Musée de France » en 2002, a connu plusieurs vies : il a ouvert en 1914 juste avant la guerre mais a été bombardé la même année, perdant une partie de ses collections de peintures et sculptures. Il a rouvert progressivement entre 1926 et 1936 puis a déménagé dans le chapitre des chanoinesses après 1945. En 2023, la municipalité a ouvert un espace temporaire pour exposer « environ dix pour cent des collections », selon Nicolas Leblanc, adjoint à la culture. Le projet adopté par le conseil municipal en cette fin mars entérine l’idée d’inclure ce musée et la médiathèque préexistante dans un seul bâtiment pour constituer un pôle culturel dont la surface avoisinerait les 5 500 mètres carrés sur quatre niveaux.

Si le projet d’établissement est déjà rédigé, certains aspects sont amenés à évoluer, ainsi le nom du lieu : « La dénomination initiale “Maison de la culture et de l’éducation” a été remplacée par “Maison de la culture”, et le lieu sera probablement rebaptisé », précise Nicolas Leblanc. Cette structure à double identité pourrait en outre héberger « un tiers-lieu », terme que l’adjoint à la culture juge un peu flou. Il s’agit surtout d’affirmer que le lieu sera ouvert sur la ville et l’agglomération, une revendication portée par la municipalité : « Le choix du bâtiment de la CPAM-CAF se justifie par sa position près de la gare dans le centre-ville, qui permettra un accès à la population de toute l’agglomération et pas seulement de Maubeuge. » Le bâtiment choisi se distingue en effet par une architecture remarquable, créée par l’architecte et urbaniste André Lurçat entre 1961 et 1964, artisan de la reconstruction du centre-ville. Il est inscrit au titre des monuments historiques depuis novembre 2024, une étape indispensable avant sa restauration et son aménagement. Nicolas Leblanc évoque « l’ouverture sur les publics » que permet le bâtiment aux grandes baies vitrées, avec une « horizontalité » architecturale et symbolique : « Nous voulons faciliter l’accès à la culture, et attirer des publics qui vont à la médiathèque mais pas au musée. »

Dans le projet d’établissement commun, la réflexion de l’équipe municipale porte sur le sous-dimensionnement de la médiathèque pour une ville de 30 000 habitants, et sur le manquement du musée à « la mission d’un Musée de France [qui est] de rendre accessibles ses collections ». Il y est précisé également que la lecture et la visite d’expositions évoluent désormais « dans un contexte concurrentiel fort » dans le secteur des loisirs. Le projet prévoit donc de créer des « synergies » pour enrayer cette concurrence et éviter « le fonctionnement en silo ». Sont évoquées comme modèles d’équipement culturel « les Franciscaines de Deauville », qui combinent un lieu d’exposition, une bibliothèque et un centre de conférences.

La « maison de la culture » constitue un projet d’autant plus important pour la ville que celle-ci vise à obtenir le label « Ville d’art et d’histoire ». Estimé à 15 millions d’euros, ce projet représente un investissement non négligeable dans un contexte de tension budgétaire : la Ville le financera tout en faisant appel à la Drac, au Département et à l’Agglomération, précise Nicolas Leblanc. Le coût de la restauration des œuvres du musée est à intégrer au budget.

Cet investissement fait partie d’un large programme de rénovation et de requalification de certains quartiers : l’héritage de la reconstruction post-1945 nécessite des réajustements avec l’évolution démographique de la ville et la « densification du quartier de la gare ». Le choix de la maîtrise d’œuvre va être annoncé prochainement, et les travaux devraient commencer en 2027 pour une livraison fin 2028.