PARIS
Alors que l’établissement fête les 150 ans du Palais Garnier, la direction et le ministère de la Culture annoncent de grands travaux de rénovation.

Paris. Héritier des Académies royales de danse et de musique fondées par Louis XIV, l’Opéra national de Paris compte quatre sites dont le Palais Garnier, situé dans le quartier Opéra de la capitale. Ce bâtiment, classé monument historique, a été construit en 1875 par Charles Garnier, et héberge une vaste scène de 1 350 mètres carrés dans une salle de 2 100 places, des studios de répétition et un sous-sol doté d’un réservoir, lequel a inspiré à Gaston Leroux son enquête sur Le Fantôme de l’Opéra (1910). Depuis 1989, l’établissement public compte aussi le bâtiment de la Bastille, construit par Carlos Ott, d’une capacité de 2 700 places avec une scène principale (750 mètres carrés) réservée aux opéras, là où Garnier accueille plutôt les ballets. Comme le soulignait un rapport de la Cour des comptes publié en octobre 2024, aucun des deux bâtiments n’a fait l’objet de travaux d’ampleur, hormis deux ravalements (Garnier), alors que les signes de vieillissement se multiplient : l’Opéra Bastille arbore depuis plusieurs années des filets sur sa façade, et l’infrastructure technique et électrique est vétuste. Côté scènes, à Bastille comme à Garnier de nombreux dispositifs mécaniques sont en panne, et les cages scéniques se dégradent.
En mars 2025, le directeur général de l’Opéra national de Paris, Alexander Neef, a annoncé qu’il faudrait « 600 millions d’euros d’investissement jusqu’en 2037 » pour les quatre sites de l’établissement (Garnier, Bastille, École de Danse à Nanterre et Ateliers Berthier). En juin 2025, Rachida Dati a confirmé partiellement ce chiffre, indiquant que les travaux de Bastille coûteraient autour de 400 millions d’euros : selon la ministre de la Culture, « la scène menace de s’effondrer » et les travaux pourraient durer dix ans, jusqu’en 2037. Un rapport sénatorial de 2011 avait évalué initialement les besoins à 12 millions d’euros pour Bastille… En septembre, Alexander Neef et la ministre ont déclaré que les travaux commenceraient à Garnier en 2027 et à Bastille en 2030, avec deux périodes de fermeture des salles.
Cette fermeture, inévitable, résulte d’un manque d’investissement chronique selon le rapport de la Cour des comptes, un point déjà signalé en 2017 par la députée Aurore Bergé lors d’une question posée à la ministre de la Culture Françoise Nyssen. Le rapport souligne bien « le soutien exceptionnel de l’État »à une institution unique en France, mais pointe « l’hésitation des tutelles » sur les grands projets et la faiblesse de l’investissement : sur la période étudiée (2015-2023), l’État octroyait 1,4 million d’euros par an en investissement, alors que le rapport chiffrait les besoins totaux à 200 millions d’euros. Le montant annuel a été porté à 5 millions pour la période 2022-2026, dans un contrat d’objectifs et de moyens. La subvention de fonctionnement avoisine 102 millions d’euros annuels, une somme en légère augmentation en 2025, mais insuffisante face à l’explosion des coûts fixes. Certes, l’Opéra de Paris dispose de ressources propres grâce à la billetterie qui rapporte plus de 75 millions d’euros chaque année, eu égard à l’augmentation du prix des billets, notamment pour les opéras. Sur ce point, le rapport souligne la marge de manœuvre réduite de l’institution, laquelle doit conserver une politique tarifaire attractive comme l’a rappelé la ministre en septembre, tout en dégageant plus de recettes de billetterie. Le mécénat, les privatisations et les visites payantes de Garnier constituent également des sources de revenus. Si la grève des personnels à la fin de l’année 2019 et la crise liée au Covid en 2020 ont plombé la santé financière de l’Opéra, 2023 et 2024 ont été des années légèrement excédentaires, et 2025 devrait l’être également.
Alors que le projet de loi de finances pour 2026 est encore en débat, ni la ministre ni Alexander Neef n’ont expliqué dans le détail comment seront financés les travaux. L’Opéra annonce déjà le soutien des grands mécènes, tels que Chanel et la Fondation BNP Paribas, pour la partie travaux. Mais le montant des investissements à venir est assez exceptionnel pour une institution culturelle non muséale : à titre de comparaison, la rénovation du Centre Pompidou coûtera autour de 460 millions d’euros. La fermeture des opéras Garnier et Bastille en alternance entraînera logiquement un manque à gagner (privatisations, billetterie) et une réorganisation totale des activités (en particulier pour les danseurs). Alexander Neef, en poste jusqu’en 2032, prévoit des spectacles montés en coproduction dans d’autres établissements de France, et une politique artistique qui privilégie les reprises de pièces plutôt que les créations, afin d’alléger les coûts de production.
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L’Opéra de Paris fera relâche en 2027 pour travaux
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°665 du 14 novembre 2025, avec le titre suivant : L’Opéra de Paris fera relâche en 2027 pour travaux







