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Le musée de la Banque de France va enfin ouvrir

Par Francine Guillou · Le Journal des Arts

Le 6 février 2019 - 880 mots

PARIS

Prévue pour juin 2019, l’ouverture de la nouvelle Cité de l’économie signera pour la Banque de France la fin d’un chantier épique et épineux. Ce lieu de culture et de pédagogie lié à l’économie verra le jour dans un édifice rénové à grands frais.

La Citeco, la Cité de l'économie et de la monnaie, portée par le Banque de France veut faire la pédagogie de l'économie
La Citeco, la Cité de l'économie et de la monnaie, portée par le Banque de France veut faire la pédagogie de l'économie
© Photo : Michael Tubiana

Paris. Les gouttières dorées et terminées par des gueules de dragons étonnent jusqu’aux habitués du quartier, pourtant familiers de la façade extravagante et néorenaissance de l’hôtel Gaillard, dans ce coin cossu et élégant du 17e arrondissement parisien : les échafaudages de la future Cité de l’économie-Citéco sont démontés un à un, dévoilant la façade restaurée de cette folie architecturale illustrant les derniers feux du XIXe siècle. En juin 2019, les curieux pourront découvrir les 6 600 m2 de l’hôtel Gaillard, avec l’ouverture tant attendue de la Citéco.

Lancé en 2009, le projet de Cité de l’économie devait être inauguré en 2014, après un nécessaire chantier de restauration du bâti ancien. Entre un désastreux chantier de déplombage et des structures plus endommagées que prévu, le projet affiche un retard de cinq ans et une enveloppe budgétaire logiquement plus importante que prévue et dénoncée par la Cour des comptes dans un rapport rendu public en décembre dernier (lire encadré).

Ce projet répond à deux objectifs que s’est fixés la Banque de France : valoriser l’actif immobilier patrimonial d’un bâtiment devenu obsolète depuis la fin de ses activités de banque de détails, et développer des activités de pédagogie et de médiation – décision prise par le gouverneur de la Banque de France de l’époque, Christian Noyer. Impressionné par la visite du Museo interactivo de Economía (MIDE), musée de la banque centrale mexicaine ouvert en 2006 à Mexico, le gouverneur décide la construction d’un projet similaire porté par la Banque de France. L’écrin est tout trouvé : l’hôtel Gaillard, propriété de la banque depuis 1919, est désaffecté depuis 2006.

Classé monument historique en 1999, il fut l’un des lieux symbole de la puissance financière de la Banque de France durant le XXe siècle. L’édifice néo-Renaissance, dont la construction s’est achevée en 1882, a été réalisé par l’architecte Jules Février à la demande d’Émile Gaillard, banquier grenoblois et collectionneur d’art du Moyen Âge et de la Renaissance. Avec ses structures métalliques Eiffel, ses décors de stucs mêlés à des éléments historiques, et ses espaces de sociabilité, l’édifice est résolument de son temps, celui des extravagances du second Empire. Gaillard y engloutit sa fortune : la construction est estimée à 11 millions de francs de l’époque. À sa mort, ses collections sont dispersées et ses héritiers finiront par vendre l’édifice pour 2 millions de francs de l’apoque à la Banque de France. Vient alors la deuxième vie de l’hôtel Gaillard, celle d’une succursale de banque : aux crinolines sur la piste de danse succèdent les files d’attente aux guichets. L’architecte Alphonse Defrasse est chargé de créer un grand hall public, une salle des coffres et des locaux administratifs. Il mêle motifs gothiques et Renaissance à des influences Art déco, sans remettre en cause le faste de l’hôtel.

Dans la nouvelle Citéco, ces différentes strates historiques sont mises en valeur grâce à une restauration fine et entière. L’aspect spectaculaire de l’escalier d’honneur, du grand hall, de la salle des coffres est préservé. Sur ce chantier de 6 600 m2, la maîtrise d’œuvre a été confiée en 2010 à un groupement solidaire composé du cabinet Ateliers Lion pour la partie architecturale, de l’architecte en chef des Monuments historiques Éric Pallot et de l’agence Cofino pour la partie muséographique. Les parties historiques ont été restaurées avec fidélité et les principales adjonctions contemporaines se situent en sous-sol (avec la création d’un auditorium de 100 places), dans une courette intérieure couverte, où se situera le café du musée, et sous les toits où a été créé un plateau de 430 m2 pour les expositions temporaires. Une terrasse offre dorénavant un panorama exceptionnel sur les toits et tourelles intérieures de l’îlot.

La Cour des Comptes dénonce un budget plombé  
 

Dérapages. « Défaillances successives », « dérives calendaires et budgétaires », « aléas dans la conduite du chantier» : la Cour des Comptes consacre un chapitre au vitriol à la gestion du projet de la Cité de l’économie dans son dernier rapport sur la Banque de France, rendu public en décembre 2018. Évoquant « un budget prévisionnel initial évalué à 36,7 millions d’euros en investissement (incluant les dépenses relatives au clos et au couvert pour un montant de 6,4 millions d’euros) », les Sages de la rue Cambon évaluent en 2017 le coût global de la Cité de l’économie à 97 millions d’euros entre 2009 et 2017. « On a des arguments très objectifs pour contester ce chiffre », répond Philippe Gineste, directeur du lieu, selon qui le coût des travaux doit être ramené à 53 millions d’euros, hors clos et couvert et hors activités culturelles et pédagogiques conduites par la Cité depuis 2014. Les retards de construction ont été causés en partie par la découverte d’une pollution au plomb à l’intérieur, suite à une campagne de déplombage des peintures de la salle des coffres. Cette découverte a entraîné l’arrêt du chantier pendant deux ans. En cause également, les structures métalliques de l’édifice, en plus mauvais état que prévu, qui ont nécessité des démontages et des remontages, coûteux en temps et en argent.

 

Francine Guillou

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°516 du 1 février 2019, avec le titre suivant : Le musée de la banque de france va enfin ouvrir

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