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La Fondation Hartung-Bergman sort de sa réserve

Par Jean-Christophe Castelain · Le Journal des Arts

Le 15 septembre 2019 - 693 mots

ANTIBES

La rétrospective parisienne de l’automne est l’occasion de créer un « moment Hartung » avec, en ligne de mire, des horaires d’ouverture élargis.

L'atelier de Hans Hartung à Antibes © Fondation Hartung-Bergman
L'atelier de Hans Hartung à Antibes
© Photo Fondation Hartung-Bergman

Antibes. Cinq ans après son arrivée à la tête de la Fondation Hartung-Bergman installée à Antibes, Thomas Schlesser va ouvrir les lieux plus largement au public. Actuellement, les visites n’ont lieu que le vendredi, sur rendez-vous, par groupe de 25 personnes, et de juin à septembre. Autant dire un accès ultraréservé. Car la fondation avait jusqu’alors d’autres priorités : assurer le rayonnement des deux artistes auprès des musées, collectionneurs et historiens de l’art. Ce travail, largement entamé par son prédécesseur, s’est notamment matérialisé par une très riche base documentaire en ligne (en accès réservé), qui fait le bonheur des chercheurs.

Ce n’est pas le moindre des services dont profitent ces chercheurs chouchoutés. Ils bénéficient en effet d’un accès privilégié à l’atelier et aux réserves d’Hans Hartung (1904-1989) et d’Anna-Eva Bergman (1909-1987), que ceux-ci ont fait construire sur une oliveraie de 2 ha en 1973, et peuvent loger dans des chambres particulières aménagées dans la villa même du couple autour d’une piscine. Avec en prime une cuisinière pour les repas, le soir, dans le patio. Des conditions d’autant plus favorables qu’« il n’y a pas d’évaluation ou d’obligation de rendu de travaux, je ne veux pas mettre de pression contre-productive sur les chercheurs », revendique Thomas Schlesser.

« Une injustice qu’il faut corriger »

Pas de pression, certes mais un objectif : mieux faire connaître les deux artistes. « Aujourd’hui, ni la cote ni la notoriété de Hartung ne sont semblables à celles de Soulages : c’est à la fois une anomalie économique et une injustice historique qu’il faut corriger », estime le directeur, qui a lui-même pris son bâton de pèlerin. « Je suis allé voir les directeurs des grands musées pour les inciter à sortir les tableaux d’Hartung de leurs réserves. » Il est vrai que les conservateurs et le marché ont une préférence pour le Hartung des années 1940 à 1960 et que les œuvres des dernières années sont un peu déconsidérées.

Hartung n’est pourtant pas tombé dans les oubliettes. Le site Artfacts.net comptabilise une bonne vingtaine d’expositions monographiques organisées dans le monde en dix ans, sans compter les innombrables expositions collectives. La fondation a elle-même prêté des œuvres en 2019 pour dix-sept expositions. Tandis que le Musée d’art moderne de la Ville de Paris (MAMVP), qui a acquis quatre toiles auprès de la fondation en 2017, va organiser une grande rétrospective à partir du 11 octobre.

Et justement, « l’exposition du MAMVP est un formidable levier de notoriété pour Hartung, dont il nous faut profiter», assure Thomas Schlesser. Le grand projet des prochaines années est donc l’accès libre aux visiteurs. Les réserves de Bergman vont être déménagées vers celles d’Hartung afin de dégager de l’espace pour présenter ses œuvres. L’atelier contigu d’Hartung, lui, dispose déjà d’espaces d’exposition. « Il est important que Bergman soit aussi bien mise en valeur que son mari », insiste le directeur.

Il faut également construire un bâtiment d’accueil à l’entrée, ce qui suppose de déplacer un olivier ! Ce ne sera pas pour autant le même fonctionnement qu’à la Fondation Maeght, sise à quelques kilomètres de là. Dans un premier temps, le lieu sera ouvert quarante jours par an. La fondation se voit davantage comme une « Maison des illustres » ou un « Centre culturel de rencontre », labels qu’elle va demander. Les lieux s’y prêtent, ils ont été conçus par Hartung et Bergman qui voulaient une architecture à la fois confortable pour leur quotidien et épurée.

Tout cela coûte cher, environ 1,2 million d’euros, une somme qui s’ajoute à des frais de fonctionnement compris, selon les années, entre 1,5 et 1,8 million d’euros (12 salariés). Mais la fondation a les moyens de ses ambitions. Non seulement elle dispose d’un confortable capital financier, mais en plus une partie de sa collection est aliénable. C’est le galeriste Emmanuel Perrotin qui est chargé de vendre les œuvres au mieux – en contrôlant sa cote. Il a ainsi monté une exposition en 2018 dans sa galerie new-yorkaise. Si la Fondation Hartung-Bergman ne dispose pas des mêmes moyens que celle de Dalí (qui est l’exact contemporain d’Hartung), elle est tout aussi solide.

Fondation Hartung-Bergman,
173, chemin du Valbosquet, 06600 Antibes, visites sur rendez-vous, www.fondationhartungbergman.fr

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°528 du 6 septembre 2019, avec le titre suivant : La Fondation Hartung-Bergman sort de sa réserve

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