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Bourges se met en quatre pour ses musées

Par Héloïse Décarre · Le Journal des Arts

Le 22 mai 2023 - 970 mots

BOURGES

Vétustes et inadaptés, les quatre musées de la Ville sont fermés depuis le début de l’année, dans l’attente de leur prochaine rénovation. Plusieurs autres sites devraient être inclus dans un projet de déambulation muséale.

Hôtel Lallemant - Musée des Arts décoratifs de Bourges, entrée rue Bourbonnoux. © Morio60, 2012, CC BY-SA 2.0
Hôtel Lallemant - Musée des Arts décoratifs de Bourges, entrée rue Bourbonnoux.
Photo Morio60

Bourges (Cher). « Nous avons hérité d’une situation catastrophique dans les musées de Bourges, parce qu’il n’y a eu aucune politique muséale au cours des vingt-cinq dernières années. » Yann Galut, maire de Bourges (ex-PS), est incisif. Il est vrai que depuis les années 1950 et les initiatives de Jean Favière, conservateur du Musée du Berry jusqu’en 1974, les évolutions ont été limitées.

Aujourd’hui les quatre Musées de France gérés par la direction des musées et du patrimoine historique de la Ville – le Musée du Berry, le Musée des arts décoratifs (situé au sein de l’hôtel Lallemant), le Musée Estève et le Musée des Meilleurs Ouvriers de France – présentent un état de vétusté avancé. En 2021, un début de feu électrique a même eu lieu au Musée du Berry. Les lieux ne sont pas non plus accessibles au public à mobilité réduite.

Outre les problèmes liés aux bâtiments, la rénovation doit aussi prendre en compte l’état des collections en elles-mêmes. Selon Florence Margo-Schwoebel, directrice des musées et du patrimoine historique, les deux tiers des œuvres ont besoin d’être restaurées et ne peuvent, en l’état, être prêtées. Un récolement est d’ailleurs en cours, car si la base de données actuelle comprend environ 50 000 numéros, des doublons seraient très probables.

Bourges candidate au titre de « Capitale européenne de la culture » en 2028

La rénovation de l’offre muséale s’impose d’autant plus que la capitale du Berry est en lice pour devenir celle européenne de la culture en 2028. « Cela sera un des points essentiels de cette candidature, mais si nous ne gagnons pas, nous resterons tout aussi ambitieux pour nos musées », tient à préciser Yann Galut. En attendant, les musées de la Ville restent portes closes. Pour l’aider à imaginer une stratégie, la Mairie a fait appel à l’agence Kantara, accoutumée aux projets muséaux, qui a permis d’estimer le budget prévisionnel à plusieurs dizaines de millions d’euros. Des aides financières pourront probablement appuyer le projet : Bourges bénéficie du plan Action Cœur de ville mis en place par l’État, et espère obtenir des subventions de la part de la Région Centre-Val de Loire grâce à des rénovations axées sur la sobriété énergétique.

Mais l’urgence est d’abord de définir les emplacements, au pluriel, du futur ensemble muséal. Le maire de Bourges indique travailler avec son équipe sur une déambulation muséale à travers plusieurs sites de la ville. Le projet inclut également la rationalisation des réserves et le réaménagement du Centre d’interprétation de l’architecture et du patrimoine (Ciap). Différentes hypothèses seraient en discussion avec le ministère de la Culture. De passage au Printemps de Bourges, Rima Abdul Malak a récemment confirmé sa volonté de réhabiliter l’École nationale supérieure d’art de la cité, ouvrant l’option de l’utilisation d’une partie du bâtiment.

Une chose est certaine, « il s’agit de réinvestir des lieux patrimoniaux existants et non de partir sur quelque chose de neuf », assure Florence Margo-Schwoebel. L’hôtel Lallemant et la Maison du Berry font partie des bâtiments emblématiques de la ville, et il serait en effet regrettable de ne pas les mettre en valeur. La collection que renferme le Musée [Maurice] Estève, quant à elle, est, selon les termes de la donation, inséparable du lieu où elle est conservée. « Nous explorons toutes les possibilités : la capacité d’évolution des sites historiques, leur possible mise aux normes par la construction d’annexes… », énumère la responsable du patrimoine. L’important est de trouver un fil rouge reliant ces différents lieux. « Il faut réussir à articuler ensemble les collections de Bourges, tellement variées. » À cet effet, le retrait de l’appellation « Musée des arts décoratifs » va être demandé. « Il n’y a jamais eu d’inventaire de ces collections en particulier, elles ont été mêlées à celles de l’hôtel Lallemant. L’idée, c’est que l’on puisse croiser tous ces objets dans les mêmes salles », énonce la directrice des musées.

Dans ce futur parcours patrimonial, l’histoire et l’identité de Bourges devraient donc être mises en valeur, tout comme la richesse des collections de la Ville, trop peu connues de ses habitants. « Les musées de Bourges sont beaucoup plus que ce qu’on a pu en apercevoir ces dernières années : nous avons beaucoup d’œuvres déposées dans des musées nationaux », rappelle Florence Margo-Schwoebel.

La Mairie espère une première réouverture, celle de l’hôtel Lallemant, dans les deux ans à venir. Dans l’intervalle, l’équipe municipale souhaite associer la population à sa démarche afin qu’elle ne perde pas contact avec les musées. « Nous avons à cœur de montrer les coulisses et de faire participer les Berruyers au projet, notamment en donnant accès à des lieux qui sont encore dans des phases intermédiaires, en particulier les chantiers de restauration des collections », explique Florence Margo-Schwoebel.

Une « Maison des musées » tournée vers les Berruyers

La première étape de cette co-construction avec le public sera l’inauguration, dès le 10 mai, de la « Maison des musées », en lieu et place du Musée des Meilleurs Ouvriers de France. Avec un budget évalué à 50 000 euros environ (30 000 euros d’investissement et 20 000 euros de fonctionnement), le lieu ouvrira dans une optique pédagogique : le rez-de-chaussée sera destiné en particulier aux échanges et aux questions, et présentera une fresque retraçant deux siècles d’histoire des musées de Bourges. À l’étage, des expositions thématiques – cette année sur la musique et la danse, l’année prochaine sur le sport – valoriseront des objets rarement ou jamais exposés.

La Chambre des métiers et de l’artisanat du Cher met aussi à disposition le Parvis des métiers, où deux expositions sont déjà prévues jusqu’à la mi-septembre. Une programmation hors les murs permettant de faire vivre les collections, d’ici à ce que Bourges retrouve ses musées, ancrés dans leur époque.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°611 du 12 mai 2023, avec le titre suivant : Bourges se met en quatre pour ses musées

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