En cette rentrée, le patrimonial est plus que jamais tendance.
On pense bien entendu aux très populaires Journées européennes du patrimoine, dont la 42e édition se tiendra les 20 et 21 septembre. Et l’on attend, dans le droit fil des dernières éditions, environ 12 millions de visiteurs, qui fouleront les espaces ordinairement fermés des réserves des musées, des clochers des églises, des barrages hydroélectriques ou des lieux de pouvoir. Pour allier la curiosité à l’insolite, L’Œil a préparé dans ce numéro une sélection très originale de sites à visiter, qu’ils se situent hors des sentiers battus ou qu’ils soient réouverts cette année après restauration. On notera également qu’en cette rentrée, le patrimoine artistique français est également mis à l’honneur par les institutions muséales, avec des expositions-événements, qu’il s’agisse de Georges de La Tour au Musée Jacquemart-André, de Jacques-Louis David au Musée du Louvre ou de Jean-Baptiste Greuze au Petit Palais.
Y a-t-il un air du temps ? Un besoin de racines, d’ancrage historique ? Sans prêter la moindre intention de réécriture d’un récit national à ces expositions, qui d’ailleurs se justifient du seul point de vue de leur intérêt artistique, on peut tout de même s’interroger sur les corrélations qui peuvent exister, de manière souterraine, entre une société française (et européenne) en perte de repères et un besoin de reconstruction sur un socle solide appartenant au passé. Dans une époque traversée à la fois par des redéfinitions d’équilibres mondiaux et des évolutions sociales fortes, et par essence déstabilisantes, il peut être tentant de retourner à des fondamentaux rassurants. Qu’on se méfie néanmoins de l’entrisme de certaines idéologies réactionnaires dans le monde en apparence inoffensif des expositions. Rien de plus facile, avec l’expérience artistique, que d’inventer de toutes pièces de nouveaux récits, dès lors que l’on touche, par exemple, à l’histoire de France. Il va sans dire qu’une telle histoire, en révélant les racines de notre société, déconsidère, voire invisibilise, la variété des branches qui se sont désormais déployées.
On marche toujours sur des œufs en abordant ces questions. Mais on aurait tort de les ignorer. Les bouleversements des équilibres politiques, avec une normalisation accélérée de la légitimité politique d’une droite extrême qui s’assume, avec une presse qui en quelques années est passée du progressisme au conservatisme, vont sans aucune forme de doute investir les champs de l’art. Autant s’y préparer, et remettre dans les débats sur l’art cette question du positionnement des professionnels du secteur sur ces questions politiques et sociales, si diverses soient-elles. Rien de plus ambigu que le retour à la tradition et aux récits unificateurs et le plus souvent excluants. « L’ignorance est la mère des traditions », nous prévenait déjà Montesquieu il y a plus de trois siècles.
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Patrimoine ou tradition ?
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°788 du 1 septembre 2025, avec le titre suivant : Patrimoine ou tradition ?







