Art contemporain - Église

Éditorial

L’église et l’art contemporain

Par Jean-Christophe Castelain · Le Journal des Arts

Le 27 février 2025 - 360 mots

Art sacré. Le contraste est saisissant entre la magnificence de l’art dans les églises occidentales depuis l’époque médiévale jusqu’au XIXe siècle et la pauvreté du mobilier liturgique, des tableaux et des sculptures dans nombre d’églises d’aujourd’hui.

Il s’explique par l’histoire : la Révolution française, la loi de séparation entre l’Église et l’État, le mouvement anticlérical, la baisse de la pratique religieuse. L’Église est complètement passée à côté de l’art moderne entre les deux guerres. Ce n’est qu’après-guerre qu’elle commence à nouer des liens avec la création du moment, liens magnifiquement incarnés par Notre-Dame-de-Toute-Grâce sur le plateau d’Assy (Haute-Savoie) qui accueille dans les années 1950 un ensemble remarquable de tableaux, sculptures, tapisseries signés Rouault, Bonnard, Léger, Matisse…

Mais cet ensemble décoratif ouvert à l’art de son temps n’a que peu de répliques. C’est surtout dans l’architecture des nouvelles églises que le catholicisme s’éloigne des pastiches du XIXe siècle : chapelle Notre-Dame-du-Haut à Ronchamp, couvent Sainte-Marie de La Tourette, couvent des Dominicains de Lille, église Saint-Jean-Porte-Latine à Antony… Et si le Concile Vatican II (1961-1965) a permis à l’Église de commencer à abandonner sa méfiance à l’égard du monde contemporain et de se tourner vers lui, il n’a pas vraiment suscité un renouveau massif de l’art sacré dans les lieux de culte.

Osons une explication : c’est parce que les diocèses sont pauvres ! Culminant à la période baroque, les édifices catholiques se sont remplis de trésors commandités par des confréries ou des nobles. Pauvres sont les paroisses qui ne peuvent suspendre sur leurs murs que des tableaux sans personnalité, souvent donnés par des peintres locaux. C’est parce que l’État décide de financer la création de cent-quatre vitraux pour l’église Sainte-Foy de Conques que Soulages accepte de réaliser des cartons pour ce qui est aujourd’hui considéré comme un chef-d’œuvre. Soulages était agnostique, confirmant ainsi la célèbre phrase du père Marie-Alain Couturier : « Je préfère faire appel à des génies sans la foi plutôt qu’à des croyants sans talent. »

Restaurer les églises ne devrait pas aller sans les doter d’un programme artistique pour l’intérieur, ambitieux et tourné vers la création contemporaine. Le dossier du JdA en donne quelques exemples qui en appellent d’autres.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°650 du 28 février 2025, avec le titre suivant : L’église et l’art contemporain

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