Écran de fumée

Par Jean-Christophe Castelain · Le Journal des Arts

Le 16 octobre 2012 - 345 mots

Le psychodrame que l’on vit ces jours-ci sur l’ISF (impôt de solidarité sur la fortune) et les œuvres d’art ne serait-il qu’un écran de fumée pour mieux faire passer les autres mesures fiscales ? Le scénario est maintenant bien rodé et avait déjà été joué en juin 2011 lors du vote par la commission des finances d’un texte similaire introduit par un député UMP. La pièce se joue en quatre actes et tous les acteurs, qui connaissent la fin heureuse de l’histoire, ont le beau rôle : le parlementaire à l’initiative du texte s’offre une belle publicité, les représentants du marché de l’art donnent de la voix, le gouvernement annonce qu’il désapprouve le texte qui est alors rejeté par les députés. Cela permet à l’exécutif de dire aux marchands : « Voyez comment je défends vos intérêts »…, et de faire oublier que la France est le seul pays occidental (hormis la Suisse) à taxer le patrimoine. Et de faire oublier aussi l’alourdissement en 2013 de la fiscalité des particuliers qui va opérer une ponction de 5 milliards d’euros sur le revenu des ménages les plus aisés où se recrutent principalement les collectionneurs.

Cette augmentation des prélèvements ne peut qu’affecter le marché de l’art, dont le chiffre d’affaires est deux fois moindre. D’autant qu’elle intervient alors que la France recense moins de riches. Un rapport du Crédit suisse paru en octobre rapporte qu’entre la mi-2011 et la mi-2012 le nombre de millionnaires en dollars (hors résidence principale) a diminué de 322 000 personnes pour s’établir à 2,3 millions d’individus, dont près de 3 000 particuliers disposant d’un actif net supérieur à 39 millions d’euros. Certes, s’il y a moins de riches en France, il en reste toujours. Mais c’est oublier que l’achat d’une œuvre d’art est tout autant motivé par des disponibilités financières que par un contexte psychologique.

Si le redressement des comptes publics passe par la rigueur, une ou deux mesures spécifiques telles qu’une réduction d’impôt liée aux intérêts d’emprunt pour l’achat d’une œuvre d’art auraient envoyé un signal positif aux collectionneurs et marchands.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°377 du 19 octobre 2012, avec le titre suivant : Écran de fumée

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