Patrimoine

Voskopojë sans frontières

Par Daphné Bétard · Le Journal des Arts

Le 20 janvier 2006 - 495 mots

Premier bilan d’une campagne de restauration lancée par l’association Patrimoine sans frontières dans un village albanais.

Dans le cadre du programme « Culture 2000 » de la Commission européenne, l’association Patrimoine sans frontières (PSF) a lancé une opération de restauration et de mise en valeur des sites et monuments de Voskopojë, petit village du sud-est de l’Albanie. Comptant aujourd’hui quelque 500 habitants, Voskopojë fut aux XVIIe et XVIIIe siècles l’une des villes les plus prospères des Balkans, car située sur la route qui reliait Venise, Dürres (Albanie) et Constantinople. Enclave chrétienne au sein de l’Empire ottoman, elle possédait une Académie fondée en 1744 par un groupe de savants orthodoxes, une bibliothèque (la première des Balkans), un monastère et de nombreuses églises, délicatement décorées par des artistes tel David Selenica. À partir de la fin du XVIIIe siècle, à la suite des conflits, des incendies et des tremblements de terre qui secouèrent la région, Voskopojë déclina progressivement sans que les autorités s’en émeuvent. Seuls vestiges à avoir survécu aux turpitudes de l’histoire, cinq églises et le monastère de Saint-Jean Prodhome demeuraient dans un très mauvais état de conservation. Pour sauver de l’oubli cet ancien centre culturel et économique des Balkans, PSF a mis sur pied un chantier-école européen sous la direction scientifique de l’Institut national du patrimoine et en collaboration avec l’Institut des monuments de culture d’Albanie. Démarrés en 2004 et toujours en cours, les travaux de restauration ont été concentrés sur l’église Saint-Athanase, retenue pour ses fresques exceptionnelles, tandis que des fouilles archéologiques, des études d’architecture, d’histoire de l’art, d’iconographie ou de climatologie ont été menées sur tout le site de Voskopojë. Le compte rendu des premiers travaux réalisés fait aujourd’hui l’objet d’un ouvrage auxquels ont contribué plusieurs spécialistes ayant fait le voyage.

Les patrimoines immatériels
Comme le souligne l’architecte urbaniste Guillaume de Monfreid, « il reste beaucoup à faire encore », particulièrement pour le site naturel abritant Voskopojë, les montagnes des Balkans, polluées par des dépôts d’ordures et des « constructions anarchiques qui commencent à miter le paysage ».
Intitulé Patrimoine des Balkans, la présente étude aborde de manière générale l’art postbyzantin qui s’est développé conjointement à l’art de l’Islam dans les régions situées aux frontières de l’Orient et de l’Occident. Il est cependant regrettable que les quelques contributions étrangères (anglaise, italienne, allemande ou albanaise) qui émaillent cette publication scientifique n’aient pas été traduites, faute de moyens.
PSF mène depuis sa création, en 1992, une action exemplaire en faveur du patrimoine mondial menacé. Actuellement, l’association lutte pour éviter que la Foire internationale de Tripoli (Liban) réalisée par Oscar Niemeyer ne soit rasée au profit d’un projet immobilier. Elle travaille aussi pour la défense de patrimoines immatériels comme la mémoire de Tchernobyl ou l’architecture traditionnelle Musgum (Cameroun), dont seules quelques personnes âgées se souvenaient encore à la fin des années 1990 de la technique, aujourd’hui disparue.

Maximilien Durand (dir.), Patrimoine des Balkans, Somogy éditions d’art/Patrimoine sans frontières, Paris, 2005, 214 p., 35 euros, ISBN 2-85056-927-5.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°229 du 20 janvier 2006, avec le titre suivant : Voskopojë sans frontières

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