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Jean de Loisy : « Quand on fait parler les conservateurs, la conversation est immédiatement indiscrète »

Par Marie Zawisza · L'ŒIL

Le 23 avril 2025 - 456 mots

Au fil de ses dialogues avec les conservateurs du Louvre, l’historien de l’art Jean de Loisy explore dans les podcasts « Chefs-d’œuvre en vies », en partenariat avec France Culture, les histoires cachées des œuvres.

Quel est le principe de ces podcasts ?

Il s’agit d’explorer l’intimité que les conservateurs du Louvre construisent avec certaines œuvres. Pour choisir les pièces dont nous allions parler, je suis d’abord allé rencontrer tous les directeurs de départements. Certains voulaient présenter des chefs-d’œuvre méconnus, d’autres préféraient parler de l’icône de leur département, d’autres encore – et ce sont eux qui ont gagné ! – des œuvres qui portaient en elles une histoire, des interrogations… Par exemple, ce qui nous fascine dans le portrait d’Anne de Clèves, au-delà du chef-d’œuvre que constitue le tableau de Hans Holbein, c’est aussi la relation de cette reine, quatrième épouse d’Henri VIII, avec cet étrange Barbe Bleue…

Ces podcasts s’adressent-ils ainsi aux amoureux du Louvre ?

Évidemment, les passionnés d’histoire de l’art et les familiers du Louvre seront nourris. Mais je crois que ces podcasts s’adressent surtout aux amoureux des énigmes et des récits, à ceux qui aiment approcher le visible du point de vue de l’imaginaire, car le déroulé de la conversation amène à spéculer, comme dans un jeu, sur l’histoire des œuvres et leur interprétation. Je crois d’ailleurs que la culture se construit par notre passion pour les histoires, comme si on ne quittait jamais ce moment de notre enfance où quelqu’un, à notre chevet, nous raconte quelque chose…

Vous qui êtes sensible à la création contemporaine, qu’est-ce qui vous a séduit dans l’idée de réaliser ces podcasts au Louvre ?

Quand on est passionné d’art contemporain, on aime se trouver face à des formes inédites, dont on ne connaît pas les tenants et les aboutissants. Il faut construire soi-même son interprétation et trouver ses significations. Or, quand on aime aussi l’art ancien, on peut se trouver devant les mêmes interrogations : l’œuvre est toujours vivante, en appel de notre regard.

Comment la vie de ces œuvres surgit-elle dans une conversation ?

Quand on fait parler les conservateurs, la conversation est immédiatement indiscrète. On les met en situation de raconter les incertitudes qu’ils entretiennent avec un objet, comme s’ils n’étaient pas redevables d’un savoir établi. Il est ainsi arrivé à plusieurs reprises que des interprétations se construisent dans la conversation. Ainsi, le conservateur en chef du département des Objets d’art, Philippe Malgouyres, en s’étonnant que la défaite de Pompée ait été figurée dans les bas-reliefs de l’armure dite de Henri II, dont on pense qu’elle n’a jamais été portée, s’est rendu compte au cours de notre dialogue, en direct, que ces derniers représentaient sans doute une qualité chevaleresque, celle de la magnanimité du roi !

À écouter
Jean de Loisy,
collection de podcasts inédite
« Chefs-d’œuvre en vies »,
disponible sur www.franceculture.fr et www.louvre.fr [lire aussi p. 129].

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Cet article a été publié dans L'ŒIL n°785 du 1 mai 2025, avec le titre suivant : Jean de Loisy : « Quand on fait parler les conservateurs, la conversation est immédiatement indiscrète »

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