Pierre Bourgie, collectionneur et mécène montréalais

Par Fabien Simode · L'ŒIL

Le 25 mars 2013 - 728 mots

Au Québec, le gouvernement Marois a demandé au collectionneur et mécène montréalais de présider un groupe de travail sur la philanthropie culturelle dont les recommandations sont attendues pour fin mai.

Fabien Simode : Quelle est la mission du groupe de travail sur la philanthropie culturelle ?
Pierre Bourgie : Il s’agit de proposer des mesures pour favoriser et améliorer le mécénat culturel au Québec à la suite de ce constat : les Québécois donnent moins pour la culture que les Canadiens des autres provinces. Notre retard en termes philanthropiques est assez substantiel ; il s’agit donc de le comprendre. Une fois que les raisons seront identifiées, nous nous demanderons ce que l’on peut faire pour stimuler et encourager le mécénat, comment mieux promouvoir la philanthropie culturelle et mettre en place des mesures fiscales incitatives.

F.S. : Cette initiative est-elle liée à un désengagement du gouvernement québécois en matière culturelle ?
P.B.
: Je ne peux pas répondre à la place de la Première ministre, mais il est certain que les budgets publics ont de moins en moins de marges de manœuvre. Le gouvernement actuel est préoccupé par la culture, qui ne reçoit pas autant qu’il le souhaiterait. Je vois là une vraie volonté pour conserver son investissement, voire l’améliorer. Le Québec, comme province du Canada, est bouillonnant, créatif, dans tous les domaines artistiques. Sans être une capitale culturelle, Montréal est une place centrale, dynamique. Et je suis sûr que le gouvernement maintiendra son budget si le privé et les entreprises participent.

F.S. : Le mécénat, très présent dans le modèle culturel nord-américain, a-t-il réellement des possibilités de développement ?
P.B. : D’abord, je fais la distinction entre les anciennes institutions culturelles, structurées, avec un système de gestion des mécènes et des sociétés d’amis importantes, qui captent une grosse part des dons privés, et les petites compagnies de théâtre, de danse ou les ensembles de musique baroque, sans équipes spécialisées, et qui, eux, souffrent de ce manque de mécénat. C’est d’eux dont il faut se préoccuper aujourd’hui, car la créativité se situe là. Ensuite, si le Québec n’est pas une province riche, contrairement à l’Ontario, elle n’est pas une province pauvre non plus. Des familles et des entreprises peuvent encore davantage soutenir la culture. Un travail de promotion de la philanthropie reste donc à faire auprès d’elles. Enfin, il y a un potentiel important du côté des jeunes générations. Faire un don de 500 dollars, c’est déjà un début. Car, au fur et à mesure que les revenus augmentent, les dons croissent aussi. Nous devons penser à l’avenir.

F.S. : Quelles sont vos prochaines étapes de travail ?
P.B. : Nous avons commencé par faire un audit des bonnes pratiques, notamment dans les pays anglo-saxons où, contrairement à la France où l’État joue un rôle immense, le mécénat existe depuis longtemps et fait partie du financement de la culture. Le Québec est un peu entre ces deux modèles. Je pense que les Québécois ne considèrent pas qu’ils peuvent jouer un rôle. Mais l’État ne peut pas tout soutenir. Si l’on veut augmenter l’enveloppe de la culture, il faut développer le mécénat. En revanche, il ne faudrait pas que ce développement désengage le gouvernement. La philanthropie doit compléter une politique.

Le groupe
Voulu par la Première ministre du Québec, Pauline Marois, le groupe de travail est rattaché au ministère des Finances et de l’Économie et non à celui de la Culture.

3 %
Le ministre des Finances, Nicolas Marceau, a rappelé lors de la mise en place du groupe de travail que le secteur culturel était un levier économique important au Québec. Il emploie environ 3 % de la population active.

« La culture joue un rôle essentiel dans l’épanouissement de la nation québécoise. Ce qu’elle est devenue, on le doit à nos créateurs, et aussi à tous ceux qui ont soutenu leur travail et la diffusion de leurs œuvres. » 
Pauline Marois, le 17 janvier dernier, lors de l’installation du groupe de travail sur la philanthropie culturelle.

Repères

Grand mécène du pavillon d’art québécois et canadien du Musée des beaux-arts de Montréal (pavillon Claire et Marc Bourgie) et de la salle de concerts Bourgie, installée dans l’ancienne église Erskine and American, Pierre Bourgie est membre du conseil d’administration du Musée des beaux-arts. En 2012, il a reçu le prix de la personnalité Arts-Affaires et le prix Bovey pour son engagement en faveur de la culture.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°656 du 1 avril 2013, avec le titre suivant : Pierre Bourgie, collectionneur et mécène montréalais

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