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ART CONTEMPORAIN

Masmonteil, une peinture qui fait mouche

Par Henri-François Debailleux · Le Journal des Arts

Le 3 juin 2020 - 703 mots

PARIS

La Galerie Thomas Bernard-Cortex Athletico présente plusieurs séries d’Olivier Masmonteil, des paysages travaillés en particulier par la notion de palimpseste.

Paris. Olivier Masmonteil est un vrai pêcheur à la mouche. Il est aussi un vrai peintre, sans que ces deux activités soient vraiment liées. Quoique : c’est en allant régulièrement en Nouvelle-Zélande, réputée pour être la Mecque de la truite, que l’artiste capture, avec son appareil photo, de magnifiques ciels. Ceux-là mêmes que l’on retrouve, réinterprétés, à l’arrière-plan des toiles de l’une des trois séries actuellement présentées à la galerie Thomas Bernard.

Cela fait en effet une vingtaine d’années que l’artiste (né en 1973) travaille plusieurs séries de tableaux simultanément. Il ne les avait cependant jamais montrées en même temps. C’est désormais chose faite, car la période de confinement lui a donné envie de penser son exposition de façon différente. Comme Masmonteil ne voulait pas que celle-ci, visible dès le début du mois de mai uniquement en ligne, ne se résume à une exposition virtuelle, il a décidé de la monter réellement et d’en proposer dans un premier temps une visite pensée comme un témoignage visuel, en convoquant différents regards. Celui de Rebecca Fanuele qui a pris les photos des œuvres en place, mais accrochées à un niveau plus bas qu’à la normale pour jouer sur les prises de vue. Celui de Pierre-Évariste Douaire dont les vidéos modifient la logique de circulation habituelle, changent la perception de l’espace et atomisent en quelque sorte l’accrochage, puisque la visite de la galerie fermée a permis, libérée des contraintes physiques, une multiplication de points de vue. Enfin, il y a également le son avec les trois podcasts réalisés par la critique d’art Camille Bardin (émission Présent.e, disponible sur différentes plateformes).

La réouverture de la galerie le 12 mai n’a pas empêché l’artiste de poursuivre sa réflexion sur la réalité et l’expérience physique d’une exposition ainsi que sur les conditions de visibilité et de perception des œuvres. Il a par exemple décidé de commencer la visite, non par ses ciels, mais par les « Paysages effacés », moins connue. Ici, Masmonteil, après avoir entièrement recouvert le fond de la toile d’un blanc crème, peint l’ensemble de la représentation dans une tonalité sépia dont il va ensuite retirer des pans pour retrouver le blanc initial. « On appelle cela peindre en réserve de blanc », précise-t-il à propos de cette technique qui lui permet de « recouvrir pour dévoiler, selon la définition de la peinture par Praxitèle », de jouer sur l’effacement, le voile, l’idée du palimpseste. Une façon de composer avec les traces, les souvenirs et notamment ceux de ses voyages, comme le montrent certaines toiles, à l’exemple de Madagascar, Hari-Hari ; différents motifs, palmiers, coque de bateau s’y entremêlent comme autant de bribes et lambeaux de mémoire que soulignent des petites taches de couleurs. Sur ces tonalités de vieilles cartes postales, Masmonteil superpose en effet ici un bleu, là un rose, ailleurs un vert, tous de ton pastel, afin de donner encore plus de profondeur à l’image et rappeler ses grandes qualités de coloriste.

Des ciels étirés

La couleur saute encore plus aux yeux du spectateur dans « Horizons », la série des ciels précitée, où le principe de superposition est remplacé par celui de la juxtaposition avec, dans la partie supérieure, des déploiements de ciels qui donnent au tableau toute sa profondeur et, dans la partie inférieure, l’abstraction constituée par les lignes horizontales de couleurs différentes (et parfois presque fluo) qui, elles, étirent le tableau dans sa largeur.

La troisième série de toiles, intitulée « Arbres », conjugue juxtaposition et superposition puisque sur les ciels et paysages, Masmonteil vient figurer au tout premier plan un arbre, comme le nez au milieu du visage. Un portrait en quelque sorte. Histoire de rappeler que si le paysage est l’un de ses sujets principaux, il prend plaisir à passer en revue tous les thèmes de la peinture.

Avec une suite de six impressions (tirage à jet d’encre pigmentaire en 50 exemplaires) formant la série des « Arbres » à 200 euros pièce et des toiles allant de 6 200 euros à 25 000 euros pour la plus grande (2,20 x 2 m), les prix se situent « dans la moyenne pour un artiste français de sa génération », indique Thomas Bernard.

Olivier Masmonteil. Le voile effacé,
jusqu’au 31 juillet, Galerie Thomas Bernard-Cortex Athletico, 13, rue des Arquebusiers, 75003 Paris.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°547 du 5 juin 2020, avec le titre suivant : Masmonteil, une peinture qui fait mouche

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