Entretien

Guillaume Cerutti, président de Sotheby’s France, Paris

« Mettre le marché parisien aux standards internationaux »

Par Armelle Malvoisin · Le Journal des Arts

Le 30 novembre 2007 - 663 mots

Vous avez fait votre carrière dans l’administration, avant votre arrivée chez Sotheby’s en septembre. Passe-t-on facilement du secteur public à un groupe privé ?
C’est une question très française ! En France, les passerelles entre les milieux professionnels sont moins naturelles qu’à l’étranger, ce qui est regrettable. J’ai toujours occupé des postes très opérationnels au Centre Pompidou [à Paris], à la Culture ou à Bercy, et cohérents avec celui que j’occupe désormais chez Sotheby’s. Sans oublier ma connaissance des acteurs et du fonctionnement du milieu de l’art.

Qu’est-ce qui vous a motivé à rejoindre Sotheby’s ?
Mon attirance pour des fonctions opérationnelles touchant à une entreprise qui a une marque reconnue mondialement, dans une période excitante où l’ouverture du marché français à la concurrence est encore récente. Ce marché est en plein développement et, dans un contexte d’évolution réglementaire, il va encore bouger.

Quelle mission vous a-t-on confiée ?
Sotheby’s a le souhait d’accentuer fortement sa présence en France. À la fois en développant ses ventes à Paris, mais aussi par sa notoriété, sa visibilité et sa présence.

Quelles sont vos premières impressions ?
J’ai d’abord souhaité rencontrer les 80 salariés de Sotheby’s France. La compétence et la qualité de cette équipe doivent être soulignées. La concurrence nous pousse évidemment à nous développer en France. Il est aujourd’hui important que Sotheby’s se positionne parmi les deux premières sociétés de ventes dans l’Hexagone, comme c’est le cas partout ailleurs et à l’international.

Pourquoi n’avoir pas réagi plus tôt ?
C’est à la fois une question de rythme de développement – le marché français s’étant ouvert à la concurrence il y a à peine quelques années – et un choix stratégique. N’oubliez pas que Sotheby’s est une société cotée en bourse. Cela nous pousse à une recherche d’excellence et à privilégier la rentabilité. La course aux parts de marché est importante, mais elle ne doit pas se faire au détriment de la rentabilité.

Quel est le programme de décembre ?
Nous débuterons avec une vente d’art tribal qui est un point fort de Sotheby’s. Le département parisien qui tient un rôle majeur au sein du groupe, est leader en France. Les collectionneurs américains nous confient leurs objets pour Paris, telle la collection Leyden le 5 décembre, soit quinze lots estimés 2 à 3 millions d’euros. Nous présenterons aussi une vente d’art asiatique (lire p. 23) avant d’enchaîner avec les ventes d’art moderne et contemporain où nous nous attachons à présenter davantage de pièces majeures (lire p. 22).

Quel est votre point de vue sur le problème de la fiscalité du marché de l’art français et quelles solutions préconisez-vous ?
Les données sont connues depuis longtemps. Les points délicats sont la TVA à l’importation et le droit de suite qui, dépendant tous deux de directives européennes, sont difficiles à faire évoluer. Je pense plus pragmatique d’envisager la possibilité d’élargir l’application de la TVA à l’importation à taux réduit à d’autres catégories d’œuvres d’art telles que les bijoux et le mobilier XXe actuellement soumis au taux normal. Pour le droit de suite, je plaiderais pour un alignement en France des règles de dérogations obtenues par les Anglais. L’application d’un crédit d’impôt tel que le propose le Conseil des ventes volontaires serait également une façon intelligente d’alléger l’impact de cette fiscalité en France.

Allez-vous défendre prioritairement ces points auprès du chargé de mission Martin Bethenod ?
Oui, mais pas seulement. Le volet réglementaire est tout aussi important. Malgré l’ouverture à la concurrence, la France porte encore les marques d’un système ancien. Je voudrais défendre la possibilité pour une maison de ventes françaises de faire les ventes de gré à gré comme nous le faisons à Londres ou New York ; de pouvoir offrir des garanties de prix et de vendre des biens neufs comme des bijoux, par exemple. Enfin, le code du commerce nous empêche de vendre aux enchères des œuvres dont nous serions propriétaires. Si nous voulons donner un coup de fouet au marché parisien, il est vital de le mettre aux standards internationaux.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°270 du 30 novembre 2007, avec le titre suivant : Guillaume Cerutti, président de Sotheby’s France, Paris

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