Foire & Salon

Art Genève monte en gamme

Par Stéphane Renault · Le Journal des Arts

Le 15 février 2018 - 915 mots

GENEVE / SUISSE

Pour sa 7e édition, la première foire d’art moderne et contemporain de Suisse romande a démontré, avec une qualité croissante dans la sélection de ses galeries, qu’elle avait tout d’une grande.

Félix, le chat gonflable géant de Mark Leckey, accueillait les visiteurs en haut des escalators menant à l’espace d’exposition de Palexpo. Il y avait foule à l’ouverture de cette nouvelle édition, le 1er février. Mais pas pour autant « le feu au lac » – l’une des qualités de ce salon qui privilégie le calme et le temps nécessaires à l’échange et l’appréciation de la sélection pointue des quelque 80 galeries de 16 pays. Les accrochages donnent par ailleurs à voir une qualité qui va crescendo d’année en année.

Dans l’ADN du salon, le riche programme institutionnel proposait, ici des sculptures monumentales de Max Bill, là un ensemble d’œuvres de Martin Disler, un arbre monumental de Giuseppe Penone. L’espace d’exposition de la collection Ringier laissait admirer, entre autres, des pièces de Rirkrit Tiravanija, Barbara Kruger, Fischli & Weiss, Sylvie Fleury, Louise Lawler ou Seth Price. Le festival se poursuivait à la Whitechapel Gallery (Londres), dans les stands du Mamco ou du Centre d’art contemporain genevois. Invité, le Tel Aviv Museum of Art présentait une très belle vidéo du collectif Public Movement.

Le « Prix Solo artgenève - F.P. Journe » a été décerné à la meilleure présentation monographique du salon : « Small is beautiful », avec Niki de Saint Phalle & Jacques Villeglé, de la Galerie Georges-Philippe & Nathalie Vallois (Paris). Le jury était composé de Caroline Bourgeois (Collection François Pinault, Paris, Venise), Lionel Bovier (Mamco, Genève) et Hans-Ulrich Obrist (Serpentine Galleries, Londres).

Ressentis contradictoires au PAD
Nouveauté de cette édition : l’invitation faite au PAD (Pavilion of Art and Design). Si la présence de marchands de mobilier, d’antiquités et de design a permis d’accroître le nombre de collectionneurs, les avis divergeaient sur le bien-fondé de ce rapprochement. « Les collectionneurs des Lalanne ne sont pas ceux de Kenneth Noland. Il n’est pas sûr que la foire y gagne en qualité », avançait ainsi un galeriste. Au sein même de l’espace du PAD, les ressentis étaient contradictoires. « On est très contents. Il y a beaucoup d’intérêt, de contacts avec des collectionneurs très sérieux, confiait le galeriste et designer Hervé Van der Straeten. Nous avons déjà un certain nombre de clients dans la région. C’est une première édition concluante, avec un rythme plus calme que Londres mais un éclectisme, une identité qui fonctionne bien. » Autre stand, autre ambiance : Alain Marcelpoil, expert parisien de renom dans l’Art déco, déplorait au troisième jour n’avoir fait aucune vente. « Il ne se passe rien, il n’y a pas de clients pour nous. Si je ne rentre pas dans mes frais, je ne reviendrai pas. »

À Art Genève, les marchands témoignaient de leur satisfaction. « Il y avait beaucoup de gens le jour du vernissage. Des Suisses bien sûr, que nous venons voir ici, mais aussi des Belges, des Français, relevait Anne-Claudie Coric, directrice générale de la Galerie Templon (Paris). Nous avons bien travaillé. La qualité de la foire est en constante progression. La fréquentation a gagné en densité, à l’égal désormais d’Art Cologne ou d’Art Düsseldorf… » La galerie a vendu une toile de Georges Mathieu de 1976 (140 000 €). Sur le stand, une grande toile rouge, California Window (1975), de Robert Motherwell était proposée à 3,7 millions d’euros. Simultanément à la donation au Centre Pompidou, l’enseigne montrait des œuvres de Jim Dine, également, un bronze de César. Une grande toile d’Omar Ba, artiste sénégalais vivant à Genève, a été cédée à 40 000 euros.

« Les gens prennent plaisir à passer du temps. Il y a des propositions curatoriales très intéressantes, faisait quant à elle remarquer la Genevoise Laurence Bernard. Nous avons fait de bonnes ventes. » Sur son stand : une série d’encres sur papier de Peter Regli (2 750 CHF l’unité, environ 2 400 €), des photographies de Stéphane Thidet, des œuvres d’Angelika Markul, prix Maif pour la sculpture 2017, un tableau-sculpture de Bernard Voïta ou encore une sculpture des frères Chapuisat en séquoia, un bois réputé pour ses qualités fongicides et jadis utilisé par les bourgeois genevois pour construire leurs maisons.

Une foire d’« un bon format »
Stéphane Ribordy, dans le comité de sélection depuis la première édition, estimait que ses confrères et consœurs avaient dans l’ensemble bien travaillé cette année : « Le PAD a diversifié le public. On a toujours voulu avoir une section design. Art Genève est une foire européenne mais s’est étoffée. Ce n’est plus uniquement le bassin régional. Il y a des gens qui viennent de plus loin que Lausanne ! La foire est devenue plus internationale tout en conservant son identité. » Ribordy Contemporary (Genève) a placé (pour 30 000 CHF) dans une grande collection institutionnelle suisse une toile de Mathis Gasser, artiste récemment exposé au Centre culturel suisse à Paris.

Pour sa première participation, en amont de l’ouverture d’un nouvel espace à Genève en mars, la Pace a vendu dès les premières heures des œuvres de Robert Mangold, Adam Pendleton, Brent Wadden, Prabhavathi Meppayil et Michal Rovner.

Le Salon accueillait cette année trois autres nouvelles enseignes : Perrotin, Art : Concept et 1900-2000 (Paris). Chez cette dernière, David Fleiss confiait : « Nous n’avons pas d’expérience des années passées pour comparer mais c’est une foire de bonne qualité, avec un bon format. On voit beaucoup de collectionneurs, plutôt suisses, qu’on ne voit habituellement qu’à Bâle [Art Basel]. Il n’y a pas énormément de monde mais il y a les bonnes personnes. »

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°495 du 16 février 2018, avec le titre suivant : Art Genève monte en gamme

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