Art contemporain

Women House, l’art fait maison

Par Magali Lesauvage · Le Journal des Arts

Le 15 novembre 2017 - 485 mots

PARIS

La Monnaie de Paris met en lumière la création des femmes soumises au joug de la domesticité.

Paris. On se souvient de l’événement qu’avait été en 2009 l’accrochage « elles@centrepompidou », qui sortait du placard des dizaines d’artistes femmes présentes dans les collections du Musée national d’art moderne. Et aussi des critiques que cette sélection cent pour cent féminine, réalisée par l’ancienne conservatrice du Centre Pompidou Camille Morineau, avait alors suscitées. Depuis, un vaste mouvement de redécouverte replace peu à peu des figures oubliées sur l’échiquier de l’histoire de l’art. Poursuivant ses recherches au sein de l’association Aware, Camille Morineau, aujourd’hui directrice des expositions à la Monnaie de Paris, a choisi d’y consacrer tous les deux ans une exposition à l’art des femmes.

Humour féroce

Premier épisode, « Women House », prend pour thème la domesticité et la maison tantôt comme espace contraint, tantôt comme lieu de refuge. Elle réunit 39 artistes femmes, de Claude Cahun à la jeune Laure Tixier en passant par de nombreuses artistes de la performance moins connues en France telles Letítia Parente ou Birgit Jürgenssen, avec pour figures tutélaires Niki de Saint Phalle, dont une Nana-maison nous accueille dans la cour, et Louise Bourgeois, dont l’araignée monumentale conclut le parcours en apothéose dans le salon d’honneur.

L’exposition, qui se déploie dans les espaces agrandis de la Monnaie, est organisée conjointement avec le National Museum of Women in the Arts de Washington, où elle s’exportera en mars 2018. On pourra reprocher au principe même de « Women House », qui s’inspire d’une exposition quasi homonyme, « Womanhouse », organisée en 1972 par Miriam Schapiro et Judy Chicago, d’enfoncer le clou du stéréotype de la femme associée dans la tradition patriarcale à l’espace domestique. C’est ignorer la capacité d’ironie des artistes présentées là, et leur volonté de parler à partir du lieu même où la majorité des femmes, depuis des siècles, fut cantonnée. Ainsi la Monnaie révèle-t-elle une série d’œuvres à l’humour féroce, qui pourtant n’oblitère pas une souffrance réelle. La femme, le plus souvent, y est réduite à son rôle d’objet. C’est Karin Mack allongée sur une table à repasser (Irondream, 1975) ou Lucy Gunning dans la vidéo Climbing Around My Room (1993) escaladant en talons hauts les murs de sa chambre à la recherche d’une issue. C’est, dans un pendant plus trash, la performance de Lydia Schouten butant contre les barreaux d’une cage (Cage, 1978), Monica Bonvicini attaquant un mur de plâtre à coups de masse (Hammering Out, 1995) ou l’Exorcism House (1997) de Penny Slinger inspirée des maisons de poupée.

La section architecture, avec notamment une tente-refuge de Lucy Orta, semble un peu hors sujet même si la recherche formelle sur les empreintes architecturales et le rapport à la peau et au corps (chez Rachel Whiteread ou chez la jeune artiste iranienne Nazgol Ansarinia) sonne juste. Comme la plupart des œuvres d’une exposition qui s’inscrit dans une démarche devenue nécessaire de réécriture de l’histoire de l’art.

 

 

Women House, la maison selon elles,
jusqu’au 28 janvier 2018, Monnaie de Paris, 11, quai de Conti 75006 Paris.

 

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°489 du 17 novembre 2017, avec le titre suivant : Women House, l’art fait maison

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