Trésors

Sous les auspices du cavalier d’Ifé

Par Julie Portier · Le Journal des Arts

Le 9 avril 2008 - 443 mots

Les fleurons de la collection Barbier-Mueller sont exposés au Musée Jacquemart-André, à Paris

PARIS - À l’occasion du centenaire de la collection Barbier-Mueller, le musée genevois, créé il y a trente et un ans pour conserver les trésors de cette famille de collectionneurs – Josef Mueller, sa fille Monique et son gendre Jean Paul Barbier –, avait organisé en 2007 une exposition autour d’une centaine de ses pièces parmi les plus prestigieuses. La manifestation est aujourd’hui présentée à Paris, au Musée Jacquemart-André.
Des cartels réduits au strict minimum, des cartes géographiques peu précises, un éclairage quasi mystique : d’emblée, le parcours affirme un parti pris purement esthétique, au détriment d’une approche ethnologique et pédagogique. Si l’on peut reprocher à l’exposition de ne fournir aucune précision sur la fonction rituelle ou sociale (pourtant essentielle) des œuvres, le propos a le mérite d’être clair. Collectionneurs érudits et spécialistes se délecteront au vu du caractère exceptionnel de l’ensemble de ces pièces regroupées par grandes zones géographiques. À commencer par les créations gabonaises, congolaises, maliennes et ivoiriennes, des sculptures de bois ou de métal. Parmi celles-ci figure le fameux Sceptre « au cavalier d’Ifé » (XIIe-XIIIe siècle), provenant du Nigeria et illustrant la grandeur de l’art d’Ifé. Cette cité, qui compte aujourd’hui près de 300 000 habitants, était anciennement située au cœur d’une forêt et considérée par les Yoruba comme l’origine de l’humanité. Pour Jean Paul Barbier-Mueller, il s’agit du « chef-d’œuvre absolu » de sa collection. Aux figurines féminines, statue aux bras levés, insigne et sculpture zoomorphe du Mali, succèdent les nombreuses traditions artistiques de Côte d’Ivoire, tel le délicat visage féminin sculpté utilisé comme bobine d’un métier à tisser, ou l’impressionnant masque-heaume à deux faces. Ce dernier objet intervient dans plusieurs cultes du centre et du nord du pays, chez les Baoulé, les Wan, les Mona, les Malinké et les Yohure. Signalons encore la présence de masques Kwélé dont la sobriété des lignes le dispute à leur pureté, et, des Kongo congolais, ces « objets-force » recouverts de clous et destinés à agir contre les esprits maléfiques. Parmi les diverses œuvres provenant d’Océanie, il faudra s’attarder sur la Coupe anthropomorphe des îles Fidji pour laquelle il existe moins de dix exemplaires au monde, ainsi que sur l’admirable Figure féminine des îles Caroline en Micronésie. Autant d’œuvres d’une beauté et d’une force indéniables qui ne peuvent qu’attiser la curiosité et la soif de connaissance du visiteur.

ARTS D’AFRIQUE ET D’OCÉANIE, LES CHEFs-D’ŒUVRE DE LA COLLECTION BARBIER-MUELLER

Jusqu’au 24 août, Musée Jacquemart-André, 158, boulevard Haussmann, 75008 Paris, tél. 01 45 62 11 59, www.musee-jacquemart-andre.com, tlj 10h-18h. Catalogue, coéd. Musée Barbier-Mueller, Genève/Hazan, Paris, 406 p., 39 euros, ISBN 978-2-7541-0218-6.

COLLECTION BARBIER-MUELLER

- Commissaires : Jean Paul Barbier-Mueller, président-fondateur des musées Barbier-Mueller ; Nicolas Sainte Fare Garnot, conservateur du Musée Jacquemart-André
- Nombre d’œuvres exposées : 100 (5 000 œuvres conservées au Musée Barbier-Mueller de Genève)
- Nombre de salles : 7
- Scénographie : Jana Ansermet, directrice des expositions et des Musées Barbier-Mueller

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°279 du 11 avril 2008, avec le titre suivant : Sous les auspices du cavalier d’Ifé

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