Art moderne

XIXE-XXE SIÈCLES

Sorolla, un peintre perfectionniste

Par Élisabeth Santacreu · Le Journal des Arts

Le 15 septembre 2020 - 570 mots

AIX-EN-PROVENCE

Outre les scènes de plage si lumineuses sont présentés ses recherches et l’entraînement intensif de l’œil et de la main qu’il s’imposait.

Joaquín Sorolla, Sur le sable, plage de Zarautz, 1910, huile sur toile, 99 x 125 cm, Madrid, Museo Sorolla. © Photo Museo Sorolla, Madrid
Joaquín Sorolla, Sur le sable, plage de Zarautz, 1910, huile sur toile, 99 x 125 cm, Madrid, Museo Sorolla.
© Photo Museo Sorolla, Madrid

Spécialiste de la peinture espagnole du tournant du XIXe au XXe siècle et de Joaquín Sorolla y Bastida (1863-1923) en particulier, l’historienne de l’art María López Fernández a réuni près de quatre-vingts œuvres (dont certaines, issues de collections privées, sont inédites) pour présenter le processus créatif d’un artiste en perpétuelle recherche, malgré son succès considérable.

Au-delà de l’influence qu’il a reçue de ses contemporains – Claude Monet, mais surtout les naturalistes Jules Bastien-Lepage, James Abbott McNeill Whistler, Anders Zorn, John Singer Sargent ou Peder Severin Krøyer –, il est resté fidèle à l’enseignement de deux Espagnols comme lui, Francisco de Goya et surtout Diego Velázquez, qu’il a voulu continuer à l’époque moderne et auquel il est revenu tout au long de sa vie. La Famille (1901) montre sa femme, leurs trois enfants et lui-même. On l’aperçoit dans un miroir en train de les peindre, référence aux Ménines d’ailleurs explicite dans le titre du tableau puisqu’à l’époque cette œuvre de Velázquez s’intitulait également La Famille. Mais, en moderne, Sorolla a travaillé sa composition à partir d’une photographie prise par son beau-père. Dans de nombreux portraits, on retrouve l’influence du maître sévillan, notamment dans le magnifique María au chapeau (1910).

Dans la salle consacrée au naturalisme est présenté La Cruche (1904) – tableau qui n’a jamais été exposé – dont le cartel analyse l’éclairage. Car c’est bien le rendu de la lumière qui caractérise l’œuvre de Sorolla. Il étudiait inlassablement les ombres qui pouvaient devenir le sujet principal du tableau, par exemple dans L’Ombre de la voile (1908). La commissaire consacre d’ailleurs dans l’exposition un espace aux recherches sur les voiles des bateaux dont elle précise qu’elles obsédaient le peintre dans la mesure où elles l’obligeaient à « transposer sur la toile la sensation que l’œil perçoit lors d’un premier regard ». Ailleurs, à propos de Sur le sable, plage de Zarautz (1910, voir ill.) montrant en plongée un groupe dense de femmes et d’enfants, elle insiste sur l’importance de la photographie dans l’œuvre de Sorolla.

Un artiste exigeant

Celui-ci était surtout apprécié comme pleinairiste. Sur la plage, il peignait très rapidement ses grandes toiles après des recherches sur des petits formats (qu’il appelait des « notes de couleur ») dont une belle série est montrée ici. Pour chaque œuvre, il pouvait ainsi allier l’immédiateté du geste, capitale pour lui, à une composition et à un chromatisme étudiés à l’avance et travaillés jusqu’à l’automatisme.

Les commentaires de salle et les cartels expliquent aussi la manière dont il a mené sa carrière. Comme il était d’usage, il a commencé par montrer nombre de portraits pour obtenir des commandes. Mais il s’est positionné d’emblée sur le marché international : pendant le printemps 1908, raconte le cartel de Bain à la plage (1908), il expose à Londres où il rencontre « Archer Huntington, fondateur de l’Hispanic Society of America, qui lui propose de réaliser une première grande exposition à New York. En vue de cette opportunité, qui s’avèrera cruciale dans sa carrière, Sorolla passe l’été peignant sur la plage de la Malva-Rosa, dans une activité fébrile. Il réalise alors quelques-unes de ses plus belles œuvres. » Si la peinture du Valencien, résolument tournée vers le bonheur, a pu paraître superficielle, l’exposition montre qu’au contraire elle est le fruit de l’exigence d’un artiste dont la virtuosité résultait d’un travail intense.

Joaquín Sorolla. Lumières espagnoles,
jusqu’au 1er novembre, Hôtel de Caumont, 3 rue Joseph-Cabassol, 13100 Aix-en-Provence.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°550 du 4 septembre 2020, avec le titre suivant : Sorolla, un peintre perfectionniste

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