Reconstitution : Toutankhamon

Le statut de l’œuvre d’art questionné par l’exposition de la réplique de la tombe de Toutankhamon

Le Journal des Arts

Le 19 juin 2012 - 432 mots

PARIS - « Revivez la plus grande aventure archéologique du XXe siècle » : l’invitation est tentante. Après Bruxelles, Barcelone, Séoul ou Budapest, l’exposition « Toutankhamon, son tombeau et ses trésors » arrive en France.

Ce type d’événement est inédit, puisque c’est la première fois qu’une exposition d’envergure ne présente que des répliques, sans aucune œuvre originale. La démarche se veut éducative et cible un public essentiellement familial : raconter la vie de Toutankhamon, le plus célèbre des pharaons, et la découverte de son tombeau par Howard Carter en 1922.
« Spectaculaire », « inoubliable », « monumental », la communication autour de l’événement n’a lésiné ni sur les superlatifs ni sur les moyens. Le projet, initié en 2006 par une société allemande organisatrice de concerts, a été scénographié par l’architecte Rainer Verbizh, grand habitué de projets culturels. Pour la dimension scientifique, les organisateurs ont collaboré avec le Griffith Institute d’Oxford, qui abrite la documentation d’Howard Carter sur sa découverte et ses fouilles. Deux autres versions identiques de l’exposition tournent également dans le monde entier.

Après deux films sur le pharaon et sur Carter, le public découvre les deux chambres funéraires comme les archéologues les ont mises à jour : un enchevêtrement de mobilier et d’objets assez frappant. Puis le reste du parcours étale ce mobilier funéraire, des chapelles funéraires déboîtées comme des poupées russes jusqu’au masque en or de Toutankhamon, « clou » du spectacle. Généraliste, le propos est basique et très factuel. L’accent a été mis sur la théâtralisation, réussie, il est vrai, des objets.

Cependant, force est de constater qu’ici, le statut de l’objet archéologique importe peu. Exécutés par des artisans du Caire, les statues et le mobilier brillent sans conteste, plus vrai que nature. Pour les organisateurs, exposer des répliques permet de préserver les objets antiques, aujourd’hui intransportables et visibles uniquement au Caire. La réplique, dans le domaine de l’archéologie, a depuis longtemps un intérêt reconnu : la grotte de Lascaux s’apprête ainsi à franchir l’Atlantique avec les fac-similés de Lascaux III. Mais la question du contenu scientifique se pose : peut-on se satisfaire d’une simple évocation globale de la vie des pharaons, alors que le matériel réuni ici pourrait être le support d’un discours plus exigeant ? Une reproduction ne remplacera jamais l’original, mais la réplique est désormais une des pistes à explorer pour exposer l’archéologie. Avec « Toutankhamon », le débat s’ouvre sur son utilisation.

TOUTANKHAMON, SON TOMBEAU ET SES TRÉSORS

Jusqu’au 1er septembre, Paris Expo, Porte de Versailles, Pavillon 8, 75015 Paris, www.toutankhamon-expo.fr. Juin : tlj sauf mardi, 11h-19h, vendredi jusqu’à 22h. Juillet-août : tlj 11h-19h.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°372 du 22 juin 2012, avec le titre suivant : Reconstitution : Toutankhamon

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