Art moderne - Photographie

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Paris, Brassaï et Picasso

Par Christine Coste · Le Journal des Arts

Le 24 novembre 2021 - 522 mots

MALAGA / ESPAGNE

Le Musée Picasso de Málaga raconte les conversations du photographe et du peintre dans le Paris artistico-littéraire des années 1930.

Málaga (Espagne). Lorsqu’en 1932 l’éditeur Tériade demande à Brassaï de se rendre pour la revue Le Minotaure chez Picasso rue La Boétie, le photographe vient de publier son ouvrage Paris de nuit. De cette visite naîtra une complicité qui durera jusqu’à la mort de Picasso. Leur collaboration longue de plus de trente ans, le Musée Picasso de Málaga n’est pas le premier à la raconter. En 2000 à Paris, le Musée Picasso consacre une exposition au sujet. À Málaga, ce thème prend de l’ampleur avec Paris et les années 1930 en point d’ancrage.

De ce Paris émerge un foisonnement de rencontres cosmopolites, artistiques et culturelles, et un Brassaï qui ne fut pas que photographe mais aussi peintre, écrivain, sculpteur et cinéaste, ainsi que le rappellent les dessins, toiles, sculptures, livres et films présentés. Certes de manière très ténue, bien que l’importance du milieu littéraire et de la littérature dans son œuvre, trop souvent oubliée, fassent l’objet à Málaga d’une attention inédite.

Car le récit qui se déploie, tonique et vivifiant, s’attache autant à narrer la rencontre Brassaï-Picasso qu’à dresser un portrait de Brassaï dans les liens qu’il tissa avec les artistes. Aux photographies de nuit ou de jour qui l’ont rendu célèbre, s’ajoutent ainsi ses photographies des ateliers de Picasso, Braque, Bonnard, Miró, Dalí ou Fernand Léger, mises en regard avec des peintures de ces mêmes artistes. Des analogies apparaissent, des dialogues plus précis se développent. Les « Transmutations », clichés-verre de Brassaï, conversent ainsi avec ceux de Picasso dont le photographe fut l’initiateur. Le cirque, source de dessins pour l’un comme pour l’autre, offre un dialogue plus inattendu. Les couvertures et doubles pages du Minotaure déroulent de leur côté les collaborations de Brassaï avec André Breton, Man Ray, Dalí, et Picasso toujours.

Nombreux portraits d’artistes

Dans l’atelier parisien de la rue des Grands-Augustins, Dora Maar pose, sévère et distante. Dans l’œuvre photographique de Brassaï, les portraits d’artistes ou d’écrivains sont nombreux. L’exposition leur réserve une belle place, éclairant là encore les liens importants qu’il noua en particulier avec Henri Michaux, Henry Miller ou Jacques Prévert. De la même manière, les années 1939-1945 sont particulièrement riches en documents et photographies, en particulier sur l’œuvre sculpté de Picasso, travail entamé en 1932 rue La Boétie.

En 1964, Brassaï relata dans un livre (publié aux éditions Gallimard) ses conversations avec Picasso. Celles-ci reviennent en fin de parcours sur des parties de l’œuvre plus confidentielles comme les peintures de la cathédrale Notre-Dame de Paris réalisées en 1945. Là encore, photographies, peintures et livres d’artiste sont associés pour éclairer l’œuvre, mais aussi pour faire apparaître le lien entre les deux hommes. « J’aime vos photos précisément parce qu’elles sont véridiques […] Celles que vous avez faites rue La Boétie étaient comme une prise de sang, grâce à laquelle on peut faire l’analyse et le diagnostic de ce que je fus à ces instants », disait Picasso à Brassaï tout en lui demandant à chaque fois qu’ils se rencontraient : « Et le dessin ? Avez-vous repris le dessin ? »

 

 

Le Paris de Brassaï. Photographies de la ville qu’aima Picasso,
jusqu’au 3 avril 2022, Musée Picasso Málaga, San Agustín 8, Málaga, Espagne.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°577 du 12 novembre 2021, avec le titre suivant : Paris, Brassaï et Picasso

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