Espagne - Art moderne

XXE SIÈCLE / VISITE GUIDÉE

Maruja Mallo, un autre visage du surréalisme

Le Centre Botín de Santander réhabilite cette figure singulière et engagée du surréalisme espagnol.

Santander (Espagne). « Alors que partout on célèbre les surréalistes, il nous paraissait un devoir d’apporter, nous aussi, notre pierre à l’édifice », a déclaré Manuel Segade lors de l’inauguration de l’exposition « Maruja Mallo : masque et compas. Peintures et dessins de 1924 à 1982 » au Centre Botín. Le directeur du Musée Reina-Sofía évoque là les nombreux événements organisés en 2024 pour célébrer le centenaire du mouvement. Et il le dit clairement : les artistes espagnols étaient trop peu de la partie. Un tort que les musées de Madrid et de Santander ont souhaité réparer en coproduisant cette rétrospective consacrée à une figure encore méconnue par-delà les frontières ibériques : Maruja Mallo (1902-1995).

Née au tout début du siècle dernier, la Madrilène est souvent décrite comme une avant-gardiste. Si son style n’est pas franchement révolutionnaire, il peut être qualifié de « résolument moderne ». L’artiste innove surtout dans le choix de ses modèles, représentant des femmes aux traits androgynes ou des figures noires, à rebours des canons occidentaux dominants de l’époque.

L’exposition, accrochée chronologiquement, reflète toute la singularité de Mallo et plonge le visiteur dans son histoire personnelle et artistique, faite de voyages et d’audace. Un parcours qui la mène par exemple à intégrer dans les années 1920 la Génération de 27 – elle en sera une des seules figures féminines –, ce groupe d’avant-garde composé notamment de Dalí et de Buñuel.

Marxisme et bouquets

Dans les années 1930, l’arrivée du franquisme la pousse à l’exil : l’intrépide Maruja Mallo part en Argentine, où elle résidera vingt-cinq ans. Elle y connaît, comme en Espagne, un succès immédiat. Ses thèmes modernes séduisent jusqu’à New York où elle expose régulièrement.

Dans ses toiles sud-américaines, la conscience marxiste de celle qui fuit la dictature est évidente. Elle peint des femmes aux mains aussi grandes que leur visage, taillées à coups de pinceau tranchants, portant l’épi de blé et le filet de pêche comme d’autres exhibent le marteau et la faucille : sa série « La religion du travail » (1936-1937) est l’une des plus réussies. Dans les années 1940, elle explore davantage la nature morte. Mais peut-on réellement qualifier de la sorte ses « Naturalezas vivas » (1942-1943) inspirées de son environnement argentin, chatoyants bouquets océaniques qui s’insèrent parfaitement dans l’écrin marin du Centre Botín ?

De retour en Espagne lors de la décennie suivante, Maruja Mallo retrouve la revue madrilène qui l’avait fait connaître dans sa jeunesse, Revista de Occident, et en devient la principale contributrice.

L’exposition témoigne ainsi, à travers exemplaires originaux, extraits télévisés et brochures de presse, de l’engagement de l’artiste, qui ne cessera de communiquer sur sa pratique, inspirant ses contemporains comme les jeunes générations.

Maruja Mallo, masque et compas,
jusqu’au 14 septembre, Centro Botín, plaza Emilio-Botín, s/n, Jardines de Pereda, Santander, Espagne.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°655 du 9 mai 2025, avec le titre suivant : Maruja Mallo, un autre visage du surréalisme

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