Photographie

L’Institut pour la photographie s’ouvre sur le thème du quotidien

Par Christine Coste · Le Journal des Arts

Le 6 décembre 2019 - 807 mots

LILLE

Un premier ensemble d’expositions, tout juste inauguré à Lille, donne le « la » d’une programmation résolument tournée vers la diversité des usages, mais aussi l’histoire et la création contemporaine.

Lille. L’Institut pour la photographie, créé en 2017 à Lille à l’initiative de Xavier Bertrand et Sam Stourdzé, a soulevé maintes questions. Le directeur des Rencontres d’Arles a pu apparaître en effet comme moteur dans le souhait politique du président de la Région Hauts-de-France de doter sa circonscription « d’un nouveau projet photo très ambitieux ». Trois ans plus tard, Anne Lacoste, directrice du lieu, présente depuis le 12 octobre dans des murs en attente de rénovation sa première programmation, préfiguration des ambitions du futur établissement et de son champ d’étude : « l’histoire de la photographie dans toutes ses pratiques et tous ses usages ».

Pas moins de sept expositions sont au menu de cette première salve de propositions sur le thème du traitement du quotidien. Ce qui s’y montre a du coffre et s’équilibre entre, d’un côté, grande figure historique (Lisette Model) ou contemporaine (Thomas Struth) et photographe référencée (la Lilloise Laura Henno), et, de l’autre, une série d’expositions relatives à différents usages de l’archive photo (Emmanuelle Fructus, Thomas Sauvin) ou nées d’un travail de recherche. À l’exemple de « Home Sweet Home », sous le commissariat d’Isabelle Bonnet, consacrée aux regards portés de 1970 à nos jours par trente photographes britanniques sur les maisons et intérieurs de leur pays, reflets implacables de situations sociales et économiques difficiles. Présentée aux Rencontres d’Arles de l’été 2019, cette exposition marque la première coproduction entre les deux institutions. Anne Lacoste s’empresse de devancer les critiques : « L’Institut n’est pas une succursale des expositions des Rencontres. “Home Sweet Home” comme l’ensemble des expositions avaient été programmées pour une présentation au printemps 2019 à Lille, mais le retard pris dans le vidage des bâtiments a induit leur report à cet automne. »

Ce premier ensemble d’expositions séduit par sa teneur, sa justesse dans l’accrochage et son souci de pédagogie. Outre les visites régulières organisées et gratuites, chaque exposition et photographies qui les composent s’accompagnent d’explications généreuses. Leurs cartels égrènent une liste de prêteurs impressionnants, révélateurs du crédit d’Anne Lacoste sur le plan tant national qu’international. Son parcours de conservatrice photo, du Getty Museum à Los Angeles au Musée de L’Élysée à Lausanne, n’y est pas étranger. « Portraits de famille », série emblématique de Thomas Struth, a été produite avec la collaboration de l’atelier du photographe. L’exposition « Lisette Model », abordée sous l’angle de l’enseignante et placée en regard de quelques-uns de ses illustres élèves ou photographes influencés par son travail, n’aurait pu voir le jour sans le soutien des galeries Baudoin Lebon (Paris), Fraenkel (San Francisco), Howard Greenberg (New York) et Bruce Silverstein (New York), représentants respectifs des estates de Lisette Model, Diane Arbus, Mary Ellen Mark et Rosalind Fox Solomon. Enfin, « Greetings from America », axée sur la production de cartes postales américaines entre 1900 et 1940, a été réalisée avec la collaboration du Musée du quai Branly, des Archives nationales, du Musée Nicéphore-Niépce (Chalon-sur-Saône) et des collections Roger-Viollet de la Bibliothèque historique de la Ville de Paris.

En avril 2020, un nouveau corpus d’expositions sera monté en collaboration avec Diaphane, pôle photographique installé en Picardie et organisateur du festival des Photaumnales à Beauvais (Oise). L’Institut fermera ensuite en juin 2020 pour travaux avant une réouverture programmée en décembre 2021.

Une montée en puissance progressive  

FONCTIONNEMENT. À l’achèvement des travaux prévu en 2021, l’Institut pour la photographie offrira sur 3 000 m2 de surface neuf à douze expositions par an, un centre de ressources et des réserves de 700 m2 vouées à accueillir entre dix et quinze fonds complets photographes déposés à long terme, donnés ou légués. Il ne fera pas d’achats. Un programme hors les murs, mis en place depuis plus d’un an, propose une circulation d’expositions et développe la médiation auprès du public. Il mène aussi des projets avec des institutions régionales comme le LaM (Lille-Métropole) lors de l’exposition « Alberto Giacometti » au printemps 2019. Quatre bourses de recherche par an d’une valeur de 15 000 euros chacune ont par ailleurs été déjà allouées depuis 2017. Financé en totalité par la Région Hauts-de-France, le budget est passé de 500 000 euros en 2018 à 1,9 million d’euros en 2019, une grande partie de cette somme étant affectée à l’aménagement des bâtiments mis à disposition par la Métropole européenne de Lille et au renforcement de l’accueil des publics. À terme, en 2021, l’équipe constituée jusqu’ici de neuf personnes devait passer à 20-25 personnes tandis que le budget annuel devrait s’établir entre 3 et 5 millions d’euros. Cette année, la Mairie de Lille, la métropole lilloise et la Drac (direction régionale des Affaires culturelles) ont rejoint l’association de préfiguration de l’Institut, et apportent leur soutien au fonctionnement. La pérennité de l’établissement dépend toutefois d’une diversification de ses financements.

 

Christine Coste

ExtraORDINAIRE, regards photographiques sur le quotidien,
jusqu’au 15 décembre, Institut pour la photographie, 11, rue de Thionville, 59 000 Lille, www.institut-photo.com

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°533 du 15 novembre 2019, avec le titre suivant : L’Institut pour la photographie s’ouvre sur le thème du quotidien

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