Art contemporain

Franz Kline, structurer l’espace

Par Philippe Piguet · L'ŒIL

Le 1 novembre 2004 - 390 mots

Quasi absente des collections publiques françaises, comme des privées d’ailleurs, l’œuvre de Franz Kline est pourtant avec celles de Jackson Pollock et de Willem De Kooning l’une des plus importantes de l’histoire de la peinture abstraite expressionniste américaine. Originaire de Pennsylvanie, né à Wilkes-Barre en 1910, mort en 1962, quelques jours avant de fêter son cinquante-deuxième anniversaire, Kline a marqué celle-ci d’une indéfectible empreinte, tant par la radicalité de sa démarche que par la force expressive de l’image qu’il signe. La façon qu’avait l’artiste d’architecturer le champ iconique de ses tableaux, par de grands coups de pinceaux de peinture noire, lui permettait d’instruire un espace inédit, puissant et monumental. En quête d’une structure fondamentale, Franz Kline développa une œuvre tout d’abord figurative au motif de vues urbaines new-yorkaises et de paysages. Attiré par les possibilités plastiques de l’abstraction et ce qu’elle supposait d’une indépendance du sujet, l’artiste procéda petit à petit à une véritable épuration de la forme jusqu’au moment où, à proprement parler, il en pénétra la trame graphique. C’était vers 1948. Kline utilisa un projecteur pour projeter quelques-uns de ses dessins en noir et blanc dont il s’intéressa à ne conserver qu’un simple jeu de lignes. Il prit alors conscience de la force d’expression de ces fragments monumentalisés et décida d’en faire l’objet exclusif de son travail. Porté par l’accompagnement critique de Clement Greenberg et de Meyer Shapiro, Franz Kline participa dès lors activement à l’avènement de l’expressionnisme abstrait au sein de la fameuse école de New York, le premier mouvement véritablement américain. Audacieuses tant par leur ampleur que par la virulence de leur gestualité, les œuvres de Franz Kline, qui ne sourdent pas de l’expérience surréaliste à la différence de ses congénères, charpentent l’espace sans recours au dessin. Pour l’essentiel en noir et blanc, quoique connaissant un certain retour à la couleur vers le milieu des années 1950, elles imposent au regard quelque chose d’un paysage mental qui les singularisent parmi la production artistique de cette époque. Comme en
témoigne l’exposition rétrospective que lui consacre le Castello di Rivoli, l’art de Franz Kline oppose au geste tourmenté et à l’étendue sans repère de Pollock une pensée construite et structurée.

« Franz Kline (1910-1962) », RIVOLI (Italie), Castello di Rivoli, Museo d’Arte Contemporaneo, Piazza Malfada di Savoia, tél. 00 39 011 956 5222, 20 octobre 2004-30 janvier 2005.

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Cet article a été publié dans L'ŒIL n°563 du 1 novembre 2004, avec le titre suivant : Franz Kline, structurer l’espace

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