Charley Toorop, au centre du père et du fils

Par Manou Farine · L'ŒIL

Le 23 février 2010 - 247 mots

En 1941, alors que les Pays-Bas sont défaits par l’Allemagne nazie, Charley Toorop entreprend une toile qui l’occupera pendant une décennie.

Trois générations, composition autocentrée, s’impose non seulement comme l’application d’un programme pictural tardif, mais détermine encore la place de l’artiste. Une histoire de dettes, de symboles, de modèles et de rapports de force. Au centre, assise au premier plan, parée des conventions de l’autoportrait – blouse, pinceau dressé et palette –, l’artiste est celle qui distribue la composition. On reconnaît le visage de l’artiste – mise asexuée, regard droit planté dans celui du spectateur – mais cette fois, l’autoportrait prend des allures d’exercice quasi psychanalytique.
 
Le père, figuré par une tête en bronze signée John Rädecker – véritable statue du commandeur –, le fils, portant palette, mais relégué à l’arrière, à l’ombre de sa mère. De la même manière que Charley sera formée dans l’atelier de son père Jan Toorop, le fils aîné, Edgar Fernhout (1912-1974), en passera par l’instruction d’une mère pour le moins directive et tout entière absorbée par son engagement artistique. L’un est mort, l’autre s’est éloigné pour mieux inventer sa propre voie, finalement trouvée dans l’abstraction. Curieuse composition triangulaire – « Je les ai cloués à la croix », aurait-elle dit – qui fait du fils un archétype regardant celle qui peint, fait du père un monument et un modèle de sculpteur. Et fait finalement de Charley la seule peintre, affirmant la conquête de sa place et l’accomplissement d’une figure d’artiste.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°622 du 1 mars 2010, avec le titre suivant : Charley Toorop, au centre du père et du fils

Tous les articles dans Expositions

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque