Chaissac le précurseur

Par Philippe Piguet · L'ŒIL

Le 1 juillet 1998 - 264 mots

Indissociables. Les œuvres plastiques et littéraires de Gaston Chaissac (1910-1964) sont indissociables. Elles le sont tant par leur contenu que par leur forme, tous deux irrésistiblement mêlés et renvoyant à une spontanéité créatrice sans cesse renouvelée.

Ses lettres maladroites et souvent bâclées – Chaissac était un intarissable épistolier – le disputent à ses peintures aux motifs grossiers cernés de noir et à ses sculptures faites de bric et de broc. Né à Avallon en 1910, d’origine modeste, Chaissac n’est entré qu’assez tardivement dans l’aventure de l’art. S’il le découvre à Paris en 1937 grâce à son voisin le peintre Otto Freundlich, il ne s’y adonne qu’après sa rencontre avec Jean Dubuffet, dix ans plus tard, partageant avec lui cette même intuition d’un art déculturé que ce dernier baptisera du nom d’art brut. Exploitant volontiers tous les supports qui lui tombent sous la main, Chaissac développe alors une œuvre d’une rare puissance d’expression, dont les motifs rudimentaires, voire grossiers, renvoient à un ordre archaïque. Le dessin, simplement tracé, sans autre souci que de faire signe, et la couleur, exclusivement employée en aplats hautement colorés, y sont les ingrédients récurrents d’un art qui se prétendait « demi-naïf ». En fait de naïveté, il y avait surtout chez lui le souci de ne pas s’embarrasser de discours alambiqués, et cette volonté de faire œuvre à partir de n’importe quel objet de rebut. Les quelque 240 œuvres réunies à Nantes non seulement en témoignent, mais elles avouent l’aspect précurseur de la démarche d’un artiste que les années 80 ont justement réévaluée.

NANTES, Musée des Beaux-Arts, jusqu’au 27 septembre.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°498 du 1 juillet 1998, avec le titre suivant : Chaissac le précurseur

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