Photographie

Coup de cœur

Boris Mikhaïlov le transgressif

Maison européenne de la photographie (Mep), Paris-4e - Jusqu’au 15 janvier 2023

Par Christine Coste · L'ŒIL

Le 27 septembre 2022 - 344 mots

PARIS

Rétrospective  - L’exposition Boris Mikhaïlov à la Mep est sans contexte l’un des temps forts photo du deuxième semestre.

Programmée bien avant la guerre en Ukraine, cette première rétrospective en France, conçue en étroite collaboration avec le photographe et Vita, son épouse, porte la grande liberté de ton d’une œuvre indissociable de l’origine de son auteur, né à Kharkiv, en 1938, d’un père russe et d’une mère juive ukrainienne. Le régime soviétique, son ordre politique, économique et moral, puis sa chute, irriguent un travail qui, dès le début, a joué avec les interdits de ce régime oppressif, dont celui de faire des photos de nu. « L’art peut discréditer une idéologie par des moyens esthétiques », rappelle une citation de Boris Mikhaïlov dans l’exposition. L’artiste dissident s’en est donné à cœur joie, bravant censures et menaces, en usant autant de la photographie, de l’archive, de la performance que de la mise en scène. Le florilège de séries, fortes de prêts de diverses institutions et d’inédits, en témoigne sur soixante années de production. Qu’il s’amuse avec la figure du héros soviétique ou post-soviétique en se mettant lui-même en scène nu, ou qu’il sape l’autorité de l’imagerie de la culture populaire diffusée par le régime soviétique par un simple recoloriage à la main : nombreuses sont les séries transgressives, critiques. Tout aussi puissantes sont celles qui documentent la désindustrialisation, la pollution, les corps mis à nu des laissés-pour-compte de la société ukrainienne post-soviétique, ou la révolte de Maïdan, dont les photographies réalisées avec Vita, et tirées en format XXL, résonnent avec l’actualité. Vita, la muse, la complice, que l’on retrouve dans nombre de travaux devant ou derrière la caméra, et qui, de Kharkiv à Berlin où le couple s’est installé depuis quelques années, a toujours été à ses côtés. La série Diary. 1965-2022, conçue spécialement pour cette rétrospective à partir de tirages originaux pris dans les années 1960, raconte à cet égard beaucoup de choses. « Si ce journal intime photographique se concentre sur ma vie privée, il reflète aussi mon environnement social et toutes mes recherches plastiques compilées », dit-il.

« Boris Mikhaïlov. Journal ukrainien »,
Mep, 5/7, rue de Fourcy, Paris-4e, www.mep-fr.org

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Cet article a été publié dans L'ŒIL n°758 du 1 octobre 2022, avec le titre suivant : Boris Mikhaïlov le transgressif

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