Architecture - Prix

Salima Naji, l’architecture porteuse d’histoires

Par Mathieu Oui · L'ŒIL

Le 12 août 2025 - 452 mots

Très impliquée dans la rénovation des constructions traditionnelles et la préservation des savoir-faire ancestraux, la Franco-Marocaine a reçu le Global Award For Sustainable Architecture.

Revitalisation de la Citadelle d’Agadir Oufella, Agadir, Souss-Massa. © David Goeury
Revitalisation de la Citadelle d’Agadir Oufella, Agadir, Souss-Massa.
© David Goeury
Centre d’Interprétation du Patrimoine de Tiznit, Médina de Tiznit. © Guy Thimel
Centre d’Interprétation du Patrimoine de Tiznit, Médina de Tiznit.
© Guy Thimel

Ce n’est pas le premier prix qui récompense le travail de l’architecte et anthropologue Salima Naji, mais celui-ci pourrait bien marquer un tournant dans sa carrière. Car le Global Award for Sustainable Architecture [prix mondial de l’architecture durable] qu’elle partage avec quatre autres lauréats, est souvent considéré comme le marchepied du prestigieux prix Pritzker. Une juste récompense pour celle qui, depuis plus de vingt ans, s’inscrit dans l’héritage des savoir-faire des bâtisseurs du Maroc, au service d’une architecture en terre ou en pierre, « porteuse d’histoires, fragile, mais qui peut durer des siècles si on l’entretient bien », selon elle. Après avoir commencé des études d’art, cette fille d’un couple franco-marocain, née en 1971 à Rabat, choisit de revenir à ses premiers amours, l’architecture. Parallèlement à son diplôme préparé à l’École d’architecture de Paris-La Villette, elle consacre son doctorat en anthropologie, à l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS), aux greniers collectifs de l’Atlas. Durant six ans, elle arpente ce massif montagneux pour réaliser un inventaire de ces constructions agricoles toujours en activité. En 2004, Salima Naji crée son agence d’architecte au Maroc pour proposer une alternative en matière de construction. Impliquée dans la restauration du patrimoine (greniers collectifs, ksours), elle s’engage aussi dans la réalisation de bâtiments à vocation sociale (maternité, coopérative, maison des artisans, etc.). Pour la réhabilitation de la Kasbah Aghenaj à Tiznit, la restauration des remparts s’est ainsi accompagnée de la création d’un théâtre en plein air, d’un Centre d’interprétation du patrimoine et d’un centre d’archives. Des opérations qui sont généralement l’occasion d’impliquer les communautés locales, sous la forme de chantiers participatifs. Salima Naji s’attache à convaincre édiles et usagers de résister aux attraits du béton armé, pour privilégier les matériaux traditionnels : pierre sèche, bois ou briques de terre crue, qui ont fait leur preuve. « La terre, c’est le ventre premier, la matrice » aime-t-elle dire. En début d’année, l’architecte a livré la restauration de la Villa Carl Ficke, construite en 1910 à Casablanca, emblématique du patrimoine Art déco de la capitale économique du pays. Après avoir été une demeure bourgeoise, un centre de détention, un orphelinat, puis l’annexe d’un lycée, l’édifice entouré d’un grand parc est désormais un centre consacré à la mémoire de la ville, ouvert à tous. Présente sur tous les fronts, Salima Naji signe aussi le commissariat de l’exposition « Amazighes » au Musée des civilisations de l’Europe et de la Méditerranée (MuCEM) de Marseille. Il y est question de la permanence de cette culture berbère ancestrale dans laquelle – et ce n’est probablement pas un hasard – les femmes jouent un rôle fondamental.

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Cet article a été publié dans L'ŒIL n°787 du 1 juillet 2025, avec le titre suivant : Salima Naji, l’architecture porteuse d’histoires

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