États-Unis - Justice

Richard Prince conclut un accord avec des photographes avant l’audience du procès qu’ils lui intentaient

Par Marion Krauze · lejournaldesarts.fr

Le 31 janvier 2024 - 595 mots

NEW YORK / ÉTATS-UNIS

L’artiste va verser 650 000 dollars aux deux photographes, réglant à l’amiable un litige qui dure depuis huit ans.

Le peintre et photographe américain Richard Prince a accepté de verser 650 000 $ (599 000 €) aux photographes Donald Graham et Eric McNatt, qui l’accusent d’avoir inséré leurs images dans sa série « New Portraits ». L’artiste n’a en revanche pas été tenu d’admettre que cela relevait de la violation de droits d’auteur. Le tribunal fédéral de Manhattan a acté cet accord dans un document du 25 janvier, mettent fin à un long conflit initié en 2015.

Selon le New York Times, les avocats de Prince ont indiqué que l’artiste paierait 200 000 $ (185 000 €) à Graham, 450 000 $ (415 000 €) à McNatt et 250 000 $ (230 000 €) pour d’autres frais. Les jugements indiquent que ces dommages-intérêts sont « d’un montant égal à cinq fois le prix de vente » des photographies. L’artiste doit également cesser à l’avenir de reproduire et vendre les photographies concernées. 

La pratique artistique de Richard Prince se fonde sur l’appropriation. Il est connu pour utiliser des images publicitaires et photographies diverses dans ses peintures et collages. Sa série « New Portraits » présente des captures d’écran issues de publications Instagram, qu’il agrandit et imprime sur une toile en y ajoutant ses propres commentaires. La photographie de Donald Graham y a été insérée dans l’œuvre Rastafarian smoking a joint (« Rastafarien fumant un joint »), qui fut exposée à la Gagosian Gallery en 2014. Celle d’Eric McNatt est reprise dans Kim Gordon 1, exposé à la Blum & Poe Gallery de Tokyo en 2015.

Richard Prince s’est défendu en invoquant le fair use (« utilisation équitable »), une exception aux protections fédérales du droit d’auteur qui autorise une utilisation limitée d’une autre œuvre. Mais selon les deux photographes, il a reproduit une si grande partie de leurs œuvres qu’il ne s’agit plus de fair use mais bien de violation de droits d’auteur. Graham a démarré les poursuites envers Richard Prince et la Gagosian Gallery fin 2015, et McNatt envers Prince et la Blum & Poe Gallery en 2016. Les deux procès devaient avoir lieu respectivement le 29 janvier et le 20 février 2024.

Matt Gaughan, le responsable de l’atelier de l’artiste, est satisfait de l’issue du litige. Richard Prince a « accepté de régler plus de huit années de litiges coûteux pour une infime partie de ce qu'un procès seul aurait coûté », tout en « refusant catégoriquement d’admettre la violation » déclare-t-il au New York Times.

Le règlement de ce conflit intervient peu de temps après que la Cour suprême des États-Unis se soit prononcée sur un important litige en matière de droits d’auteur en mai 2023 : celui qui a opposé la Fondation Andy Warhol et la photographe Lynn Goldsmith. La publication dans Vanity Fair du portrait du chanteur Prince, issu d’une sérigraphie réalisée par Andy Warhol, a été jugée comme étant une atteinte aux droits d’auteur de la photographe – qui n’avait pas été créditée – et non comme relevant du fair use. 

Richard Prince avait déjà été accusé de telles pratiques par le passé. En 2009, le photographe français Patrick Cariou l’avait poursuivi pour violation de droits d’auteur après avoir découvert que des photographies de son livre Yes Rasta avaient été utilisées dans des collages exposés à la Gagosian Gallery en 2007. La cour d’appel avait toutefois jugé en 2013 que Richard Prince bénéficiait de l’exception du fair use. En 2016, c’est le photographe londonien Dennis Morris qui lui intente un procès pour l’utilisation de trois photographies des Sex Pistols dans des peintures exposées au Guild Hall de New York en 2011.
 

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