États-Unis - Biennale

Qui est Alma Allen, représentant des États-Unis à la Biennale de Venise 2026 ?

Par Camille Pecoroni · lejournaldesarts.fr

Le 4 décembre 2025 - 650 mots

Le choix du sculpteur, peu connu, laisse perplexe sur son processus de désignation.

Alma Allen. © Ana Hop
Alma Allen.
© Ana Hop

Alma Allen qui va représenter les États-Unis à la prochaine Biennale de Venise est un quasi-inconnu. Né en 1970, dans l’Utah, c’est une figure singulière de la sculpture américaine. Autodidacte, il a travaillé entre Joshua Tree et Mexico, développant un langage formel fondé sur des sculptures organiques en pierre, marbre et bronze. Il présentera à Venise « Alma Allen: Call Me the Breeze » (« Appelle moi la brise »), sous le commissariat de Jeffrey Uslip et avec le soutien de la récente American Arts Conservancy (AAC).

Cette trajectoire atypique, peu visible sur le plan institutionnel, rend sa sélection inattendue. Bien qu’il ait été représenté par des galeries reconnues telles que Kasmin Gallery (fermée en 2025) à New York, Mendes Wood DM ou Olney Gleason, Alma Allen reste absent du parcours muséal généralement associé aux artistes choisis pour incarner les États-Unis. Mis à part quelques œuvres au Los Angeles County Museum of Art (Lacma), il est peu présent dans les musées américains et encore moins internationaux. Aucune trace de lui dans les collections publiques françaises (Frac, Cnap, etc.).

Des figures comme Louise Nevelson en 1962, Ed Ruscha en 1970 ou Bruce Nauman en 2009 avaient toutes derrière elles des carrières internationales établies lorsqu’elles ont représenté les États-Unis à Venise. En 2022, Simone Leigh, soutenue par l’Institute of Contemporary Art de Boston et le Département d’État avait transformé le pavillon américain avec Sovereignty, une installation monumentale.

Alma Allen, Not Yet Titled (2025), bronze, 300 x 295 x 53 cm, exposé sur Park Avenue à New York en 2025
Alma Allen, Not Yet Titled (2025), bronze, 300 x 295 x 53 cm, exposé sur Park Avenue à New York en 2025.
© Alma Allen

La nomination d’Alma Allen intervient dans un contexte difficile. Initialement ce devait être Robert Lazzarini (60 ans) mais l’artiste ne s’est semble-t-il pas mis d’accord sur les conditions financières avec l’institution qui devait l’accompagner en l’occurrence l’Université de South Florida. Cette défection a laissé le processus dans l’incertitude et nourri plusieurs semaines de spéculations. Le « shutdown » fédéral prolongé est ensuite venu désorganiser le calendrier, accentuant la fragilité de l’ensemble.

Ces difficultés ont été renforcées par l’absence du National Endowment for the Arts (NEA), qui joue traditionnellement un rôle clé dans la sélection. Créé en 1965, le NEA est l’agence fédérale américaine chargée de soutenir les arts et de constituer le comité consultatif évaluant les candidatures pour Venise. Donald Trump et Elon Musk ayant dévitalisé l’agence, elle n’a pas pu conduire la sélection, laissant le Département d’État (le ministère des affaires étrangères) conduire seul le processus.

C’est donc une toute jeune (elle a été créée en 2025) organisation, l’American Arts Conservancy (AAC) qui est chargée de porter le projet, de lever les fonds nécessaires et d’assumer les obligations contractuelles imposées par le Département d’État. Basée en Floride, elle compte parmi ses membres plusieurs personnalités ayant des liens avec la famille Trump. Aussi Alma Allen a dû faire face à la réticence de certaines de ses galeries (Mendes Wood DM et Olney Gleason), qui l’ont encouragé à renoncer avant de mettre fin à leur collaboration lorsqu’il a accepté la mission.

Pour l’artiste, l’enjeu est donc désormais de convaincre le monde de l’art de la valeur de son œuvre tout en portant un nouveau modèle de désignation. Le financement du pavillon révèle l’ampleur de ces responsabilités qui incombent à l’artiste et à l’institution porteuse. Comme pour chaque biennale, la subvention fédérale s’élève à 375 000 dollars (321 000 euros), une somme insuffisante qui doit être complétée par des apports privés. En 2024, par exemple, le budget global du pavillon américain avoisinait 5,8 millions de dollars (5 millions d’euros), dont l’immense majorité provenait de donateurs, de fondations et de mécènes. Une partie des fonds fédéraux est par ailleurs reversée à la Peggy Guggenheim Collection, gestionnaire du bâtiment.

Le pavillon français s’appuie, lui aussi, sur un modèle public-privé. Lors de l’édition 2015 assurée par Céleste Boursier-Mougenot, son budget s’établissait autour de 950 000 euros, répartis entre le ministère de la Culture (300 000 euros), l’Institut français (350 000 euros) et des mécènes privés (300 000 euros). 

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