École d'art

Pierre Wat : « Avec l’Université populaire de "L’Œil", on ne brade pas la qualité ! »

Par Isabelle Manca · L'ŒIL

Le 3 octobre 2017 - 614 mots

Le Bal Blomet et L’Œil créent la première Université populaire d’histoire de l’art. Ce deuxième cycle comprend six conférences sur les grands peintres des XIXe et XXe siècles, deux dimanches par mois à 10 h 30.

En quoi consiste l’Université populaire d’histoire de l’art de L’Œil que vous animez ?
Il s’agit de cycles de conférences sur l’histoire de l’art présentées au Bal Blomet, l’ancien Bal Nègre. Guillaume Cornut a totalement reconverti ce cabaret historique en restaurant et salle de spectacles. Il souhaitait y proposer une programmation musicale, mais aussi autre chose d’exigeant sur l’art. Ce projet s’est concrétisé par un partenariat avec L’Œil. Nous avons commencé au printemps avec six conférences sur la période contemporaine, c’est-à-dire les XIXe et XXe siècles : David, Courbet, Cézanne, Mondrian, Hockney et Soulages. Cet automne, nous conservons la même formule et nous abordons Ingres, Delacroix, Monet, Klee, Warhol et Jeff Koons. La fréquentation a quasiment été multipliée par trois entre la première et la dernière conférence. C’est très encourageant et cela montre que ce type d’intervention répond à une vraie attente du public.


Pourquoi avoir choisi ce nom ? Et cette formule, alors qu’il y a déjà des lieux qui proposent des cours ?
Le titre fait référence au modèle de Michel Onfray, mais aussi à l’Université de tous les savoirs d’Yves Michaud. « Université », cela veut dire que l’on ne brade pas la qualité parce que c’est une audience populaire ; j’arrive avec la même exigence envers moi-même que pour mon public habituel. Par ailleurs, je pense que le grand public n’est pas vraiment au courant qu’il y a des conférences dans les musées ni même que l’on peut facilement être auditeur libre à l’université. Pour aller à sa rencontre, il faut trouver d’autres structures qui ne sont pas académiques ni institutionnelles. Les cafés philosophiques ont ouvert la voie en investissant des lieux de sociabilité. Le monde de l’art reste très intimidant et socialement exclusif. Je suis très favorable au travail de vulgarisation, je pense même que c’est un prolongement du travail d’enseignant chercheur. Je n’ai pas de problème de registre et je pense, au contraire, que c’est aux spécialistes de faire la vulgarisation. C’est vraiment un enjeu pédagogique. Et je trouve que c’est aussi une façon d’incarner L’Œil qui est, pour moi, un magazine d’éducation populaire au sens noble du terme.

Quels sont les enjeux de ce type d’intervention ?
L’idée, c’est d’aller vers les gens dans un cadre où la culture n’est pas intimidante. On vise une sorte d’initiation, d’apprentissage. Je montre peu d’œuvres que je commente beaucoup en contextualisant pour prendre en compte la dimension sociale, philosophique et culturelle de l’art. Il ne s’agit pas de faire un cours encyclopédique, mais d’apprendre à regarder. Par exemple, pour comprendre les liens entre art et politique, mais aussi la différence entre une image et une œuvre. Apprendre à regarder, à décrypter est un enjeu absolument fondamental aujourd’hui. Nous avons tous admis le fait que nous devions apprendre à lire, mais qui a admis le fait que nous devions aussi apprendre à voir ? Pour moi, c’est également une manière de montrer que l’histoire de l’art n’est pas une discipline antiquaire mais une discipline totalement actuelle qui donne des clés de lecture. Nous sommes dans une société de l’image, une société où l’on croule sous les images. Je pense qu’apprendre à les décrypter pour ne pas être dupe est vraiment un enjeu démocratique. C’est presque une nécessité politique, une manière de rester vigilant.

« En France, l’évolution des styles, des courants et des artistes s’enseigne peu ou pas, et moins encore la manière dont une image se décrypte. »

Éric Bietry-Rivierre, Le Figaro, 01/06/12

 

Université populaire au Bal Blomet : 6 dimanches, 6 conférences

Ingres (1er octobre)
Eugène Delacroix (15 octobre)
Claude Monet (5 novembre)
Paul Klee (19 novembre)
Andy Warhol (3 décembre)
Jeff Koons (17 décembre)

Réservation : www.balblomet.fr

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Cet article a été publié dans L'ŒIL n°705 du 1 octobre 2017, avec le titre suivant : Pierre Wat : « Avec l’Université populaire de "L’Œil", on ne brade pas la qualité ! »

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