Si plusieurs écoles supérieures d’art ont mis en place des dispositifs pour accompagner les étudiants dans l’appréhension de leur univers professionnel, seuls 13 % d’entre eux en profitent.

France. L’insertion professionnelle, éternel défi des écoles d’art ? « L’objectif d’insertion professionnelle n’est pas suffisamment placé au premier plan », estimait, en 2023, le Hcérès au terme de son évaluation de 13 écoles supérieures d’art et de design. Le Haut Conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur recommandait alors aux écoles d’« accompagner les étudiants dans toutes les dimensions de la professionnalisation des métiers artistiques». Mais un rapport récent de l’Inspection générale des affaires culturelles dresse une réalité tout autre. Tout au long de l’année 2025, Philippe Belin et Rémi Tomaszewski ont passé au peigne fin les dispositifs de professionnalisation et d’insertion professionnelle mis en place par les 100 écoles de l’ESC (enseignement supérieur Culture) – parmi elles, 44 écoles supérieures d’art et de design nationales et territoriales, lesquelles concentrent un tiers des étudiants. « Tous les établissements prennent en compte l’insertion professionnelle aussi bien en cours de cursus qu’après la diplomation », concluent les deux inspecteurs généraux. Selon eux, les actions « sont développées en fonction des besoins métiers, des contraintes du marché de l’emploi et des opportunités artistiques au niveau local ».
Nombreuses sont les écoles d’art à avoir intégré des enseignements professionnalisants à leurs cursus et à proposer des formations complémentaires permettant aux jeunes artistes de diversifier leurs activités : le rapport présente une dizaine de dispositifs élaborés par 12 écoles d’art. Ainsi, depuis 2023, les étudiants de la 3e à la 5e année et les alumni des Beaux-Arts de Paris peuvent bénéficier du programme « Via Futura », qui comprend des ateliers thématiques, des accompagnements individualisés et des rencontres avec des professionnels. Le dispositif « Après l’école », à l’Ensad (École nationale supérieure d’art et de design) de Limoges, permet quant à lui aux étudiants de la 3e à la 5e année de se familiariser avec les différents statuts existants pour l’exercice d’une activité artistique et d’obtenir une aide pour effectuer les premières démarches administratives. Même principe à l’Ensad de Nancy : son programme « Perspectives », lancé en 2020, forme les étudiants aux questions administratives et comptables. Concernant les formations complémentaires, la Haute École des arts du Rhin Strasbourg-Mulhouse, l’École supérieure d’art Dunkerque-Tourcoing, l’École supérieure d’art et de design Marseille-Méditerranée et l’École nationale supérieure d’art de Bourges proposent toutes les quatre depuis le début des années 2000 des formations spécialisées à destination des artistes souhaitant développer une pratique ancrée dans le champ éducatif et social (écoles, hôpitaux, prisons, etc.), et délivrent à ce titre un CFPI (certificat de formation de plasticien intervenant).

Si l’alternance est très peu proposée par les écoles d’art, du fait de la rareté de l’emploi salarié dans le secteur des arts visuels (38 % des artistes ont le statut d’artiste-auteur et 16 % sont des micro-entrepreneurs), la mise en situation professionnelle par le biais d’expositions ouvertes au public est en revanche largement plébiscitée par les établissements. Les inspecteurs dénombrent une dizaine de programmes d’expositions portés individuellement ou conjointement par les écoles. La Villa Arson à Nice, les Beaux-Arts de Paris et les Arts décoratifs à Paris offrent en la matière diverses opportunités à leurs étudiants. Aux Beaux-Arts de Paris, l’exposition annuelle « Crush » permet depuis 2021 aux étudiants de 4e et 5e année de bénéficier de l’accompagnement de commissaires d’exposition et de présenter l’une de leurs œuvres à des professionnels du monde de l’art. L’École nationale supérieure des arts décoratifs a lancé un nouveau label en 2024, « After », sous la forme d’expositions et d’un project room. Plusieurs écoles d’art participent par ailleurs au programme « Première » de l’Abbaye Saint-André-Centre d’art contemporain de Meymac (Corrèze), lancé en 1995 : 6 à 8 diplômés des écoles de Bourges, Limoges, Clermont Métropole et de l’École supérieure de l’image Angoulême-Poitiers sont sélectionnés chaque année pour exposer au centre d’art.
Les résidences figurent également en bonne place des dispositifs d’aide à l’insertion élaborés par les écoles d’art. La formule est particulièrement appréciée de l’équipe de l’École nationale supérieure d’art de Dijon : les étudiants peuvent candidater à plusieurs programmes, parmi lesquels la résidence croisée avec l’Escola de Comunicações e Artes de São Paulo, mise en place en 2018, qui débouche sur une exposition au Musée d’art contemporain de l’université de São Paulo, et la résidence de production et d’exposition au Frac (Fonds régional d’art contemporain) Bourgogne lancée en 2019. Par ailleurs, les nombreux prix décernés par les écoles d’art ou par des institutions partenaires débouchent souvent sur des résidences : depuis 2018, le prix de Madrid offre à un diplômé du master Design de l’École nationale supérieure des beaux-arts de Lyon l’opportunité d’effectuer une résidence de deux mois à la Casa de Velázquez, à Madrid. Mais ces prix peuvent aussi être l’occasion, pour les lauréats, de présenter leur travail dans le cadre d’une exposition. Les bénéficiaires du prix « L’écho des cimes » de la Villa Arson, mis en place en 2024, créent une œuvre pour le parcours d’art contemporain du massif de l’Audibergue et exposent à l’Espace de l’Art concret, à Mouans-Sartoux (Alpes-Maritimes).
Ces dispositifs, aussi nombreux soient-ils, ne bénéficient aujourd’hui qu’à une infime partie des étudiants d’écoles d’art. Sur les 13 % d’heureux élus, seuls 2 % en profitent au cours de leur formation ; les 11 % restants y ont accès après l’obtention de leur diplôme. Pour les auteurs du rapport, « il reste donc un gros effort à accomplir si l’on souhaite que ces dispositifs touchent une majorité d’étudiants au sein des cursus de l’ESC ».
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Comment les écoles d’art tentent de faciliter l’insertion professionnelle
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°663 du 17 octobre 2025, avec le titre suivant : Comment les écoles d’art tentent de faciliter l’insertion professionnelle








