Société

Moscou déconfine les films de comédie mais pas les drames

Par Emmanuel Grynszpan, correspondant à Moscou · lejournaldesarts.fr

Le 29 juillet 2020 - 427 mots

MOSCOU / RUSSIE

La ministre de la Culture ne va autoriser pour l’instant que la projection de films « russes, légers et simples ».

Olga Lioubimova, ministre russe de la Culture © Pravmir
Olga Lioubimova, ministre russe de la Culture
© Pravmir

Tous les genres cinématographiques ne sont pas égaux devant le coronavirus. La ministre de la Culture russe Olga Lioubimova a déclaré jeudi sur l'antenne de Rousskoïe Radio que le déconfinement des salles de cinéma débutera par la projection de comédies « russes, légères et simples » tandis que les drames ne seront montrés au public qu'à l'approche du nouvel an. 

Selon la ministre, le public du cinéma est « las d'un long confinement à la maison » et n'est « probablement pas prêt pour des drames ». À Moscou, le confinement a duré deux mois et s'est achevé fin mai, mais la vie culturelle reprend lentement avec la réouverture seulement ce mois-ci des musées. Les cinémas rouvriront le 1er août dans la capitale.

Olga Lioubimova indique être en discussion avec les distributeurs de cinéma pour qu'ils « décident eux-mêmes de se concentrer sur la sortie de films simples et légers ». Elle estime d'ailleurs que « la plupart des Russes n'ont pas besoin de films complexes, car ils préfèrent les films légers »

Le dispositif de commande et de production du cinéma russe est aujourd'hui presque entièrement dépendant des subventions fédérales décidées par le ministère de la Culture. C'est pourquoi les déclarations publiques - fort rares au demeurant - d'Olga Lioubimova sont interprétées comme une ligne à suivre. Le précédent ministre de la Culture Vladimir Medinsky s'arrogeait le droit de décaler la sortie de films étrangers pour favoriser les grosses productions russes et avait aussi bloqué la sortie d'une dizaine de films déplaisant au pouvoir pour des raisons idéologiques.

L'initiative de sa remplaçante n'a pas tardé à susciter des réactions au mieux ironiques, au pire ulcérées. Au metteur en scène français Dominique Jambon, ancien directeur du Centre Culturel Français à Moscou, l'initiative « rappelle Tchevengour, le roman d'Andreï Platonov, raillant un communisme idéal où il ne peut pas y avoir de conflits ». L'éditorialiste Anton Orekh s'emporte contre un « État s'ingérant dans absolument toutes les sphères de la vie, qui nous considère comme des enfants ou des crétins ». Et contre « une ministre de la Culture et ses conseillers [qui] se permettent de décider des genres que j'ai la possibilité de voir en salle. » 

Plusieurs commentateurs font un parallèle avec le cinéma populaire soviétique, qui épousait le plus souvent l'expression consacrée de « comédie simple et légère ». Et qui était le meilleur outil du pouvoir pour embellir une réalité soviétique grisâtre. 
 

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