Art contemporain

STREET ART

Le street art investit la station de métro Auber

Par Stéphanie Lemoine · Le Journal des Arts

Le 7 février 2018 - 529 mots

La RATP inaugurait en janvier dernier à la station Auber deux œuvres de Jean Faucheur, pionnier de l’art urbain. La proposition s’inscrit dans le cadre de travaux de rénovation.

Paris. Depuis le début des années 1980 et l’explosion du graffiti hexagonal, la relation de la RATP à l’art urbain hésite entre la franche hostilité et la sollicitation. D’un côté, les procès intentés aux auteurs de peintures et de graffitis. De l’autre les campagnes d’affichage (celle de Futura 2000 en 1984 a marqué les esprits) et l’attribution d’espaces d’exposition. L’opération inaugurée le 17 janvier à la station Auber entre évidemment dans le second cas de figure. Selon un mode de relation désormais classique entre entreprises et street art, la société de transport parisienne a choisi d’accompagner les travaux de rénovation de la station d’un programme artistique. Partenaire choisi : l’association le MUR, qui présente depuis 2007 des artistes de la scène urbaine sur un ancien espace publicitaire de la rue Oberkampf.

C’est Jean Faucheur, pionnier de l’art urbain et à l’origine du MUR, qui inaugure l’événement. Il y expose deux tirages numériques de trois mètres sur cinq, intitulés À l’autre bout du monde. Située de part et d’autre du guichet, en regard des tourniquets permettant d’accéder aux quais, l’œuvre a dû s’ajuster à un environnement sans lumière naturelle, à l’éclairage parcimonieux, que les passants traversent d’un pas pressé. « Le lieu est fatigant, note Jean Faucheur. Ici, les gens sont dans leur bulle et l’idée n’est pas de les en sortir, mais au contraire d’y pénétrer avec douceur et gentillesse. »

Une œuvre fondue dans son environnement

D’où le parti pris visuel de l’artiste : miser sur la « persistance de l’image » plutôt que sur la volonté de perturber. Cette discrétion se joue d’abord dans le choix du sujet : les portraits photographiques de deux enfants. Leurs regards sont tournés vers les tourniquets et se voient prolongés par une série de carrés de taille croissante, reflet des flux de passagers. La relation de l’œuvre à son environnement se noue aussi dans le traitement des images. Tramées sur le modèle des affiches publicitaires, celles-ci sont rehaussées de touches de peinture et de pastel gras. Une façon d’équilibrer la composition et d’apporter un peu de lumière à l’ensemble sans blesser l’œil.

Le renvoi distancié des deux images aux codes de l’affiche publicitaire - le message et l’incitation en moins - n’a rien d’étonnant pour qui connaît Jean Faucheur : depuis le début des années 1980, il fait des espaces d’affichage le cadre privilégié de ses interventions urbaines. En 1983, il s’associe temporairement aux frères Ripoulin et compose avec le collectif artistique (qui compte aussi Pierre Huyghe et Claude Closky) une série d’affichages sauvages. Entre 2001 et 2005, on lui doit l’organisation de « Une nuit », série d’expositions collectives à ciel ouvert sur des panneaux publicitaires de l’Est parisien. Désormais directeur artistique de la L2 à Marseille, Jean Faucheur maîtrise aussi l’art d’ajuster l’œuvre en site urbain aux contraintes de la commande - une compétence sans doute pas étrangère au choix de lui confier l’inauguration du cycle d’expositions à la station Auber. À partir du 1er mars, cinq autres artistes, dont YZ et Speedy Graphito, lui succéderont.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°494 du 2 février 2018, avec le titre suivant : Le street art investit la station de métro Auber

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