Guernica ne voyagera plus

Par Le Journal des Arts · Le Journal des Arts

Le 30 mai 1997 - 392 mots

En refusant de prêter Guernica pour l’inauguration du Musée Guggenheim de Bilbao, le Centro de Arte Reina SofÁ­a entend mettre un terme définitif à ce type de demande et annonce que la plus célèbre œuvre de Picasso ne sera \"plus jamais prêtée\".

MADRID. Le 60e anniversaire du bombardement de Guernica n’aura pas suffi à convaincre le Centro de Arte Reina Sofía de prêter exceptionnellement le plus fameux des tableaux de Picasso pour l’inauguration du Musée Guggenheim de Bilbao, le 3 octobre. Pour des raisons de sécurité et de conservation, "Guernica ne devra être déplacé vers aucun autre musée", a déclaré le président du Centro Reina Sofía, Valeriano Bozal. Les conclusions d’un rapport technique de quatre-vingts pages rendu par les restaurateurs du musée sont sans appel : le tableau pourrait subir des "dommages irréversibles" s’il était amené à voyager de nouveau. Peint par Picasso à la demande des Républicains espagnols pour être montré à l’Exposition universelle de Paris en 1937, le tableau évoque le bombardement par l’aviation allemande de la petite cité basque de Guernica y Luno, le 27 avril de la même année. Expédié en 1939 au Museum of Modern Art (MoMA) de New York, le tableau y restera pendant 42 ans, Picasso ne souhaitant pas le retour de Guernica dans l’Espagne franquiste. Au cours de cette période, la toile sera prêtée à 32 reprises dans le monde entier. Guernica rejoindra triomphalement Madrid en 1981. Exposé dans un premier temps au Musée du Prado, il sera transféré au Centro de Arte Reina Sofía en 1992. "En somme, les bombes sont pour les Basques, les œuvres d’art pour Madrid !" s’est indigné le président du  Parti nationaliste basque (PNV), Javier Arzalluz, en qualifiant cette décision de "grave erreur politique et culturelle". "Nous nous considérons comme les propriétaires moraux de ce tableau", a renchéri de son côté le maire actuel de la ville-martyre, Eduardo Vallejo. Au-delà de la polémique, la décision du Centro Reina Sofía n’étonne qu’à moitié dans la mesure où les demandes de prêt ont été systématiquement refusées depuis 1981. Parmi elles, celle du Centre Georges Pompidou, qui avait souhaité exposer l’œuvre au sein de "Face à l’histoire" et a finalement dû se contenter d’une étude préparatoire. Même le MoMA devra se passer de cette peinture emblématique de la menace fasciste pour sa rétrospective consacrée au XXe siècle, programmée en l’an 2000…

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°39 du 30 mai 1997, avec le titre suivant : Guernica ne voyagera plus

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