Des sites dans la tourmente

Des enchères en ligne qui se cherchent encore

Par Armelle Malvoisin · Le Journal des Arts

Le 30 mars 2001 - 1216 mots

La chute du Nasdaq de plus de 60 % en un an et le fléchissement du Nouveau Marché ont rendu les investisseurs... plus circonspects envers les sociétés du Net. Beaucoup de sites de ventes d’œuvres d’art, privés de capitaux, connaissent de grosses difficultés. L’avenir sourira certainement aux plus solides, aux plus spécialisés et aux plus rentables.

Où en est le marché de l’art sur l’Internet ? Des dizaines de sites, créés il y a deux ou trois ans, beaucoup ont épuisé les fonds levés sans trop espoir de trouver de nouveaux financements. Pour les plus désespérés il reste la solution de la revente. La disparition des uns devrait profiter aux autres. Les sites de ventes aux enchères d’objets divers entre particuliers ont connu un réel succès, et ce, malgré le manque de garanties sur les transactions et la qualité des lots mis en vente. iBazar, qui détient la première place en Europe, vient d’être racheté par le leader mondial eBay, grâce à un échange d’actions, pour une somme de 90 millions de dollars. Ce site, fondé en 1995 aux États-Unis et lancé en France il y a quelques mois, propose une sélection d’œuvres d’art classées dans la catégorie Art & Antiquités. Il s’agit le plus souvent d’objets de collection de faible valeur. Mais le volume important de transactions encourage eBay France à développer la rubrique. Le site a ainsi ouvert un bureau aux Puces de Saint-Ouen (marché Malassis) et propose deux fois par mois des expositions virtuelles d’œuvres de jeunes artistes avec option d’achat. Du côté des ventes aux enchères spécialisées dans l’art, l’immobilisme des commissaires-priseurs a conduit à la multiplication de sites lancés par des opérateurs qui ont conclu des partenariats. Ainsi, eAuctionRoom.com qui fait de la vente en direct, depuis les salles de vente, se réoriente vers des ventes judiciaires pour suppléer le déficit de chiffre d’affaires de celles-ci. L’art est également associé au judiciaire sur iencheres.com qui, après à peine un an d’existence, vient de lever 5 millions de francs auprès d’un investisseur étranger. D’autres sites offrent des services autour des enchères. C’est le cas d’auction.fr qui travaille avec 16 études de commissaires-priseurs afin de mettre en ligne des catalogues de ventes, passées et futures. Me Pierre Cornette de Saint Cyr qui a lancé, à l’automne dernier, Collecties.com, une adresse pour les collectionneurs d’art combinant ventes aux enchères en ligne, à prix fixes, et une foule d’informations pratiques pour les internautes, a bien du mal à boucler son second tour de table d’investisseurs.

Drouot se cantonne à un site d’information
Combien survivront si Drouot réagit ? Pour l’instant, la Compagnie des commissaires-priseurs de Paris est uniquement présente par l’entremise de son site d’information gazette-drouot.com, surtout consulté pour son calendrier des ventes. “Il est trop tôt pour organiser des ventes en ligne. Les enchères live ou virtuelles ne marchent pas très bien. Mais si nous bougeons, nous le ferons tous ensemble”, nous a déclaré Dominique Ribeyre, président des commissaires-priseurs parisiens. C’est assurément un gage de souplesse et d’efficacité. Les investisseurs ne se sont pas pour autant détournés du marché de l’art sur le Net. Ils sont tous simplement moins euphoriques, plus sélectifs et exigent des modèles économiques viables avec des services spécialisés payants. Citons parmi les sites de deuxième génération, antiquitypro.com né en décembre dernier, qui s’adresse aux antiquaires “parce que 80 % des transactions se font entre professionnels”, selon son fondateur, Sébastien Duc. Une soixantaine de marchands paient une adhésion et un forfait pour placer des objets en ligne. Le site puces.fr réunit, pour sa part, 160 boutiques virtuelles. Mais attention, il ne s’agit pas du site lié au marché aux puces parisien.

“Nous jouons un peu sur la confusion”, avoue son responsable, Pierre-Henri Vis-Derenne, car Les Puces,  n’est pas un nom déposé.” Le particulier peut demander une recherche d’objet précis ou déposer en toute confidentialité une annonce de vente à l’attention des marchands. Cette structure, qui appartient au groupe financier AGL, est financée grâce à des droits prélevés sur les ventes en ligne. Les commissions et les abonnements annuels constituent les principales sources financières de enchereonline.com qui n’est pas un site d’enchères en ligne au sens classique du terme. Cette plate-forme fonctionne avec des commissaires-priseurs diplômés qui assistent 200 marchands pour présenter leurs lots sur le site. “L’enchère est gagnante dès le prix de départ, explique le P-DG, Iraj Waliullah. La surenchère permet une souplesse au cas où une pièce serait convoitée par plusieurs acheteurs.” Les particuliers sont autorisés à déposer des objets en ligne. Interauction.org a également su atteindre une “visibilité” satisfaisante en proposant un service gratuit de recherche d’objets d’art en ventes publiques et un service perfectionné, payant, grâce auquel il est possible de voir par exemple des photos provenant de ventes non cataloguées, ou un gros plan sur un détail de restauration. Enfin, où en sont, dans notre tour d’horizon, les pionniers des ventes aux enchères sur l’Internet ? N@rt, propriétaire du Journal des Arts et de L’Œil,, reste l’un des portails du monde de l’art parmi les plus connus et cités. Quant à Artprice.com, qui regroupe des résultats d’enchères dans le monde et des cotations, moyennant redevances, il annonce, pour sa part, 3,2 millions de requêtes par mois pour 22 millions de francs de chiffre d’affaires en 2000 et plus de 100 millions attendus pour 2001, grâce à une consultation croissante, émanant du secteur banque-assurance et des professionnels de l’art.

Du vide grenier au site haut de gamme

Il existe une foison d’autres sites Internet dont le siège est situé à l’étranger. Nous vous en présentons, ici, une petite sélection.
sothebys.com : la société a signé des accords d’exclusivité avec plusieurs milliers de marchands européens et américains. Les objets sont vendus aux enchères sur le Net dans neuf pays. Quelque 60 000 objets ont été cédés depuis le mois de janvier 2000 pour un prix moyen de 1 000 dollars.
christies.com : l’auctioneer avait prudemment décidé il y a plus d’un an de se tenir éloigné des ventes sur le Net. Son site se limite donc actuellement à la mise en ligne de catalogues, à la présentation de ventes à venir et à la publication de résultats de vacations.
eBay.com : le paquebot des ventes aux enchères sur le Net s’est encore développé avec le rachat de iBazar, en début d’année. Il montre en ligne un bel ensemble d’œuvres d’art consignées par des particuliers, des marchands ou des auctioneers.
eBayPremier.com : ce site était auparavant connu sous le nom d’eBaygreatcollection. Il offre une sélection d’œuvres d’art proposées par des marchands et des auctioneers. circle.com : basé à New York et spécialisé dans le haut de gamme, il propose des œuvres sélectionnées chez des antiquaires. Les transactions se nouent a posteriori et non en ligne.
butterfields.com : racheté par eBay, il retransmet en direct des ventes en salle et permet aux clients d’enchérir en ligne.
art-connection.com : le site anglais, créé en 1996, fait figure de vétéran dans le petit monde de l’art. C’est une sorte de grand magasin des beaux-arts qui héberge des œuvres mises en vente par 85 marchands de haut niveau comme Richard Green et la Marlborough Gallery.
artnet.com : même si ce site n’offre pas d’enchères en ligne, sa consultation est recommandée pour tout savoir sur les artistes, galeries, expositions, annonces et résultats de ventes, livres, etc.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°124 du 30 mars 2001, avec le titre suivant : Des sites dans la tourmente

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