Conservation

Par Maureen Marozeau · Le Journal des Arts

Le 10 juin 2009 - 1145 mots

Le Musée du quai Branly prend la première place de ce sous-classement grâce à son travail de documentation de ses collections.

Avant d’être un lieu d’accueil pour le grand public, de proposer un éventail d’activités pédagogiques aux écoliers ou d’abriter le dernier restaurant à la mode, le musée a pour premier rôle d’héberger des collections, de les étoffer, de les étudier et de les valoriser. Une mission requérant des moyens non négligeables, tant humains que financiers. À la tête du sous-classement consacré à la conservation, le Musée du quai Branly (1er), le Musée du Louvre (2e), le Musée national d’art moderne/Centre Pompidou (3e) et le Musée d’Orsay (4e) sont au coude à coude. Se hissant à la première place, le Quai Branly signe une remontée remarquable alors qu’il occupait la 10e place en 2008 et la 5e en 2007. Le peloton de tête du classement se jouant à quelques points près, le musée des arts premiers doit son salut à la numérisation intégrale de ses collections (seules 70 % des œuvres du Louvre sont répertoriées numériquement) et à la documentation complète de ses œuvres  (84 % des œuvres du Louvre disposent d’un dossier).
Dans l’ensemble, l’inventaire informatique des collections est en progression constante. Plus des deux tiers des musées qui ont répondu à notre questionnaire ont transféré leur inventaire sur ordinateur. Saluons à cette occasion le Musée de Picardie à Amiens qui, depuis l’an dernier, a franchi le pas en se tournant vers les nouvelles technologies. Pour ce qui est de la numérisation des œuvres, certains musées sont encore à la traîne, comme le Musée d’art moderne de Saint-étienne Métropole (13e), le Musée des beaux-arts de Reims (18e) et le Musée Rodin (23e).

Plus de « cellules mécénat »
Concernant l’enrichissement des collections, l’année 2008 n’a pas été marquée par une donation aussi spectaculaire que celle d’Alice Tériade au Musée Matisse du Cateau-Cambrésis en 2007 (d’une valeur de 42 millions d’euros). Le montant global des acquisitions a logiquement chuté, passant de 113,3 millions d’euros à 95,4 millions. Mais si l’on fait abstraction de la donation Tériade, les acquisitions d’une année sur l’autre ont cette fois augmenté de près d’un tiers, notamment grâce aux libéralités débloquées pour l’achat de la Fuite en Égypte de Poussin (17 millions d’euros) [1]. Le Quai Branly se distingue à nouveau en passant de 1,6 million à 4 millions déboursés en faveur d’acquisitions diverses, dont une salière en ivoire qui, à elle seule, représente une dépense de 1,8 million. Or, si le Musée des beaux-arts de Lyon fait apparaître l’achat du Poussin dans ses chiffres, il ne faut pas oublier que cet achat a été conclu grâce à un montage financier des plus complexes pour le compte du Musée du Louvre, le tableau n’étant qu’en dépôt à Lyon.
Les difficultés toujours plus importantes que rencontrent les établissements pour mener une politique d’acquisition de qualité se reflètent dans la multiplication des « cellules mécénat ». Parmi les musées à avoir renforcé leurs équipes chargées de récolter des fonds et des dons, citons le Centre Pompidou ( 6), le Quai Branly ( 2), Guimet ( 1), le Musée Carnavalet ( 1), et le Musée des beaux-arts de Bordeaux ( 2). Le président Alain Seban souhaitant faire du mécénat une priorité pour le Centre Pompidou, l’arrivée de Françoise Pams à la direction de la communication du musée à la fin 2008 a coïncidé avec la création d’une Délégation aux partenariats et au développement international et le triplement des effectifs. Forte de neuf personnes, cette équipe ne rivalise pas encore avec celle du Louvre (18 personnes), qui s’est séparée de 3 employés depuis l’an dernier.
Pour leur part, les départements de la conservation continuent d’être majoritairement formés d’attachés. Tandis que le nombre global des conservateurs augmente avec régularité à raison d’une dizaine de postes par an, les attachés de conservation sont eux passés de 452 en 2007 à 535 en 2008, pour ce qui concerne les quelque 360 musées qui ont répondu à notre questionnaire. Déjà remarqué dans notre classement 2007, le Musée de l’armée a engagé 3 nouveaux attachés de conservation, établissant à 25 le nombre de ces agents contre 7 conservateurs ! Le Quai Branly a choisi de répondre différemment cette année, portant à 34 le nombre de ses attachés, contre trois en 2007.  Le poste d’attaché territorial n’existant pas dans les musées nationaux, le Quai Branly a regroupé sous l’intitulé d’« attachés » ses agents de catégorie A employés à la régie, la gestion, les prêts et dépôts, les inventaires et la restauration. De façon similaire, le nombre de ses conservateurs est passé de 16 à 26, à la suite de promotions internes et de l’inclusion des responsables de la médiathèque. Rares exceptions, le Château de Versailles et le Musée Guimet emploient, respectivement, un seul et deux attachés pour douze conservateurs. Sans parler de la cinquantaine de musées qui emploient un attaché de conservation pour assurer le rôle de conservateur…
Notre palmarès a introduit cette année un nouveau critère, celui du coût moyen par visiteur. Ces chiffres sont à prendre avec beaucoup de précaution, les dépenses opérées par les musées n’étant pas comparables stricto sensu. Un musée municipal, par exemple, peut profiter des moyens de la mairie, comme un chargé de communication ou un chauffeur, services qu’un établissement public sera forcé de prendre à sa charge. Plus un musée aura de visiteurs, plus ce chiffre sera bas. Le Louvre (8,36 millions de visiteurs) dépense 22,64 euros par visiteur. Le Musée Nicéphore Niépce de Chalon-sur-Saône (21 395 visiteurs), 100,46 euros par visiteur. Or les frais de fonctionnement du premier sont cent fois plus élevés que ceux du second.
La variation du « coût d’un visiteur » d’un musée à l’autre ne reflète en rien la mauvaise gestion d’un établissement. Les dépenses liées à la restauration des œuvres, elles aussi en progression constante (11 millions en 2008, 12,3 millions en 2009), sont ainsi à observer de manière positive. Avec plus de 2,5 millions d’euros investis dans la restauration, le Louvre reste encore largement en tête. Le Château de Versailles, qui n’avait pas répondu à cette question auparavant, vient cette année gonfler les statistiques avec 700 000 euros investis dans la restauration. Tout comme les 421 800 euros dépensés par le Quai Branly (soit dix fois plus que l’an dernier), un coût principalement dû au « chantier des collections », soit l’intégration des œuvres provenant du Musée de l’homme et de feu le Musée national des arts d’Afrique et d’Océanie. De plus en plus sollicité pour la richesse de ses collections, le Quai Branly a également multiplié par dix le nombre des œuvres prêtées à d’autres institutions à l’occasion d’expositions temporaires. Un rythme de croisière qui ne demande qu’à s’établir dans les années à venir.

TELECHARGER le tableau du classement "Conservation" (PDF)

(1) Ce palmarès étant strictement déclaratif, les données ici réunies sont fournies par les musées.

Nouveaux concours pour l’attaché de conservation

S’il est inutile de revenir sur la portée du choix délibéré du recrutement d’un attaché de conservation en lieu et place d’un conservateur (lire le JdA n° 283, 6 juin 2008), il est important de rappeler que son dernier concours national remonte à 2006. Conformément à la loi du 19 février 2007, l’organisation de ce concours ne sera plus le fait du Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) à compter du 1er janvier 2010. Le Centre national a donc préféré annuler le concours sensé se tenir en 2009 (et organisé sur une période de dix mois) pour ne pas empiéter sur l’action des centres de gestion de la fonction publique territoriale (CDG) auxquels échoit dorénavant la responsabilité du concours. Pour le moment, les modalités d’organisation restent à déterminer. Quels seront les centres coordinateurs chargés d’organiser le concours ? Cette coordination donnera-t-elle lieu à des regroupements au niveau départemental, régional, interrégional ou national ? Le calendrier et la périodicité seront-ils les mêmes pour tous ? Les sujets des épreuves seront-ils uniques ? On peut ainsi imaginer que la région parisienne organise ce concours plus souvent que la région Bretagne, les musées franciliens, plus nombreux, nécessitant plus d’agents que leurs homologues bretons. Une tendance qu’il faudra donc surveiller dans nos prochains palmarès.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°305 du 12 juin 2009, avec le titre suivant : Conservation

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