Le Musée d’Orsay compte désormais dans ses collections une œuvre de la peintre franco-polonaise, un pastel sur papier représentant un portrait-paysage.
Dans sa volonté de réécrire l’histoire de l’art, notamment en redécouvrant des artistes femmes, le Musée d’Orsay vient d’acquérir un pastel de Marie-Melania Klingsland, dite Mela Muter (1876-1967), Une vieille Bretonne, présenté par la galerie Agnews à Tefaf Maastricht. Restaurée, l’œuvre est exposée jusqu’en janvier aux côtés de Paul Gauguin et Émile Bernard dans la salle de l’école de Pont-Aven. De cette artiste, le Musée d’Orsay ne possédait jusqu’alors qu’un portrait de Mela Muter, exécuté par le peintre René-Xavier Prinet (1861-1946).
Née en 1876, à Varsovie en Pologne, et morte en 1967 à Paris où elle s’est installée à l’âge de 25 ans, cette artiste polonaise a été naturalisée française en 1927. Remarquée par le marchand d’art Ambroise Vollard, sa peinture, d’abord proche du symbolisme, évolue rapidement vers une touche expressionniste aux couleurs vives, témoignant de son intérêt pour Van Gogh et Cézanne. Ses nombreux séjours en Bretagne, dont elle peint les habitants, en particulier les miséreux, la familiarisent avec l’école de Pont-Aven.
Le Centre Pompidou conserve plusieurs pièces de l’artiste. Mais si Mela Muter a été exposée ces dernières années au Musée d’art et d’histoire du judaïsme dans une présentation des artistes juifs de l’école de Paris, au Musée du Luxembourg dans l’exposition « Pionnières » ou encore au Petit Palais dans celle du « Paris de la modernité, 1905-1925 », elle reste encore méconnue en France.
S’agit-il vraiment d’un portrait ? Horizontal, le format de l’œuvre convient plutôt au paysage. La vieille femme au teint buriné se confond avec son environnement, dont elle semble une émanation. Le pli de son fichu se prolonge dans la mer, qui est de la même couleur que sa robe. À la fois réaliste par sa représentation du visage de la vieille femme et symboliste par ses échos entre le portrait et le paysage, ce pastel qui échappe à toute catégorisation s’avère aussi expressionniste, par l’accentuation stylisée des marques du temps, aussi bien sur la peau que sur la terre.
Les femmes, des créatrices délicates ? Ce pastel fait voler en éclats d’éventuels clichés sur les artistes femmes. Loin de travailler sur les fondus et les effets de velouté dans le sillage des pastellistes du XVIIIe siècle, Mela Muter opte pour un dessin dynamique, évoquant le cloisonnisme de Paul Gauguin, en même temps que l’art médiéval du vitrail ou de la gravure sur bois. L’œuvre, qui vient enrichir la très riche collection de pastels du Musée d’Orsay, est du reste assez singulière dans le corpus de l’artiste, qui a peu utilisé cette technique, sinon pour des paysages ou des vues d’églises.
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Un pastel de Mela Muter entre à Orsay
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°782 du 1 janvier 2025, avec le titre suivant : Un pastel de Mela Muter entre à Orsay