Collection

Un Botticelli réattribué

Le “Saint François” était entré à la National Gallery en 1858

Par Paul Jeromack · Le Journal des Arts

Le 21 mars 2003 - 506 mots

La National Gallery de Londres ne pourra peut-être pas empêcher le départ du Raphaël mis en dépôt par le duc de Northumberland, en partance pour le Getty Museum à Los Angeles (lire le JdA n° 162, 10 janvier 2003), mais elle a obtenu un beau lot de consolation : la redécouverte d’une peinture des débuts de Sandro Botticelli.

LONDRES - Le monde de l’art n’aura jamais autant bénéficié des techniques modernes. Ainsi, vient d’être identifié un tableau représentant saint François et des anges musiciens qui hante depuis des années les espaces d’exposition secondaires de la National Gallery de Londres. Précédemment considéré comme une œuvre d’un “suiveur de Botticelli, vers 1490-1500”, le panneau de 49,5 x 31,8 cm a été acheté en 1858 – alors attribué à Filippino Lippi –, par le prestigieux directeur de la National Gallery, Sir Charles Eastlake, à la collection Costabili de Ferrare, en même temps que le Saint Vincent Ferrier de Francesco Del Cossa, pour la somme de 212 livres 16 shillings et 10 pennies.
Récemment attribuée à Botticelli, cette septième peinture du maître conservée à la National Gallery est une œuvre de jeunesse. Elle a probablement été exécutée autour de 1468, quelques années avant l’Adoration des mages, également dans les collections du musée – une collaboration entre Sandro Botticelli et Filippino Lippi –, ce qui rend d’autant plus astucieuse l’attribution par Sir Charles du saint François à l’élève précoce de Sandro Botticelli.
Ce n’est pas la première fois que la National Gallery réattribut l’un de ses tableaux. Dans les années 1960, une peinture négligemment considérée comme une vieille copie d’un portrait de Jules II réalisé par Raphaël fut identifiée après nettoyage et reconnue de manière incontestable comme l’œuvre originale disparue. À la suite d’une restauration en 2001, une Madone, longtemps cataloguée en tant que copie d’après Jan Gossaert, s’est révélée être une œuvre autographe.
Si l’œuvre de Botticelli a fait l’objet d’un nettoyage à la National Gallery en 1940, Jill Dunkerton, un conservateur en chef du musée, indique que cette opération “avait seulement décollé la crasse en surface, pas les couches du dessus qui avaient occulté la qualité du tableau. Aujourd’hui, la procédure est, de loin, plus poussée et plus soigneuse. Elle utilise des microscopes surpuissants, et d’autres techniques de pointe”. Outre le fond doré à motifs du tableau, très rare pour une peinture florentine de la moitié du XVe siècle, les travaux effectués sur le tableau à la fin de l’année dernière en ont fait ressortir la délicatesse étonnante et la couleur éclatante, qui garantissent l’attribution au jeune Botticelli.
Tandis que le tableau de Del Cossa compte depuis longtemps parmi les œuvres phares des collections du musée, le Botticelli demeurait une énigme confinée à l’anonymat des galeries secondaires du Musée. Attribué lors de son acquisition à Filippino Lippi, il fut, au cours des années, donné tour à tour à Matteo Di Giovanni, à l’atelier de Fra Filippo Lippi puis à Francesco Botticini, et ce malgré l’avis de nombreux spécialistes, notamment Carlo Gamba, qui l’ont toujours considéré comme un authentique Botticelli.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°167 du 21 mars 2003, avec le titre suivant : Un Botticelli réattribué

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