Nos églises, refuges pour écoles étrangères

Par Bertrand Dumas · L'ŒIL

Le 22 décembre 2009 - 452 mots

Loin de se limiter aux écoles nationales, la collection d’art des églises de Paris s’est enrichie, au fil des siècles, d’œuvres d’artistes étrangers. Ses acquisitions suivent le cours chahuté de l’histoire.

Les peintures dominent largement un ensemble d’œuvres réalisées à Paris ou, plus fréquemment, importées des ateliers des pays voisins. Parmi les œuvres acquises pendant l’Ancien Régime, figure L’Annonciation de Giovanni Lanfranco retrouvée par hasard en 1970 derrière l’orgue du chœur de l’église Notre-Dame-de-Bonne-Nouvelle (IIe). Le tableau d’autel peint vers 1617-1619 a été récemment identifié comme celui provenant du temple de l’oratoire Saint-Honoré.

À cause de leur poids et de leur fragilité, rares sont les sculptures qui prirent le chemin de la capitale. Exception de taille, la magnifique Vierge à l’Enfant d’Antonio Raggi, don du cardinal Antonio Barberini à l’église à Saint-Joseph du couvent des carmes déchaussés (VIe), qui arriva en bateau de Rome à Paris en 1663.

Le mobilier disparu à la Révolution est en partie remplacé par l’afflux d’œuvres d’art saisies par l’armée napoléonienne aux quatre coins de l’Europe, à partir de 1797. Ce qui n’est pas retenu par Vivant Denon pour le Muséum central, ancêtre du musée du Louvre, est déposé dans les églises. Les peintures des écoles italiennes sont quantitativement les plus nombreuses. Dans ce trésor de guerre, non restitué en 1815, se distingue une belle série de pala – tableaux d’autel de grand format – de la main de Gaudenzio Ferrari, Santi di Tito, Giovanni Battista Trotti, Ludovic Carrache, Guercino, Guido Reni, Salvator Rosa ou Sebastiano Ricci.

D’autres sont entrées par la voie pacifique de dons généreux consentis par des paroissiens. C’est le cas de l’imposant Mariage de la Vierge de l’Espagnol Antonio de Pereda, donné en 1833 à l’église Saint-Sulpice et de La Cène du Tintoret offert en 1905 à l’église Saint-François-Xavier (VIIe).
Ces libéralités furent complétées par quelques achats prestigieux de la municipalité. La Ville acheta en 1843 la célèbre Promenade de saint Joseph et de l’Enfant Jésus de Zurbaran qu’elle déposa ensuite à Saint-Médard (Ve). Le Martyre de saint Adrien, attribué au Flamand Gaspard de Crayer, fut acheté en 1857 pour le compte de l’église Saint-Nicolas-du-Chardonnet (Ve). Signalons également l’initiative isolée de la paroisse Saint-Germain-l’Auxerrois (Ier) qui acheta sur ses fonds propres, en 1839 et 1840, deux retables flamands de la première moitié du  siècle afin de compléter le mobilier des chapelles, non remplacé après la Révolution.
 
Cet itinéraire des écoles étrangères complète la collection d’œuvres d’art réalisée pour les églises parisiennes. Le visiteur appréciera ces pièces remarquables avec une émotion d’autant plus grande qu’il les découvrira dans la lumière et l’ambiance si particulières d’un lieu sacré, qui favorisent mieux qu’ailleurs la rencontre intime avec une œuvre de beauté mais aussi de piété.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°620 du 1 janvier 2010, avec le titre suivant : Nos églises, refuges pour écoles étrangères

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