Les vitraux de Sylvie Blocher pour Ardin

Informée d’un concours concernant la création de verrières d’artistes destinées à l’église romane Notre-Dame d’Ardin, paisible bourg des Deux-Sèvres, elle y prête d’abord peu d’attention. Éloignée des croyances religieuses, en lutte contre ce qui « verrouille l’imaginaire », elle décide pourtant un jour de se rendre dans l’église. L’extérieur lui apparaît comme « un paquebot échoué dans un village ». À l’intérieur, elle découvre un mur comme criblé d’impacts de balles, des pierres noircies par un incendie, un chœur désaxé d’une éclatante blancheur. Une dense émotion l’envahit : « L’intérieur m’a parlé comme un corps, un corps éprouvé. » Cet espace désacralisé depuis des lustres éveille en l’artiste un violent désir de créer du sens. Elle soumet alors un projet et remporte le concours. Dans l’église, de solides bancs occupent la nef. Sur chaque banc, des noms de famille apparaissent sur de petites plaques en céramique. Des noms de famille, donc les noms transmis par les hommes. Sylvie Blocher imagine, dans ce lieu jadis baptisé église Notre-Dame de l’Assomption, de faire surgir des présences féminines. Les prénoms des femmes nées à Ardin depuis la Révolution seront visibles sur les trois vitraux orientés au sud. Et le prénom Marie apparaîtra en de multiples langues sur le grand vitrail du chœur. Au fil des heures, images en mouvement, ces prénoms féminins projetés par la lumière solaire se déplaceront sur le sol et les murs de l’église « excommuniée », comme la qualifie joliment l’artiste. Réalisés par Jean-Dominique Fleury, maître verrier, dans les ateliers Bataillou à Toulouse, les vitraux devraient être installés durant l’été 2016.