Chili - Archéologie

Les moaï de l’île de Pâques auraient « marché » debout

Par LeJournaldesArts.fr · lejournaldesarts.fr

Le 26 octobre 2025 - 467 mots

Une modélisation et des tests physiques valident la théorie du transport vertical des moaï, longtemps jugée improbable.

Moaï sur l'île de Paques. © Yves Picq, 2013, CC BY-SA 3.0
Moaï sur l'île de Pâques.
© Yves Picq, 2013

Une étude publiée en 2025 par Carl P. Lipo (Université de Binghamton) et Terry L. Hunt (Université d’Arizona) apporte des preuves plus concrètes indiquant que les statues monumentales de l’île de Pâques, les moaï, étaient déplacées verticalement selon un mouvement de balancement latéral. Cette hypothèse remet en cause les modèles de transport horizontal sur traîneaux ou rondins.

Les chercheurs s’appuient sur plusieurs éléments. Tout d’abord, les routes de Rapa Nui, larges d’environ 4,5 mètres et de forme concave, sont compatibles avec un déplacement vertical. « Les routes font partie du système de transport », confirme Carl P. Lipo.

Ensuite, 62 moaï découverts le long de ces voies présentent des marques correspondant à un basculement latéral : près de 70 % montrent des fractures sur les flancs, et leur position (face ou dos contre terre) dépend du sens de la pente. La forme particulière des statues – base en D et centre de gravité légèrement avancé – favoriserait ce type de déplacement. Aucun indice matériel ne suggère un transport horizontal.

Les chercheurs soulignent également la concordance avec les traditions orales : plusieurs chants et récits évoquent des statues qui marchent, comme dans une chanson populaire locale mentionnant un ancêtre connaissant le secret de leur déplacement. Selon Lipo : « Les habitants modernes de l’île chantent encore une chanson folklorique qui raconte l’histoire d’un ancêtre ancien qui savait comment faire marcher les statues », le rythme en particulier se prête à un mouvement répétitif.

Une première étude de 2012, signée par les mêmes auteurs, avait déjà proposé ce modèle à partir d’expérimentations avec une réplique de 4,35 tonnes, démontrant la faisabilité de la méthode avec un effectif réduit. Ces travaux avaient alors remis en question les hypothèses classiques privilégiant le transport couché.

Leur approche avait néanmoins suscité des critiques, notamment de la part de Jo Anne Van Tilburg, spécialiste de Rapa Nui, qui y voyait une « cascade plus qu’une expérience scientifique », estimant que ces essais manquaient de rigueur contextuelle. D’autres archéologues avaient défendu le transport par traîneau, jugé plus stable sur un terrain accidenté.

La nouvelle étude renforce désormais la validité du modèle vertical grâce à la modélisation numérique, à un corpus archéologique élargi et à de nouvelles expérimentations : une réplique de statue a été déplacée sur 100 mètres en 40 minutes par 18 personnes, à l’aide de trois cordes – deux pour le balancement, une pour stabiliser la tête. « Une fois le mouvement enclenché, il est facile à maintenir », précise Lipo. « Plus les statues sont grandes, plus ce mode de transport est efficace. »

Cette théorie prolonge les travaux menés dès 1986 par l’ingénieur Pavel Pavel et l’archéologue Thor Heyerdahl, qui avaient déjà démontré la possibilité de faire « marcher » une réplique de statue de 12 tonnes avec seulement 17 personnes.

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