GENÈVE / SUISSE
L’institution genevoise pourrait perdre sa subvention fédérale d’ici à 2027. Son avenir est plus qu’incertain.

Genève (Suisse).« Si nous ne trouvons pas de solution stable et pérenne, nous devrons fermer en 2027. » Pascal Hufschmid, le directeur du Musée international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, est catégorique : l’avenir de l’institution est plus qu’incertain. C’est avec stupeur qu’il a appris, en septembre dernier, que le musée était concerné par le rapport Gaillard, le nouveau plan d’économies approuvé par le Conseil fédéral suisse. Parmi les mesures proposées, figure en effet celle d’un transfert de compétences du musée. À partir de 2027, il ne dépendrait plus du ministère suisse des Affaires étrangères mais du ministère de la Culture. Or dans les faits, ce transfert impactera la situation économique de l’institution : elle perdrait la subvention fédérale de 1,1 million de francs suisses (à peu près la même somme en euros) qui lui est versée chaque année depuis 1991. Sous la tutelle du ministère de la Culture, elle ne pourra prétendre qu’à une subvention moindre et non garantie, puisqu’il ne distribue ses aides qu’à une quinzaine de musées à l’issue d’un concours, renouvelé tous les quatre ans. « Nous avons participé dans l’urgence au concours mais même si nous le remportons, nous ferons face à un déficit énorme, précise Pascal Hufschmid. Les musées sélectionnés sont soutenus à hauteur de 5 à 7 % de leurs dépenses. Pour nous, cela représenterait environ 300 000 francs. »
Pour lui, la perspective d’une fermeture se profile de plus en plus. « Le musée ne pourrait pas absorber ce déficit. Ces 1,1 million de francs représentent le quart de son budget de fonctionnement », s’alarme-t-il. De fait, le musée privé fonctionne avec un budget annuel d’environ 4,5 millions de francs, dont la moitié est couverte par les subventions d’institutions (Confédération suisse, Canton de Genève, Comité international de la Croix-Rouge et Fédération internationale des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge), et l’autre moitié par ses ressources propres, produits d’exploitation et des fonds privés. Si la perte de subvention creusait un trou dans son budget, sa compensation par des partenariats privés semble envisageable. Une solution qui, pour Pascal Hufschmid, n’en est pas vraiment une : « Nous allons, bien sûr, diversifier notre financement et augmenter la part de recherche de fonds auprès des privés. Mais la difficulté, c’est que ce financement doit être stable et suffisant sur le long terme. » Quant à demander une aide supplémentaire du Canton de Genève, qui se mobilise en faveur du maintien du soutien fédéral, la question ne se pose pas pour le moment. « Pour l’heure, tous nos efforts sont concentrés sur Berne. Le débat doit être mené à l’échelle fédérale », soutient-il. Et ce d’autant plus que le canton, qui versait au musée 870 000 francs par an, a déjà augmenté sa contribution de 100 000 francs fin 2024, pour soutenir le projet de refonte de l’exposition permanente du musée (les travaux sont prévus de 2026 à 2028).
Si la coupe n’est pas encore effective, Pascal Hufschmid tire dès maintenant la sonnette d’alarme. « Contrairement à une grande majorité des mesures du rapport, celle de notre transfert ne nécessite pas de mise en consultation. Elle a d’ores et déjà été actée par le Conseil fédéral, rappelle-t-il. Mais des élues se sont engagées à nos côtés en déposant des motions parlementaires, ce qui nous donne une ligne de vie politique, pour ainsi dire. » Ces deux motions ont été déposées, aux niveaux cantonal et fédéral, pour faire infléchir la décision et explorer d’autres possibilités. Parmi les propositions avancées, celle d’une nationalisation du musée ou d’un financement réparti entre plusieurs administrations fédérales a été mise sur la table. La rumeur d’une délocalisation du musée à l’étranger, à Abu Dhabi par exemple, a aussi circulé. Une option que Pascal Hufschmid rejette fermement : « Je suis tombé de ma chaise lorsqu’on m’a évoqué cette idée. Pour moi, cela n’a aucun sens. Le musée est fondamentalement lié à la Suisse. » L’institution – qui accueille 120 000 visiteurs par an – retrace l’histoire de l’action humanitaire, qui est inextricablement liée à celle du pays. Elle conserve, parmi les 30 000 objets de sa collection, la toute première médaille du prix Nobel de la Paix et des fonds d’archives de prisonniers de guerre inscrits à l’Unesco.
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Le Musée de la Croix-Rouge menacé de fermeture ?
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°650 du 28 février 2025, avec le titre suivant : Le Musée de la Croix-Rouge menacé de fermeture ?