A la recherche du bouddha

À Bamiyan, l’Unesco souhaite localiser une statue allongée

Par Martin Bailey · Le Journal des Arts

Le 18 avril 2003 - 546 mots

Après la destruction des deux bouddhas géants de Bamiyan en Afghanistan, les travaux archéologiques se sont concentrés sur la consolidation de la falaise fragilisée. Aujourd’hui, les regards se tournent vers la statue mythique du bouddha Parinirvana, un troisième bouddha géant, disparu car enseveli, et dont la particularité réside dans sa position allongée. Les travaux de recherches ne font que commencer...

LONDRES - En 632, le voyageur chinois Hiuan Tsang parcourt l’Afghanistan. Dans ses carnets, il décrit les deux statues géantes des bouddhas, sculptées à même la falaise à Bamiyan, mais il mentionne également la présence impressionnante d’un bouddha Parinirvana, une statue représentant les derniers moments d’existence terrienne du Bouddha alors qu’il entre dans l’état de nirvana. Aujourd’hui disparu – d’après certains archéologues, il aurait été enseveli –, ce bouddha “à l’horizontale” est au cœur d’un projet de recherches soutenu par l’Unesco. Sa longueur dépasserait les 300 mètres, et son gigantisme serait plus impressionnant encore que celui des statues détruites par les Talibans.
Ce projet de recherches a pourtant déclenché une controverse. L’été dernier, une équipe française d’archéologues, dirigée par le professeur Zémaryalaï Tarzi, est arrivée en Afghanistan afin d’y conduire une enquête. Son renvoi en Europe au mois de septembre est dû, selon Zémaryalaï Tarzi, à un malentendu avec un commandant militaire local. Ancien directeur d’archéologie en Afghanistan dans les années 1970, et actuellement enseignant à l’université Marc-Bloch de Strasbourg, le professeur soutient que son projet bénéficie de l’aval du gouvernement de Kaboul ; d’après lui, la statue est ensevelie “à l’est ou au sud-est des bouddhas, sur le site d’un ancien monastère”. Des archéologues sont également opposés à cette recherche, car ils craignent qu’elle n’encourage les pilleurs à multiplier leurs excavations illégales.
L’Unesco soutient néanmoins que la meilleure stratégie pour la protection du bouddha est d’intensifier les efforts pour le localiser et de prendre des mesures préventives. En effet, si le bouddha étendu se trouve aux pieds des deux statues géantes, le situer précisément devient urgent. La falaise abritant les niches des deux bouddhas a été grandement fragilisée par les explosifs utilisés par les Talibans et menace de s’écrouler. Les ouvriers attelés à la conservation des niches et à la consolidation de la falaise conduisent des véhicules lourds, travaillent sur des échafaudages et utilisent des hélicoptères. Il est donc important que cette armada ne mette pas les vestiges souterrains en péril. De plus, une centaine de logements destinés aux habitants réfugiés dans des cavités de la falaise sont en voie de construction. Il est donc vital que leurs constructions et leurs fondations ne causent pas de dommage aux vestiges archéologiques.
Les 21 et 22 novembre 2002 s’est tenue une réunion d’experts internationaux de l’Unesco sur l’Afghanistan. Les recommandations concernaient l’identification et la protection des sites archéologiques et des monuments dont, en particulier, “le site du monastère, la résidence royale et le bouddha Parinirvana”. Selon un porte-parole de l’Unesco, la recherche du bouddha sera incluse dans la phase initiale de l’opération, “afin d’en assurer la protection à l’encontre des pilleurs et de prévenir les dommages causés par les constructions et le travail de conservation sur la falaise.” Il s’agira “d’une exploration, et non d’une excavation”, mais le creusement de fosses “test” n’est pas exclue. La priorité reste toutefois la consolidation des niches et des falaises environnantes.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°169 du 18 avril 2003, avec le titre suivant : A la recherche du bouddha

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