Espagne - Archéologie

En Andalousie, une rare villa romaine ouvre au public

Par Julie Goy, correspondante en Espagne · Le Journal des Arts

Le 9 février 2023 - 735 mots

TORRE DE BENAGALBÓN / ESPAGNE

Longtemps cachée sous un immeuble moderne, la Villa Antiopa peut enfin montrer ses grandes mosaïques polychromes, uniques dans la région.

Vue de la Villa Antiopa à Torre de Benagalbón dans la province de Malaga, en Espagne. © Villa Antiopa
Vue de la Villa Antiopa à Torre de Benagalbón dans la province de Malaga, en Espagne.
© Villa Antiopa

Espagne. Située non loin de la mer, dans la localité de Torre de Benagalbón, à Rincón de la Victoria (Málaga), la Villa Antiopa, déclarée Bien d’intérêt culturel (BIC), est un joyau de l’archéologie romaine qu’il est désormais possible de visiter. Construite à la fin du IIIe siècle, la villa était enfouie pendant plusieurs siècles sous une parcelle urbaine, où elle fut découverte en 2003. Depuis vingt ans, elle bénéficie d’un important travail muséographique afin d’en faire un pôle attractif pour l’archéologie andalouse.

Prenant place sur un site archéologique de l’époque phénicienne, l’ensemble architectural de la villa se composait d’une zone résidentielle, d’un complexe thermal, d’une partie rustique et d’espaces d’exploitation agricole, dans lesquels se trouvait une usine de préparation de poissons salés et de garum – sauce à la chair et aux viscères de poissons de la période étrusque. L’ensemble de la villa était traversé par une grande galerie principale de 31 mètres de long et deux mètres de large, qui donne l’accès, d’est en ouest, aux pièces les plus importantes de la maison. « On connaît de nombreuses villas maritimes, mais aucune ne présente un état de conservation aussi bon et complet », déclare l’archéologue Juan Bautista Salado, directeur des fouilles archéologiques de la villa et directeur technique du projet de musée.

La villa se trouve dans le sous-sol d’un édifice moderne dont le rez-de-chaussée a été transformé en musée qui donne accès aux vestiges. Malgré de fortes suspicions sur la présence d’un site archéologique, enfoui sous le terrain, des habitations avaient tout de même été construites. « D’un point de vue urbanistique et patrimonial, c’est un exemple très intéressant de la façon dont les vestiges archéologiques peuvent être intégrés dans la ville moderne », explique l’archéologue.

Treize mosaïques polychromes au sol

Les collections du musée se composent de biens mobiliers et immobiliers uniques dans la région. Treize mosaïques sont réparties sur les sols de la villa, dont une ornant la chambre des maîtres de la maison, la seule présentant des figures humaines [voir ill.]. Divisée en trois parties, elle se compose de deux encarts ornés de formes géométriques, autour un médaillon central circulaire, qui montre l’épisode mythologique tiré des Métamorphoses d’Ovide (VI, 110-111) durant lequel Jupiter se transforme en satyre pour séduire la princesse Antiopa.

Détail d'une mosaïque romaine avec le satyre (Jupiter) dans la Villa Antiopa © Villa Antiopa
Détail d'une mosaïque romaine avec le satyre (Jupiter) dans la Villa Antiopa.
© Villa Antiopa

Ces mosaïques polychromes présentent des décors uniques, notamment de végétaux et de motifs géométriques, qui ne se retrouvent pas dans les autres villas méditerranéennes. « Il y a beaucoup d’autres villas dans la province de Málaga, au large de la côte. La seule autre villa ornée de mosaïques est celle de Marbella, mais elles sont plus petites qu’à Rincón », précise Juan Bautista Salado. Les murs de la villa ont également été ornés de peintures, mais seuls de petits fragments ont été conservés.

Cent quarante-deux objets sont exposés : des colonnes, des sigillata, des éviers, aiguilles, serrures, lucarnes, bocaux, cruches, stucs, entre autres. Ils proviennent de la villa romaine et des thermes voisins, tandis que les pièces de mobiliers font partie de la collection de la Région d’Andalousie. La figure du Dieu Bacchus, datant probablement du IIe siècle, a été prêtée temporairement par le Musée de Málaga.

La visite est pensée comme une expérience immersive avec des dispositifs de réalité augmentée, afin que les visiteurs puissent se projeter dans le quotidien de la villa. De nombreux objets archéologiques sont présentés de manière traditionnelle, dans des vitrines : céramiques, sculptures, matériaux de construction et autres artefacts. À cela se mêlent des vidéos documentaires, expliquant la construction des mosaïques et décrivant la vie des habitants des lieux.

Différentes projets de recherches archéologiques vont pouvoir commencer dans la région, à partir de la villa. Des projets d’agrandissement du lieu, la poursuite des fouilles et la création d’une salle multi-usage, notamment pour l’organisation de conférences présentant les recherches archéologiques du site et de la région, sont en cours.

1,5 million d’euros ont été investis par le ministère de la Mobilité, des Transports et de l’Agenda urbain et par le conseil municipal pour ouvrir la villa au public. 2 500 visiteurs sont déjà venus admirer les richesses de ce nouveau centre archéologique pendant la semaine de l’inauguration. « C’est un site unique, une villa sans pareille sur la scène nationale », a souligné Francisco Salado, maire de Rincón de la Victoria, lors de l’inauguration de la Villa Antiopa, en décembre dernier.

Villa Antiopa,
49, avenue de la Torre, 29730 Torre de Benagalbón, Málaga, Espagne.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°604 du 3 février 2023, avec le titre suivant : En Andalousie, une rare villa romaine ouvre au public

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