Réjouissante, resplendissante

Par Fabien Simode · L'ŒIL

Le 9 octobre 2014 - 659 mots

Réjouissante
« Marcel Duchamp. La peinture, même » à Beaubourg, « Niki de Saint Phalle » au Grand Palais, « Émile Bernard » à l’Orangerie, « Impression, soleil levant, l’histoire vraie du chef-d’œuvre de Claude Monet » au Musée Marmottan… La programmation des expositions d’automne, à Paris, s’annonçait aussi passionnante que sans risques et sans surprises. Et tant pis si ces expositions ne devaient pas faire avancer la connaissance, le public était attendu nombreux. Car, disons-le, de Marcel Duchamp, Niki de Saint Phalle, Émile Bernard, comme du tableau qui a donné son nom à l’impressionnisme, tout a été dit, écrit, montré. Duchamp n’est-il pas l’artiste sur lequel on a le plus épilogué ces cinquante dernières années ? Une fois que l’on a vu une nana de Niki de Saint Phalle ou une Bretonne d’Émile Bernard, ne les a-t-on finalement pas toutes vues ? Loin s’en faut !, comme le  prouvent actuellement ces expositions qui démontrent brillamment que leurs sujets, pourtant éculés, sont loin d’être épuisés. Marcel Duchamp ? Il fut aussi, contrairement à ce que l’on dit toujours, un peintre, parfois même capable de beaux morceaux de peinture et dont les questions picturales traversent tout l’œuvre, jusqu’à la fin ! Niki de Saint Phalle ? Son travail ne s’arrête pas à ses seules nanas, qui ne forment qu’une infime partie d’un travail plus engagé qu’on ne le pense a priori. Émile Bernard ? On connaît en réalité de lui moins de dix années de production, celles de la période de Pont-Aven, d’une œuvre qui en comprend près de… soixante ! Quant à Impression, soleil levant, Marmottan révèle avec succès que le tableau de Claude Monet n’a pas toujours été le chef-d’œuvre qu’il est devenu, tout en apportant des réponses aux questions que se posent les historiens : à quel endroit du Havre le tableau a-t-il été peint ? En quelle année ? S’agit-il d’un soleil levant ou couchant ? Force est de constater que cette rentrée d’automne est donc bien plus réjouissante qu’elle ne le laissait présager. Mais sans doute assiste-t-on à un mouvement plus général qui consiste à reconsidérer des sujets cent fois abordés, à l’instar de Gustave Courbet dont le Musée Rath, à Genève, réinterroge remarquablement les années suisses, longtemps déconsidérées. À l’instar, aussi, de William Turner dont la Tate Britain, à Londres, réhabilite elle-aussi les œuvres tardives. Et de réconcilier les expositions grand public avec l’avancée des connaissances. Pour le meilleur.

Resplendissante
C’est désormais la tradition : chaque année, la nouvelle édition de la Fiac s’annonce plus resplendissante que l’édition de l’année précédente. Et, chaque année, elle l’est. Après une période de déclin, les organisateurs de l’événement ont trouvé la formule juste : un choix rigoureux de galeries prestigieuses venues du monde entier – représentée par 48 galeries sur un total de 191 stands, la France ne représente que 25 % des exposants –, l’équilibre sous les somptueuses verrières du Grand Palais entre l’art moderne, l’art contemporain et la création actuelle, et un environnement culturel et artistique qui a retrouvé son dynamisme avec l’ouverture ce mois-ci de deux institutions très attendues :  le Musée Picasso et la Fondation Louis Vuitton. Quant à l’expansion de la foire, devenue une nécessité pour résister à la pression des concurrents mastodontes (dont Art Basel), la Fiac pense avoir trouvé la parade en organisant cette année « (Off)icielle », sa propre foire off réunissant une soixantaine de galeries aux Docks – Cité de la mode et du design, dont certaines sont déjà bien installées. Pourtant, le tableau n’est pas complètement idyllique. Les galeries continuent à souffrir de la morosité du marché de l’art, la foire off Cutlog a jeté l’éponge pour cette année, et l’autre off historique, l’ancienne Slick devenue Attitude, n’aura finalement pas lieu sous le nouveau concept qu’elle avait pourtant annoncé… Reste donc à la bouture « (Off)icielle » à prendre, afin que la Fiac poursuive son essor. Et pour que l’édition  2015 soit plus resplendissante encore que jamais.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°673 du 1 novembre 2014, avec le titre suivant : Réjouissante, resplendissante

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